Rudi Thomaes  » Quand le patronat dit la vérité, c’est vu comme de la provocation « 

L’ administrateur délégué de la FEB, autrement dit le  » patron des patrons « , répond aux syndicats outrés par les déclarations établissant un parallèle entre les parachutes dorés et les préavis des employés.

Les parachutes dorés : indécents, non ?

Je vous rappelle que c’est la FEB qui, en premier lieu, dès le mois d’août déjà – donc, avant la crise financière – a proposé de modifier le code de bonne gouvernance des entreprises cotées en Bourse, et de limiter les préavis des CEO à dix-huit mois !

Pourtant, Pieter Timmermans, directeur général de la FEB, vient de s’illustrer en déclarant que si on légiférait sur les parachutes dorés, alors il fallait aussi revoir la législation sur les préavis des employés…

Si on préfère légiférer plutôt que de privilégier l’autorégulation des entreprises cotées en Bourse, alors, cela implique de revoir la loi de 1978 sur les contrats de travail. Et cette révision doit se faire de façon non discriminatoire. Il faudra tout remettre sur le métier si on revoit la législation.

En temps de crise, ne faut-il pas, justement, protéger davantage les salariés, qui sont généralement les premiers à en subir les conséquences ?

Les systèmes de protection doivent être élaborés à tête reposée, et doivent être valables pour tous. A la FEB, nous ne sommes demandeurs d’aucune modification de la législation par ces temps troublés.

Le monde patronal ne  » profite « -t-il pas de la crise pour opérer des restructurations que, de toute façon, il aurait faites ?

Une restructuration est toujours acceptable s’il est clairement démontré que l’avenir de l’entreprise est en jeu. Crise ou pas crise.

Les patrons n’entendent-ils pas reporter sur l’Etat le coût de la crise ?

La FEB ne demande pas, n’a jamais demandé et ne demandera jamais que l’Etat intervienne en période de krach boursier. Cette fois, si l’Etat est intervenu, c’est juste pour protéger les épargnants. Les patrons n’ont rien à voir là-dedans.

Arcelor ferme un haut-fourneau, et les travailleurs sont mis en chômage technique, aux frais de l’Etat…

Dans les secteurs de la construction et de l’automobile, les commandes – et les prix – sont en chute libre. Cela n’aurait aucun sens de continuer la production au même rythme et dans les mêmes volumes qu’auparavant. Quant au chômage économique, je vous signale qu’il a un coût pour l’entreprise : les patrons se sont engagés à payer 16,6 euros par jour aux ouvriers, en sus de l’allocation allouée par l’Etat.

Un autre cas troublant : un nouveau magasin Carrefour, à Bruges, engage du personnel avec un statut moins favorable que celui des autres magasins du même groupe. N’est-ce pas là une entreprise de dérégulation, que le patronat espère faire accepter  » parce que c’est la crise  » ?

Je trouve dommage que la création de 150 emplois suscite ce genre de critiques. Ce nouveau magasin Carrefour est situé en pleine zone touristique. Il faut donc une flexibilité beaucoup plus grande là qu’ailleurs. C’est une bonne initiative.

On a un peu l’impression que le patronat, ces temps-ci, joue la provocation…

Quand le patronat dit la vérité, c’est interprété comme de la provocation. Quand les syndicats prennent les Belges en otage, comme cela a encore été le cas lors de la grève du 6 octobre, personne ou presque ne les condamne.

Vous ne craignez pas d’exaspérer les syndicats, justement, à l’approche des négociations de l’accord interprofessionnel ?

Ceux qui sont exaspérés, pour le moment, ce sont les patrons et les propriétaires de PME, dont les carnets de commandes sont vides pour le début de l’année prochaine.

Vous avez des actions Fortis ?

Comme tout bon père de famille ! J’ai cru que le rachat d’ABM Amro allait être coûteux, certes, mais faisable. Je me suis trompé…

Isabelle Philippon

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