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« Il n’y a aucun argument rationnel à nouer une relation »

Han Renard

« Actuellement, on peut être beaucoup plus libre au sein d’une relation qu’autrefois, mais l’individualisation est en contradiction flagrante avec le relationnel », explique le psychologue Paul Verhaeghe à nos confrères de Knack.

« À l’avenir, ce seront les hommes qui occuperont une position inférieure », estime le psychologue clinique et psychanalyste Paul Verhaeghe. « L’image traditionnelle du juriste ou médecin masculin marié à une secrétaire, ou à une infirmière disparaît et sera même inversée. Il y aura de plus en plus de couples où l’épouse est hautement qualifiée et où l’homme possède un diplôme d’un niveau moins élevé. Le signe avant-coureur se voit déjà dans l’enseignement supérieur : 60% des étudiants sont des filles. Dans l’avenir très proche, l’écart de formation entre les hommes et les femmes se creusera encore. Non seulement, il y a plus de filles que de garçons qui s’inscrivent dans l’enseignement supérieur, mais les étudiantes obtiennent de meilleurs résultats et terminent leurs études plus rapidement. Entre-temps, les garçons ont de plus en plus de mal à décrocher leur diplôme.

À l’heure actuelle, deux mariages sur trois se terminent par un divorce, alors que le nombre de célibataires ne fait qu’augmenter. Cette évolution est-elle due à la disparition du schéma de rôles traditionnel ?

Paul Verhaeghe: Ce n’est qu’un facteur parmi d’autres. Nous vivons plus longtemps, nous restons plus longtemps en bonne santé, et nous sommes beaucoup plus mobiles, notamment à cause d’internet. En outre, l’individualisation croissante de la société exerce beaucoup d’influence sur les relations. Les couples pratiquent beaucoup d’activités séparément, chacun avec leurs propres amis. À l’heure actuelle, on peut être nettement plus libre à l’intérieur d’une relation, mais on en paie le prix : l’individualisation est en contradiction flagrante avec le relationnel.

Dans votre livre intitulé « Liefde in tijden van eenzaamheid » (L’amour au temps de la solitude) vous écrivez qu’un homme désire surtout être bon au lit alors que pour une femme le sexe est principalement une façon d’entamer une relation ou de la faire durer. Ce n’est donc pas étonnant qu’autant de relations échouent ?

« À l’heure actuelle, une relation n’est plus une condition pour mener une vie érotique et sexuelle. Autrefois, c’était différent : il fallait être marié ou avoir au moins une relation fixe. Entre-temps, cette association s’est relâchée et une relation peut être basée sur d’autres fondements que la sexualité. Sur l’amour par exemple. Et les gens peuvent également vivre leur sexualité en dehors de leur relation. Biologiquement, l’humain n’est pas monogame, mais malgré tout, la plupart d’entre nous attendent l’exclusivité de leur partenaire. On assiste à une nouvelle forme d’ambiguïté : aujourd’hui les gens entretiennent souvent plus d’une relation en même temps alors qu’ils ne peuvent supporter que leur partenaire fasse de même.

Sur les sites de rencontres, on peut chercher un partenaire sur base du physique, de la formation, de l’âge et des hobbys. Est-ce la meilleure méthode pour trouver quelqu’un qui vous corresponde ?

Cela reste toujours un choix rationnel : on coche les caractéristiques qu’on trouve importantes. De telles considérations fonctionnent parfaitement pour acheter une tondeuse à gazon, mais pas pour trouver un partenaire amoureux, car il s’agit d’un choix émotionnel qui est d’abord intuitif. Rationnellement, le meilleur choix est d’ailleurs de rester seul.

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