© Thinkstock

Faut-il avoir peur de la pilule contraceptive de 3e génération ?

Devenue gravement handicapée, une utilisatrice du contraceptif dit de troisième génération vient de porter plainte. Il n’est pas sans danger, confirme Pascale This, gynécologue.

Depuis ce dépôt de plainte, vous pose-t-on plus de questions?
Cela fait un certain temps déjà que les femmes se disent inquiètes des risques éventuels de ces pilules. Jusqu’à présent, je ne leur remettais pas de fiche d’information recensant tous les effets secondaires car je ne voulais pas les angoisser. Désormais, je vais peut-être le faire.

Les femmes qui prennent ces pilules de troisième génération doivent-elles arrêter?

Toutes les pilules comportent, par elles-mêmes, un double risque, faible mais réel, artériel et veineux. Le premier peut entraîner phlébite ou embolie pulmonaire; le second, accident vasculaire cérébral (AVC) et infarctus du myocarde. Bien que rares, ces cas s’avèrent néanmoins plus importants avec les « nouvelles » pilules. Dans le domaine artériel, par exemple, le risque passe de 2 à 4 accidents par an pour 10 000 utilisatrices. Cela semble peu, mais les conséquences sont parfois gravissimes.

Si elles sont plus dangereuses, pourquoi représentent-elles la moitié des prescriptions aujourd’hui?

Parce qu’elles semblent mieux tolérées – c’est en tous cas ce que disent certaines patientes. Par ailleurs, leur composition est un peu différente: le progestatif utilisé étant plus puissant, certains laboratoires pharmaceutiques en ont fait un argument marketing en affirmant qu’elles avaient un effet « anti-androgénique » certain et, donc, que les effets secondaires (acné, prise de poids….) seraient plus rares qu’avec les pilules de deuxième génération. Pour autant, je suis surprise de voir débarquer dans mon cabinet autant de jeunes femmes avec une contraception de ce type. Elle est chère – environ 10 euros par mois – et, surtout, la Haute autorité de santé (HAS) a constaté dès 2010 que ces pilules n’apportaient pas, en réalité, de bénéfice supplémentaire. Elle recommandait donc de ne pas les prescrire en première intention. Elles seront d’ailleurs déremboursées à partir d’octobre prochain.

Dans ces conditions, pourquoi les médecins ne proposent-ils pas plus souvent un stérilet?

Certes, la communauté scientifique admet aujourd’hui que l’on peut poser un « dipositif intra-utérin » (le nom médical du stérilet) sur une femme qui n’a pas encore eu d’enfants. Toutefois, chez les jeunes filles sans partenaire stable, les risques d’infection sont plus élevés, et le seuil d’intolérance à la douleur plus faible. Or, il n’est pas facile de poser un stérilet, même après trente ans d’expérience. Sans parler des risques judiciaires en cas de perforation utérine.

Les implants sous la peau sont-ils efficaces?

Ils méritent d’être envisagés, à condition d’être bien supportés, ce qui n’est pas toujours le cas. Par ailleurs, les médecins avaient parfois du mal à poser et plus encore à enlever les premiers implants. Depuis, la situation s’est améliorée.

Quel serait alors le meilleur choix de contraception pour une femme?

Tout est affaire de situation individuelle, d’histoire personnelle. Les unes (de 30 à 40%) aimeraient conserver leurs règles, les autres (30%) surtout pas. Certaines refusent absolument tout élément étranger dans leur corps, d’autres s’en accommodent sans difficulté. Une consultation gynécologique ne se limite pas à un simple renouvellement d’ordonnance : quel que soit l’âge de la patiente, et c’est encore plus vrai chez une adolescente, il faut prendre son temps, en profiter pour discuter des alternatives existantes. En pratique, certains médecins prescrivent peut-être un peu vite. Je tombe des nues quand je vois, comme c’est arrivé récemment, une patiente de 42 ans, sans désir d’enfant et encore sous pilule, alors qu’elle pourrait porter un stérilet.

Vincent Olivier, L’Express.fr

Vous avez repéré une erreur ou disposez de plus d’infos? Signalez-le ici

Contenu partenaire