© iStock

La dépression hivernale est-elle un mythe ?

Olivia Lepropre
Olivia Lepropre Journaliste au Vif

Températures plus froides, intempéries, moins d’ensoleillement,… Pour beaucoup, l’hiver est la période la plus maussade de l’année. Certains lient cette humeur générale à ce qu’on appelle la  » dépression hivernale « . Mais selon des chercheurs américains, la dépression saisonnière pourrait n’être qu’un mythe.

Une dépression à tendance saisonnière ou SAD (seasonal affective disorder) est une variante de la dépression classique. Le patient présente la plupart du temps les mêmes symptômes, mais ces derniers vont alors de pair avec les saisons. Les pics de dépression saisonnière se trouvent en automne et en hiver, d’où la fameuse « dépression hivernale ».

« C’est très commun », selon Filip Raes, professeur au centre de psychologie de l’apprentissage et de psychopathologie expérimentale de la KU Leuven, interviewé par De Morgen. « Selon les études, 1 à 3% des gens souffrent de dépression hivernale ».

Stabilité malgré les saisons

Mais la nouvelle étude américaine, publiée dans la revue Clinical Psychological Science par l’Université d’Auburn, se demande si la dépression saisonnière doit être considérée comme une variante à part. L’étude ayant été faite à grande échelle, il est intéressant d’en observer les conclusions. Près de 35.000 sujets, entre 18 et 99 ans, et répartis dans les Etats-Unis y ont pris part. L’étude prend en considération les questions posées sur leurs symptômes, mais également la saison pendant laquelle ils ont été interrogés, où ils vivent et leur exposition à la lumière du jour.

Résultat : peu importe l’endroit où ils se trouvent, la saison ou le taux d’exposition à la lumière du jour, la fréquence de la dépression reste relativement stable. « L’étude montre qu’il y a peu de preuves que la dépression atteint un pic en hiver », explique le Professeur Raes. « Les auteurs soutiennent que la dépression à tendance saisonnière ne peut exister. Et si elle existait, les cas seraient très rares. »

Comment la dépression hivernale est-elle donc apparue dans les manuels ? Les premières études sur le sujet datent des années 80. On demandait alors aux sujets si leurs dépressions se produisaient la plupart du temps ou à une période précise. « La mémoire peut être déformée, et les gens peuvent vite conclure que leurs symptômes se produisent surtout pendant l’hiver », explique Filip Raes. L’étude de l’Université d’Auburn n’est pas à la première à remettre en cause l’existence même des dépressions hivernales. Mais c’est la première qui se fait à une si grande échelle et qui est aussi crédible.

Luminothérapie

« Dire que la dépression est causée par un manque d’ensoleillement est peut-être incorrect », explique Raes. « La météo et le taux de lumière peuvent avoir un impact modeste sur l’humeur d’une personne, comme le montrent plusieurs études. Mais dire que cela a un lien de cause à effet avec un trouble tel que la dépression, cela me semble moins probable ».

La nouvelle étude ne démontre pas pour autant que la lumière n’a aucun rôle à jouer en ce qui concerne la dépression. La luminothérapie en est la preuve. « La luminothérapie semble être très efficace, mais fonctionne aussi pour des dépressions qui n’auraient aucun lien avec la saison » ou l’ensoleillement. L’absence de lumière n’est donc pas une cause en soi, mais plutôt la solution. Pour mieux comprendre, Filip Raes établit une comparaison : « Les aspirines sont efficaces contre les maux de tête, mais cela ne signifie pas que les maux de tête sont la cause d’un manque d’aspirine ».

Vous avez repéré une erreur ou disposez de plus d’infos? Signalez-le ici

Contenu partenaire