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Cancer de la peau : il ne faut pas faire attention qu’aux taches bizarres

Près de 90 % des cas de cancer de la peau sont principalement des carcinomes, et non des mélanomes. Comment les reconnaître, et quel cancer de la peau est le plus dangereux ?

Le cancer de la peau est le cancer le plus fréquent en Belgique puisqu’il concerne 40 % des diagnostics de cancer. Chaque année, la Belgique compte environ 44 000 nouveaux cas. En moyenne, un Belge sur cinq est atteint d’un cancer de la peau avant l’âge de 75 ans. La Fondation contre le cancer prévoit que, d’ici 2030, il n’y aura pas moins de 77 000 nouveaux cas annuels de cancer de la peau et parle d’un « tsunami ». Heureusement, le nombre de décès n’augmente pas de manière aussi spectaculaire que le nombre de cancers de la peau.

Contrairement à ce que l’on pourrait penser, ce n’est pas le grain de beauté qui change de forme (soit le mélanome) qui est la forme la plus courante de cancer de la peau. Le carcinome est beaucoup moins connu que le mélanome, pourtant, pas moins de 70 % des cancers de la peau sont des carcinomes basocellulaires. « Heureusement, ce type de cancer n’est pas dangereux », déclare le Dr Thomas Maselis, dermatologue, fondateur et président d’Euromelanoma Belgium, le réseau des dermatologues européens. L’avantage de ce cancer est qu’il ne présente pratiquement aucun risque de métastases. Le carcinome spinocellulaire, qui représente environ 20 % des cancers de la peau, est lui un peu plus vicieux et peut donner lieu à des métastases lorsqu’il est traité trop tard.

En ce qui concerne les mélanomes, ce sont des cellules productrices de pigment qui donnent la couleur à la peau qui deviennent cancéreuses. Les symptômes possibles sont une nouvelle excroissance anormale ou le changement d’un grain de beauté existant. Si ces cellules pigmentaires dégénèrent, elles deviennent très rapidement des tumeurs métastatiques, qui peuvent pénétrer ailleurs dans l’organisme ». Les mélanomes ne représentent que 10 % des cancers de la peau, mais sont responsables de 90 % des décès par cancer de la peau. C’est pourquoi, ces dernières années, les différentes campagnes de sensibilisation ont plus particulièrement ciblé les mélanomes. Mais cela ne doit pas faire oublier les autres cancers de la peau.

Une maladie professionnelle oubliée

Le 13 juin, à l’occasion de la Journée mondiale de lutte contre le cancer de la peau, la campagne « Check Your H » est lancée en Belgique pour attirer l’attention sur l’importance de la protection et du contrôle de la peau en général, et en particulier de la zone H (yeux, oreilles, nez et région nasolabiale) du visage. C’est la zone qui est exposée aux rayons UV toute l’année.

Cancer de la peau : il ne faut pas faire attention qu'aux taches bizarres
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Les recherches montrent que le risque de cancer de la peau (sans mélanome) touche de manière disproportionnée les travailleurs en extérieur, tels que les employés de l’hôtellerie sur les terrasses, les postiers, les jardiniers, les balayeurs de rue, les agriculteurs, les ouvriers du bâtiment, les marins et les policiers dans la rue.

Les travailleurs qui travaillent à l’extérieur pendant cinq ans ont un risque trois fois plus élevé de souffrir d’un cancer de la peau. Le cancer de la peau non mélanique est donc l’une des maladies professionnelles les plus courantes en Europe. Les mesures anti-covid qui encouragent le travail en plein air n’améliorent pas la situation.

Covid-19

Le cancer non mélanique est heureusement l’un des cancers de la peau les plus faciles à traiter, à condition qu’il soit détecté à temps. Un diagnostic précoce est essentiel », souligne l’oncologue médicale Vibeke Kruse. S’il est pris suffisamment tôt, la lésion peut être enlevée chirurgicalement pour éviter tout problème à l’avenir. Si vous attendez trop longtemps, il y a un risque de métastases. Ce sont ces patients-là qui finissent chez les oncologues. Heureusement, en pratique, nous ne voyons presque jamais de carcinomes basocellulaires. Les patients atteints de carcinome spinocellulaire sont également rares, mais répondent généralement bien à l’immunothérapie. Ce que nous, les oncologues, voyons les plus souvent ce sont les mélanomes, car ils ont tendance à se propager rapidement aux ganglions lymphatiques et au reste des organes. Même un mélanome de moins d’un millimètre présente un risque de métastases. Heureusement l’immunothérapie fonctionne bien, ce qui permet de traiter ce cancer beaucoup mieux qu’auparavant ».

M. Kruse constate actuellement des cancers plus graves que d’habitude. Une chose également constatée par la Fondation contre le cancer. C’est l’un des impacts du covid. Au début de cette année, on a diagnostiqué 40 % de cancers de la peau en moins parce que les gens ne pouvaient ou ne voulaient pas venir pour une consultation. Maintenant que la pression est un peu retombée, un processus de rattrapage s’amorce et le nombre de cas devrait augmenter fortement au cours du second semestre.

Ce qu’il faut surveiller.

Le meilleur traitement est : éviter de créer des tumeurs. Il est donc extrêmement important de vérifier régulièrement l’évolution de votre peau et, en cas de doute, de consulter votre médecin traitant », souligne M. Maselis. Un dépistage annuel du cancer de la peau au niveau de la population, comme cela a déjà été fait pour le cancer du sein et du côlon, n’est pas réalisable et a peu de sens. Par contre, les personnes qui ont déjà eu un cancer de la peau, ou celles qui présentent un risque accru, devraient se faire contrôler chaque année.

Un autocontrôle est toujours possible, encore faut-il savoir ce que l’on cherche. Les carcinomes cutanés sont effectivement plus difficiles à détecter soi-même que les mélanomes. Alors, à quoi doit-on faire attention ? Maselis : « Les carcinomes basocellulaires apparaissent principalement sur les parties du corps qui ont été brûlées. On les reconnaît à une tache rouge, transparente ou nacrée ou à une plaie qui ne guérit pas spontanément. Cela devrait toujours déclencher une sonnette d’alarme. Le carcinome spinocellulaire se trouve souvent sur des parties du corps chroniquement exposées au soleil, comme les bords de l’oreille, du nez, du front ou sur un crâne chauve. Ce sont des taches rouges avec une desquamation qui s’épaississent progressivement avec l’augmentation de la desquamation. En ce qui concerne les taches pigmentaires, nous connaissons maintenant la règle ABCDE. Il s’agit d’une forme asymétrique (« asymétrie »), d’un bord irrégulier (« bordure »), de couleurs différentes (« couleur »), d’un diamètre supérieur à six millimètres (« diamètre ») et d’une certaine croissance de la tache (« évolution »). Si votre tache pigmentaire présente de tels signes, vous devez prendre rendez-vous avec un médecin.

Protégez votre peau grâce à ces 3 étapes essentielles :

  • Chercher l’ombre : travaillez à l’ombre autant que possible et évitez les expositions prolongées au soleil.
  • Vêtements de protection : portez des vêtements qui couvrent votre corps autant que possible. Et n’oubliez pas votre tête !
  • Crème solaire : appliquez une bonne couche de crème solaire facteur 50+ toutes les 2 heures sur les zones exposées.
  • Au moins trois quarts des cancers de la peau peuvent être évités grâce à une prévention adéquate.
  • Marcher sans protection au soleil pour obtenir plus de vitamine D ? C’est absurde ! Ne faites pas ça.

Il existe trois niveaux de protection. Tout d’abord, recherchez l’ombre, surtout à la mi-journée, même si cela n’est pas toujours évident pour les couvreurs, par exemple. Ensuite, portez de préférence des vêtements sombres qui couvrent le corps autant que possible, un chapeau à large bord plutôt qu’une casquette et des lunettes de soleil. Et troisièmement, tartinez de la crème autant que possible. Les crèmes solaires, de préférence avec un facteur élevé, protègent bien, mais vous devez les appliquer très fréquemment, toutes les 2 heures, en couche suffisamment épaisse. Les filtres qui absorbent ou reflètent la lumière sont très bons et sûrs, mais ils s’effacent facilement lorsque vous transpirez ou entrez dans l’eau. Les filtres chimiques pénètrent l’épiderme et absorbent les rayons UV. Ils sont souvent étanches à l’eau et à la sueur. Il est également important que la protection UVA soit indiquée sur l’écran solaire. La protection solaire est particulièrement essentielle au printemps, d’autant plus que nos propres défenses contre le soleil, comprendre notre bronzage, ne sont pas encore à la hauteur.

Bien protéger les enfants, pour éviter des cancers dans le futur

Selon M. Maselis, les causes les plus importantes de l’augmentation du nombre de cancers de la peau sont le succès des bancs solaires et le tourisme de masse. C’est de moins en moins cher de voyager vers le sud. Les gens partent en été avec leurs jeunes enfants pour deux à trois semaines de soleil. On met un peu de crème le matin, mais ils ont souvent des coups de soleil en fin de journée. C’est la base pour un cancer de la peau dans le futur ».

Et que dire de cette tendance qui pousse les gens à délibérément se protéger moins afin d’absorber plus de vitamine D ? « La vitamine D, qui est produite par la peau à partir de la lumière UV, est en effet importante. C’est pourquoi je ne suis pas une grande adepte des crèmes de jour avec un facteur solaire en hiver. Il ne faut pas en faire trop. En hiver, l’indice UV est inférieur à 3. C’est relativement sans danger. Ce n’est qu’à partir d’un indice UV de 3 qu’il est préférable de commencer à utiliser une crème solaire. Ces derniers jours, l’indice UV était supérieur à 7, alors que notre peau est encore très pâle. C’est pourquoi le printemps et le début de l’été sont la période la plus dangereuse en Belgique. Il est tout à fait possible de prendre de la vitamine D via des suppléments. Mais certains médecins ne pensent pas que cela soit nécessaire et conseillent à leurs patients de marcher en plein soleil sans protection. C’est absurde ! Ne faites pas ça, surtout pas en été », conclut le docteur Maselis.

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