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L’âgisme, la discrimination qui détruit la santé des plus âgés

Mailys Chavagne
Mailys Chavagne Journaliste Web

Alors que la population ne cesse de vieillir, l’âgisme, une nouvelle forme de discrimination, pourrait augmenter les coûts des soins de santé.

L’âgisme est un mal qui regroupe à la fois les stéréotypes, les discriminations et les préjugés à l’égard des personnes âgées. Bien qu’il soit répandu dans de nombreuses sociétés, son impact est trop souvent négligé. Et pourtant, ce mépris fondé sur l’âge pourrait affecter directement la santé des victimes.

Afin de déterminer le degré d’influence de l’âgisme sur la santé des personnes âgées, des chercheurs de l’Université de Yale ont analysé plus de 400 études sur le sujet, réalisées dans 45 pays de 1970 à 2017. Cette analyse, qui a inclus plus de 7 millions de participants, est, à ce jour, l’examen le plus complet des conséquences de cette forme de discrimination sur la santé.

C’est également la première étude qui prend en compte à la fois les discriminations au niveau structurel (tels que le refus d’accès aux soins de santé), que les biais au niveau individuel (tels que le stress induit par les stéréotypes). Résultat ? Dans 96 % des études, l’âgisme affecte la santé des personnes âgées. « La portée préjudiciable de l’âgisme que notre équipe a documentée démontre la nécessité d’initiatives pour surmonter l’âgisme« , explique l’auteur principal de l’étude, Becca Levy.

Les conséquences de l’âgisme

Les études ont révélé 11 impacts de l’âgisme sur la santé. Quatre d’entre eux sont structurels :

Refus d’accès aux soins de santé

Dans une étude portant sur 9 105 patients hospitalisés, les prestataires de soins de santé étaient significativement plus susceptibles de refuser des traitements de maintien de vie aux patients plus âgés qu’aux plus jeunes.

Exclusion des essais cliniques

Des études ont montré que les personnes âgées étaient régulièrement exclues des essais en cardiologie, neurologie, néphrologie (rein), psychiatrie, rhumatologie… et même en médecine préventive. Par exemple, les chercheurs ont découvert que 49% des essais cliniques sur la maladie de Parkinson excluaient les personnes âgées, qui sont pourtant les plus touchées par cette maladie.

Diminution de la valeur de la vie des personnes plus âgées

Une étude japonaise a montré que les participants étaient beaucoup plus susceptibles de sacrifier des piétons âgés que des piétons plus jeunes.

Opportunités de travail limitées

L’âgisme dans le milieu de travail est la cause de nombreux problèmes de santé, telle qu’une augmentation des symptômes dépressifs, et une augmentation du taux de maladies de longue durée

Les sept autres conséquences de l’âgisme sont individuelles :

Diminution de la longévité

Des chercheurs ont constaté que les personnes âgées avec une perception négative du vieillissement avaient une longévité significativement plus courte que les autres.

Mauvaise qualité de vie

Une étude a montré une détérioration progressive de la qualité de vie des femmes turques socio-économiquement défavorisées. Avec l’âge, leurs conditions de vie se dégradaient.

Comportements à risque pour la santé

Une perception négative du vieillissement engendre souvent une consommation excessive d’alcool, une dégradation de la qualité de l’alimentation, le non-respect de la prise de médicaments, et une croissance du tabagisme. Par exemple, une étude réalisée sur un échantillon de 6 576 personnes âgées irlandaises a révélé que la perception négative du vieillissement entraînait un risque accru de consommation nocive d’alcool et de tabac.

Relations sociales compromises

L’âgisme se traduit ici par un plus faible soutien social, un plus faible engagement social, mais également par un isolement social beaucoup plus profond.

Maladies physiques

Les études ont montré que l’âgisme pouvait être lié à des maladies chroniques et des hospitalisations. Par exemple, les personnes âgées avec une perception négative de leur âge avaient 31 % moins de chance de se remettre d’une invalidité grave.

Maladies mentales

Dans le cas des maladies mentales, l’âgisme est souvent la cause de dépression. À l’inverse, les personnes âgées qui ne souffrent pas de cette discrimination sont moins susceptibles d’avoir des pensées suicidaires, de souffrir d’anxiété ou de syndromes de stress post-traumatique.

Déficience cognitive

Enfin, les stéréotypes négatifs sur l’âge peuvent aussi être la cause d’une détérioration de la mémoire chez certaines personnes âgées.

Sensibiliser pour améliorer la santé de nos aînés

Ces données suggèrent qu’une meilleure sensibilisation à la discrimination pourrait considérablement atténuer certains effets négatifs de l’âgisme sur la santé. Cela passe notamment par une amélioration de l’éducation des prestataires de soins.

D’autant que de tels efforts pourraient également entraîner des économies de coûts des soins de santé. En stoppant les discriminations, on réduit en effet les risques pour la santé de nos aînés et par conséquent, ceux-ci seront moins susceptibles d’être hospitalisés ou de suivre des traitements. Bref, un effet boule de neige positif qu’il faut encourager…

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