La commune de Bruxelles-Ville, ici la Grand Place, est au coeur d'un imbroglio territorial depuis des années. Deux députés MR veulent faire bouger les choses. © Istock

Redécouper les communes de Bruxelles ? Le MR relance le débat

Stagiaire Le Vif

Compliquée. Alambiquée. Désordonnée. Les adjectifs ne manquent pas pour décrire l’organisation de Bruxelles-Capitale. Deux députés MR ont décidé de prendre le taureau par les cornes en proposant de (ré)ouvrir le débat sur les frontières entre les 19 communes, dont certaines relèvent d’une incohérence totale. Une histoire  » bien belge » mais qui mérite réflexion.

Trop compliquée, Bruxelles ? Entre ses 4 pouvoirs exécutifs, ses 19 CPAS, ses 6 zones de police et tous les niveaux de pouvoir (communautaire, fédéral, européen) qui s’y entremêlent, le débat ne date pas d’hier. Un temps mis au placard, il a retrouvé cette semaine un nouveau souffle grâce à deux députés MR. Le premier, Gautier Calomne, 35 ans, siège au parlement fédéral. Le deuxième, Boris Dilliès, 42 ans, est membre effectif du parlement bruxellois. Tous deux ont fait parvenir au journal Le Soir une « carte blanche » où ils pointent du doigt l’organisation territoriale de la région bruxelloise, caractérisée par un enchevêtrement de frontières communales qu’ils jugent trop compliqué et source de tracas administratifs pour ses résidents.

Gautier Calomne (MR).
Gautier Calomne (MR).© DR

Loin de vouloir semer eux-mêmes le trouble, les députés déclarent vouloir relancer un « débat positif » « Ce projet de carte est né d’une double réflexion, déclare Gautier Calomne, également engagé à Ixelles. La première est un constat de terrain, réalisé sur base de témoignages et d’une inspection. Nous avons remarqué combien les problèmes entre communes sont nombreux dans la région. Il existe parfois un grand manque de cohérence dans leurs séparations et cela crée de la confusion chez certains habitants. »

Un constat motivé par un débat mené en interne sur la manière de « gérer Bruxelles autrement ». « Avec mon collègue Boris Dilliès (député d’Uccle), nous faisons partie de la jeune génération politique (les deux hommes sont parmi les plus jeunes à siéger au sein de leurs institutions respectives, ndlr.), continue M. Calomne. Cela nous pousse à vouloir prendre nos responsabilités, à montrer à certains niveaux de pouvoir extérieurs que nous pouvons prendre des décisions pour l’avenir de notre ville. »

Des problèmes concrets

Boris Dilliès (MR).
Boris Dilliès (MR).© DR

Parmi les incohérences frontalières existantes, la répartition géographique de la commune de Bruxelles -Ville est source de plusieurs bizarreries. « A la Belge » ricaneront certains. Par exemple, la situation des quartiers de Haren et Laeken, qui dépendent sur le papier du centre-ville, dont ils sont pourtant assez éloignés vers le nord ; « Il y aurait une certaine logique à ce que ces quartiers dépendent respectivement des communes d’Evere ou Jette, qui sont beaucoup plus proches », commente le député Calomne. L’objectif : soulager en partie les déplacements administratifs des riverains, dont la maison communale se trouve dans le centre, à plus d’une demi-heure de trajet. Et s’il existe bien des antennes locales, compétentes uniquement dans certains domaines, M. Calomne déplore, outre l’éloignement avec les instances communales, « une absence d’une police de proximité ainsi que des impôts en faveur de la ville de Bruxelles sans pouvoir bénéficier pleinement de ses infrastructures. »

Autre cas de figure pour le moins inédit ; l’avenue Louise. Située sur le territoire de Bruxelles-Ville depuis le règne du roi Léoplod II fin du 19e siècle, elle coupe de tout son long la commune voisine d’Ixelles. « J’ai fait quelques recherches et je ne pense pas qu’il existe d’autres cas aussi flagrants en Belgique », commente Gautier Calomne. En fonction d’où l’on se trouve d’un côté où de l’autre de l’avenue, les riverains peuvent être confrontés à des politiques fiscales, de stationnement, de propreté complètement différentes. » Citons encore l’exemple du parc du Cinquantenaire, à proximité des instances européennes, en majorité dépendant de Bruxelles sauf une petite partie triangulaire, qui se trouve sur Etterbeek.

« Réorganiser plutôt que fusionner »

Dés la publication de leur projet commun, les députés Calomne et Dilliès ont dû répondre aux inquiétudes de certains Bruxellois, soucieux de voir émerger une fusion des communes. « Ce n’est pas notre intention, rétorque Gautier Calomne. Il s’agit avant tout d’une volonté de réorganiser certaines frontières, de manière à ce qu’un maximum de monde en ressorte gagnant, politiques comme citoyens. C’est une réflexion positive, et cela peut nécessiter une consultation populaire. Nous ne voulons pas provoquer de ‘Big Bang’ politique !

Une idée de longue date

Comme précisé en début d’article, l’idée d’une refonte de la géographie des communes n’est pas tout à fait neuve. Déjà en 2009, la législature dirigée par le socialiste Charles Picqué (2009-2014) avait tablé sur la création d’un groupe de travail pour examiner une meilleure répartition des compétences entre le gouvernement régional et les communes, de même qu’un plan territorial remis à neuf.

L’initiative d’aujourd’hui ressemble davantage à un sondage des parties sur le sujet qu’à une proposition concrète à moyen terme. Quoi qu’il en soit, messieurs Calomne et Dilliès n’ont pas reçu que des marques de soutien. Yvan Mayeur s’est ainsi montré pour le moins circonspect, déclarant au Soir ; « pourquoi vouloir démanteler ce qui fonctionne ? Il faut arrête de jalouser la ville mais s’inspirer de ce qu’elle fait ! » En bon bourgmestre de Bruxelles-Ville qu’il est, M. Mayeur a précisé être ouvert à un débat sur la question mais qui se limiterait à sa seule circonscription.

Exit donc les dysfonctionnements mis à jour par les deux députés MR, qui ne seraient rien de plus que des « détails anecdotiques ».

Guillaume Alvarez

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