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Bière ou vin, lequel est le plus sain ?

Si le vin se voit de longue date attribuer une foule d’effets salutaires, on vante aussi de plus en plus les vertus de la bière. À tort ou à raison ?

Un verre de vin rouge quotidien aurait des effets bénéfiques sur la santé, en abaissant la tension et le cholestérol tout en boostant l’immunité. Une consommation modérée protégerait par ailleurs contre le diabète et certains cancers… et il se trouve même des chercheurs pour affirmer qu’un petit verre journalier stimulerait l’intelligence. Les amateurs de bonnes bouteilles ne risquent manifestement pas de tomber à court d’arguments !

Depuis quelque temps, la bière tant appréciée de nos compatriotes peut toutefois elle aussi se prévaloir d’allégations de santé de toutes sortes. Il suffit ainsi d’introduire les termes  » bière  » et  » santé  » dans un moteur de recherche pour obtenir une ribambelle de références vantant les vertus de la boisson favorite des Belges, qui passe pour contenir une foule de minéraux utiles et de substances susceptibles d’alléger les symptômes de la ménopause et de prévenir l’ostéoporose. On lui attribue également des vertus digestives, sans compter qu’il s’agit d’une excellente source de vitamine B… et que le houblon qu’elle contient est à la fois calmant et antioxydant.

Trop beau pour être vrai ? Force est en tout cas de constater que les allégations de santé qui circulent à propos du vin et de la bière ne reposent pas toujours sur des données scientifiques rigoureuses… sans compter que de nouvelles découvertes viennent parfois jeter un éclairage nouveau sur les opinions dominantes du moment. Qu’en est-il donc vraiment des bénéfices de santé de notre bonne vieille cervoise et comment distinguer mythes et réalité ?

Mythe n°1 : le vin est plus sain que la bière

 » C’est surtout dans les années 90 que les effets-santé d’une consommation modérée de vin ont été beaucoup étudiés, généralement à l’instigation et avec le soutien des viticulteurs français, explique Patrick Mullie, expert en sciences alimentaires à la haute école Erasmus (Bruxelles). Les chercheurs, souvent rattachés à des ‘instituts vinicoles’, sont tous parvenus aux mêmes conclusions : les personnes buvant régulièrement un verre de vin rouge étaient en meilleure santé et vivaient plus longtemps. De là à postuler un lien de cause à effet, il n’y avait qu’un pas qu’ils se sont évidemment empressés de franchir en invoquant les vertus salutaires d’une série de substances (flavonoïdes et polyphénols en tête) exerçant d’après eux une action antioxydante et un effet protecteur contre les maladies cardiovasculaires.  »

Cette idée n’a été remise en question qu’après le tournant du millénaire, lorsqu’il est apparu que le bénéfice de santé découlait moins du vin lui-même que du comportement des personnes qui en boivent.  » Les amateurs de vin ont globalement un mode de vie plus équilibré que les buveurs de bière : ils mangent plus sainement, ne fument pas, font régulièrement du sport… et débouchent de temps en temps une bonne bouteille, résume Patrick Mullie. C’est évidemment un profil tout différent de celui du buveur de bière qui, le samedi soir, enchaîne les chopes vautré dans son fauteuil en se gavant de frites avec une double dose de mayonnaise – un stéréotype, certes, mais qui repose tout de même sur un fond de vérité. S’il y a une différence entre le vin et la bière, elle ne réside donc pas dans la boisson elle-même mais dans le comportement des consommateurs. Pour le reste, les deux se valent !  »

Mythe n°2 : consommé avec modération, l’alcool est bon pour la santé

La bière n’est certes pas plus mauvaise que le vin, mais ce n’est pas une raison pour en boire tous les jours en invoquant ses prétendues vertus ! De nouvelles données remettent en effet en question les bénéfices sur la santé d’une consommation modérée (un verre chez la femme, deux chez l’homme), alors qu’on lui a longtemps attribué des vertus pour la santé et en particulier un effet bénéfique sur le risque cardiovasculaire par le biais d’une augmentation du  » bon cholestérol  » (HDL). La mortalité augmentait par contre au-delà de deux verres par jour sous l’effet du risque accru de maladies hépatiques et de certains cancers.  » Cette limite ‘sûre’ n’a pas bougé, mais des recherches récentes révèlent que, contrairement à ce que l’on pensait jusqu’ici, l’effet sur la santé est le même, que la consommation soit de zéro, un ou deux verres par jour. Une consommation modérée ne fait donc pas de tort, mais pas de bien non plus : en termes de santé, peu importe que vous buviez peu ou pas du tout. Les détracteurs de l’alcool invoquent cet argument pour préconiser l’abstinence, ses partisans recommandent plutôt de s’en tenir à un ou deux verres – juste pour le plaisir, pas pour la santé. Rien ne justifie donc de pousser à boire quelqu’un qui ne le souhaite pas, ni de priver un amateur de son petit verre quotidien, pour autant qu’il adopte par ailleurs un mode de vie sain.  »

L’effet sur la santé est le même, que la consommation soit de zéro, un ou deux verres par jour.

Mythe n°3 : la bière contient des ingrédients bénéfiques pour la santé

La bière est un produit naturel sans conservateurs qui contient du malt, du houblon, des levures et de l’eau – des ingrédients  » sains « , certes… mais auxquels on attribue des vertus de santé pas forcément démontrées.  » Ces allégations ont généralement un fond de vérité, mais complètement sorti de son contexte, explique Patrick Mullie. Prenez la vitamine B1, que l’on retrouve effectivement dans la bière. Avec un peu d’imagination, on peut broder à partir de là toute une histoire en expliquant, par exemple, que cette vitamine convertit les glucides en énergie et améliore les prestations physiques, ce qui fait de la bière une boisson sportive – un message qui ne tient évidemment pas la route ! Nombre d’allégations ne sont pas scientifiques parce que, même si elles reposent parfois sur des résultats d’études, ceux-ci ne démontrent aucun effet à long terme ou font l’objet de généralisations grossières. Certaines s’appuient même sur de simples associations du style ‘l’eau est une boisson saine, la bière contient de l’eau, la bière est donc une boisson saine’.  »

Pour conclure

Mieux vaudrait sans doute que l’industrie de la bière cesse de chercher des atouts-santé à ses produits.  » Des années d’efforts en ce sens n’ont guère livré de résultats concluants et je crains donc que le lien entre bière et santé ne reste particulièrement ténu, insiste Patrick Mullie. Pourquoi ne pas tenter une autre approche et investir dans l’image de cette boisson pour la placer sur un pied d’égalité avec le vin ? La perception des deux produits demeure en effet très différente : alors que la bière reste synonyme de cafés populaires, de matches de foot et de machos tapageurs, un vin même bas-de-gamme a une image plus raffinée, plus élégante. Et pourquoi ne pas souligner qu’une bonne bière accompagne tout aussi bien un repas qu’un verre de vin et que ce choix n’est finalement qu’une question de préférence personnelle ?  »

Par Carine Stevens

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