Une place pour les Roms

Le débat sur la question des roms est loin d’être clos, quand bien même l’emballement politico-médiatique s’est apaisé. La question, du reste, mérite d’être traitée avec plus de sérénité que ce qu’en ont donné à voir plusieurs responsables européens ces dernières semaines dans la foulée de la nouvelle  » politique  » mise en £uvre depuis cet été en France.

En l’occurrence, il faut garder une certaine mesure. Les Gitans, les Tziganes, les Manouches… ne sont  » que  » 10 millions sur les 500 millions de citoyens de l’Union européenne. Et ils ne représentent une minorité importante (plus de 500 000 personnes) que dans 7 de ses 27 Etats membres. Le traitement de la question rom n’en est pas moins fondamental en ce qu’il touche à des principes fondateurs de l’Union, le respect des droits de l’homme ou l’égalité des citoyens.

A cette aune, la politique de la France a scandalisé par sa rhétorique, stigmatisant comme délinquants présumés tous les gens du voyage disposant de  » grosses cylindrées  » ou invitant les autorités à démanteler parmi les campements illicites,  » en priorité ceux des Roms « . Elle pose aussi question sur son  » efficacité  » quand, citoyens européens à part entière, les Roms de Roumanie et de Bulgarie, une fois expulsés, ont tout le loisir de se réinstaller pour trois mois au moins, et davantage s’ils peuvent justifier de moyens de subsistance. Cette indignation et ce questionnement n’entament cependant en rien la légitimité d’un Etat à prendre les mesures qu’il juge nécessaires, dans le respect du droit (c’est le rôle de la Commission européenne de le vérifier), pour assurer la sécurité de ses concitoyens, qui est aussi un droit de l’homme. Néanmoins, les décisions des Sarkozy, Hortefeux et autres Besson, les chantres de l’identité nationale, relèvent-elles de la gestion ordinaire d’un problème potentiel d’insécurité ou d’une instrumentalisation, aux relents populistes et à des fins électoralistes, d’une cause peu soutenue ?

Les autres Etats membres de l’Union et la Commission européenne ne sont pas pour autant exempts de reproches. Les pays qui ont bénéficié des programmes d’aide à l’intégration des Roms ont-ils sensiblement amélioré le sort de ces populations ? Non. La Commission a-t-elle exercé les pressions et contrôles suffisants pour qu’il en soit ainsi ? Non. D’autres Etats peuvent-ils se targuer de réserver un meilleur hébergement aux gens du voyage que celui dont les communes françaises de plus de 5 000 habitants sont censées se doter – un terrain équipé – en vertu d’une loi vieille de dix ans déjà ? Ni en Belgique (voir en page 46) ni ailleurs…

En vérité, la polémique sur l’attitude des actuels dirigeants français nous questionne, nous tous Européens, sur notre appréhension générale des gens du voyage, au mode de vie si éloigné, et sur notre vision plus particulière des Roms qui tend à occulter l’extermination pendant la Seconde Guerre mondiale, la richesse culturelle ou la soif de liberté si bien célébrée par le cinéaste Emir Kusturica, pour ne retenir que la mendicité aux carrefours et la délinquance des adolescentes, une partie seulement de la réalité. Les Roms vivent en Europe depuis le xve siècle. Nous n’avons pas encore réussi à leur trouver une place. Leur place.

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Sur la question rom, aucun Etat européen n’a de leçon à donner

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