Parmi les bourreaux de Valentin, deux ont été diagnostiqués psychopathes. Des récidivistes en puissance ? © ERIC LALMAND/BELGAIMAGE

Valentin tout seul

Que retenir, quelles leçons tirer des affaires Valentin, Dutroux ou Nemmouche qui, cette année encore, ont rappelé que des psychopathes dangereux sont parmi nous ?

Durant le procès d’assises des cinq bourreaux de Valentin Vermeesch, il a fallu avoir le coeur solide pour écouter l’énumération des sévices infligés au jeune déficient mental : Valentin, 18 ans, a été battu, torturé, drogué, brûlé à la cigarette, arrosé d’essence, humilié et violé dans un appartement de Statte, tout près de Huy, et finalement précipité menotté dans la Meuse. Son calvaire a duré des heures. C’était le soir du 26 mars 2017. Son corps a été retrouvé trois semaines plus tard. Ses assassins étaient jeunes, eux aussi, autour de la vingtaine. Le procès de l’horreur qui s’est tenu à Liège, au printemps, s’est terminé par le prononcé de très lourdes peines.

Le meneur, Alexandre Hart, a écopé de la perpétuité avec une mise à disposition du tribunal d’application des peines de 15 ans, qui constitue une peine complémentaire lorsque la peine principale arrive à échéance. Idem pour son âme damnée, Belinda Donnay, mais sans mise à disposition. Killian Wilmet, mineur au moment des faits, a été condamné à 29 ans, avec mise à disposition de 15 ans. De telles peines pour des condamnés aussi jeunes, c’est du jamais-vu en Belgique. Elles sont même plus lourdes que celles infligées aux protagonistes de l’affaire qui a marqué les esprits au fer rouge, au-delà même de nos frontières, dans les années 1990. L’affaire Dutroux.

En effet, le  » monstre de Marcinelle  » a été condamné, en 2004, à la perpétuité avec une mise à disposition de 10 ans. Ce délai maximum a été porté à 15 ans en 2012, par une nouvelle loi (sans effet rétroactif sur les condamnations déjà prononcées), au moment où Michelle Martin a été libérée sous conditions. L’ex-femme et principale complice de Dutroux avait, contrairement à Belinda, échappé à la perpétuité et écopé de 30 ans. Michel Lelièvre, condamné pour sa complicité dans l’enlèvement de Sabine, Laetitia, An et Eefje (la justice n’a pas reconnu sa responsabilité dans le rapt de Julie et Mélissa) s’était vu infliger 25 ans de prison. En septembre, celui que les experts psychiatres avaient qualifié de  » petit psychopathe  » a obtenu, deux ans avant le terme, sa libération conditionnelle.

En équilibre précaire

Tant dans l’affaire Dutroux que celle de Valentin, plusieurs des condamnés ont été diagnostiqués comme ayant une personnalité psychopathique, c’est-à-dire caractérisée par le sadisme, la froideur émotionnelle, un narcissisme extrême, une faculté de manipulation et un manque total d’empathie. Pour les psychopathes les plus sévères, qualifiés de  » primaires  » par les experts, on sait que ces traits de personnalité sont irréversibles, en tout cas une fois atteint l’âge adulte. Des expériences sont menées pour apprendre aux psychopathes, mêmes primaires, à satisfaire leurs besoins sans commettre d’infraction, donc sans récidiver, mais elles offrent encore peu de résultats.

Or, les psychopathes sont considérés comme pénalement responsables de leurs actes, qu’ils ne commettent pas sur un coup de folie mais souvent de manière préméditée. C’est le cas de Mehdi Nemmouche, l’auteur de l’attentat du Musée juif de Belgique à Bruxelles (quatre morts), condamné, en mars, à la perpétuité, avec mise à disposition de 15 ans. Ce  » psychopathe « , tel que qualifié par l’avocat général, a minutieusement préparé son forfait. Cela pose un problème cornélien : puisqu’ils dépendent de la procédure pénale, ces  » irrécupérables  » ont, comme Dutroux actuellement, la possibilité de demander une libération conditionnelle, au bout d’un certain délai, même fort long. Paradoxe ? Hypocrisie du système ?

A moins de rétablir les peines incompressibles et donc la perpétuité réelle – ce qui, selon la Cour européenne de Strasbourg, est contraire aux droits de l’homme -, il faudra bien un jour que la Belgique, comme ses voisins européens d’ailleurs, imagine un statut particulier et une forme d’incarcération originale pour ces assassins-là, pour ne plus être en équilibre précaire entre l’inévitable respect des droits de l’homme et l’incontournable pression de l’opinion.

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