Réchauffement climatique

Les prises de position récentes des Etats-Unis dans la négociation sur la lutte contre le réchauffement climatique sont d’abord un très mauvais coup porté aux pays en développement. Ces pays sont les moins responsables du changement climatique, mais supporteront en premiers les conséquences attendues de la montée des eaux, de l’extension des zones de sécheresse et des inondations. Parce que leurs économies sont dépendantes de l’usage de ressources naturelles telles que les sols cultivables et les eaux pour l’irrigation, la lutte contre le réchauffement du climat est vitale pour leur sécurité alimentaire comme pour leur développement économique et social. C’est donc, d’abord, à ces pays que les Etats-Unis s’en prennent, bien plus qu’à nous, Européens, qui aurons les moyens techniques et financiers de nous protéger contre les risques du réchauffement attendu.

M. Bush nous dit qu’il ne saurait remettre en cause le modèle américain pour satisfaire à des engagements auxquels 80% des pays ne seraient pas contraints ? C’est vrai qu’il est essentiel d’associer les pays en développement qui, en raison de leur développement économique, deviendront des émetteurs majeurs de gaz à effet de serre. Mais les pays du Sud ont aujourd’hui la désagréable impression que cette négociation climat se fait à leurs dépens, et sans eux. Ils craignent de voir la lutte contre l’effet de serre se traduire par une nouvelle contrainte à leur développement. Un outil comme le « mécanisme de développement propre », l’un des principaux instruments proposés à Kyoto pour associer les pays du Sud aux actions de lutte contre l’effet de serre, et qui devrait et pourrait permettre à ces pays de bénéficier d’investissements réels nouveaux pour leur développement, leur semble souvent conçu bien plus pour aider les pays de Nord à fuir leurs responsabilités que pour aider les pays du Sud à s’engager sur la voie du développement durable.

Que pouvons-nous faire de positif pour relever le défi et sortir de l’impasse ?

L’Europe peut et doit tracer la voie d’un accord de développement durable avec le Sud (basé par exemple sur un objectif d’émissions équitable à long terme pour tous les habitants de la planète). Cela suppose trois conditions :

Que l’Europe mobilise, dès maintenant, les ressources humaines et financières nécessaires à ce partenariat nouveau, au centre duquel on devrait trouver à la fois le développement des activités économiques des pays en développement et le contrôle des émissions de gaz à effet de serre;

Qu’elle montre chez elle ce qu’elle est capable de faire. Des technologies bien moins consommatrices d’énergie existent aujourd’hui pour chauffer nos habitations, transporter nos produits, assurer la mobilité des personnes ou faire marcher nos industries, et les énergies renouvelables peuvent contribuer davantage à nos besoins énergétiques. Encore faut-il montrer à nos partenaires que nous sommes capables de prendre les mesures politiques, économiques et sociales indispensables pour gagner l’adhésion des opinions publiques, inverser la tendance et nous engager sur les chemins du développement durable;

Qu’elle soit résolue enfin à faire adopter, par l’OMC si nécessaire, des mécanismes de protection contre la concurrence déloyale des entreprises de pays qui n’auraient pas choisi de faire face au défi du changement climatique.

A nous, citoyens, de faire comprendre que les pays du Sud doivent être impérativement considérés comme des partenaires à part entière.

C’est sur ces bases que nous demandons solennellement aux gouvernements européens et à l’Union européenne de proposer, sans attendre le dixième anniversaire de la conférence de Rio, un nouveau partenariat avec les pays du Sud pour un développement solidaire et durable, respectueux de l’environnement global, en particulier du climat.

C’est d’abord une affaire de justice et de solidarité, mais c’est aussi une condition indispensable à la lutte contre les conséquences désastreuses à moyen et à long terme du changement climatique.

Ce texte est signé par plusieurs centaines de personnalités françaises, belges et suisses, issues du monde scientifique, associatif, culturel et institutionnel.

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