Le Chant des Ruines, chorégraphié par Michèle Noiret : une certaine idée de l'avenir de l'humanité. © SERGINE LALOUX

Scènes catastrophe

Du théâtre à la danse en passant par le cirque, les bouleversements climatiques annoncés et les signaux d’alarme déjà visibles se sont conviés dans un certain pan des arts vivants, en prise sur les urgences de notre temps.

Il y avait déjà eu des frémissements ces dernières années, comme Les Glaciers grondants de David Lescot, créé à Paris pendant la COP 21, ou Arctique d’Anne-Cécile Vandalem. Mais en 2019, ce fut un raz-de-marée. On ne pouvait les ignorer ; les questions écologiques ont infiltré tous les arts vivants. Une thématique brûlante, particulièrement présente à la rentrée de septembre. Le National ouvrait la nouvelle saison avec la dernière création de son directeur, Fabrice Murgia : La Mémoire des arbres, sur la catastrophe d’Oziorsk, en 1957, tenue secrète par le gouvernement soviétique. Le Poche faisait également sa rentrée sur le nucléaire, mais sur le mode de la fiction complète, avec Les Enfants de Lucy Kirkwood. Quant au Théâtre de Liège, c’est au collectif Mensuel qu’il confiait son ouverture de saison avec la création de Sabordage : l’histoire bien réelle (avec toutefois un final d’anticipation) de l’île de Nauru, paradis du Pacifique transformé en enfer suite à la colonisation et à l’application des logiques de surexploitation et de surconsommation.

En ces temps de collapsologie, déluges, typhons et effondrements ont imprégné les arts de la scène dans tous les domaines. En cirque, un spectacle comme Falaise, de la compagnie toulousaine Baro d’evel, présenté aux Halles de Schaerbeek, était rythmé par des écroulements divers, de corps et de pierres. La chorégraphe Michèle Noiret présentait dans Le Chant des ruines, en ouverture de la Biennale de Charleroi danse, une exploration agrandie par la vidéo des décombres de notre civilisation. Le même soir, Boris Charmatz retraçait l’histoire de l’humanité en chiffres et en nombres dans Infini, avec une perspective d’avenir peu rassurante. Dans le domaine du théâtre visuel, les compagnies Focus et Chaliwaté se sont serré les coudes pour créer Dimanche, chassé-croisé entre une équipe de reporters et une famille tentant de capter, pour les premiers, d’ignorer, pour les seconds, l’évanouissement de notre monde, avec des scènes époustouflantes à base de marionnettes, de miniaturisations et d’illusions.

Et ce n’est pas fini. L’Herbe de l’oubli, de la compagnie Point Zéro, sur les conséquences contemporaines de la catastrophe de Tchernobyl, continue de tourner à travers le monde. Maison Renard, de la compagnie Victor B, poursuit lui aussi sa route avec sa  » base autonome durable  » bien utile après l’apocalypse. Et en février 2020, le collectif Animals présentera au Varia Le Bousier, où Thomas Depryck semble réécrire la scène des fossoyeurs d’ Hamlet en mode posteffondrement.

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