PAS DE JUGE FINANCIER À MONS ?

Dans la réforme des arrondissements judiciaires, le Hainaut subit un sort particulier. Il devient bien un grand arrondissement unique. Mais, comme il inclut deux villes importantes, Charleroi et Mons, il a été décidé qu’il serait dirigé par un seul président du tribunal au niveau du siège et par deux procureurs au niveau du ministère public, un Carolo et un Montois. Depuis le 1er avril, l’article 186 du code judiciaire permet également au président du tribunal de régler la répartition des affaires en rendant une division exclusivement compétente pour diverses matières, dont les dossiers économiques et financiers.

Dans ce nouvel arrondissement, on pense évidemment aux dossiers politico-financiers qui ont secoué le PS ces dernières années. On sait que l’intérêt des enquêteurs s’est déplacé, au gré de leurs investigations, de Charleroi vers Mons. Ceux-ci semblent d’ailleurs l’avoir payé cher avec les tracas qu’ils ont subis ces deux dernières années. Pour ne citer que les principales affaires sensibles en cours au parquet de Mons : les liens de l’ancien secrétaire communal Pierre Urbain avec un cartel de drogue, le placement douteux par l’intercommunale Idea du produit de la vente du câble à Tecteo, les montages fiscaux de Franco Dragone, la vente d’un immeuble Belgacom à un prix inférieur au marché par Didier Bellens à Edmée De Groeve…

Pour tous ces dossiers dans lesquels on retrouve des personnalités proches d’Elio Di Rupo, il n’y a pas de juge d’instruction spécialisé dans les matières financières à Mons (ni à Tournai, d’ailleurs). Et c’est un problème, reconnaît-on au parquet général. Le juge Alain Blondiaux, qui a hérité de ces enquêtes, s’est formé sur le tas. Il est évidemment un peu débordé. Aujourd’hui, au parquet de Mons, des langues inquiètes affirment qu’en septembre on ne nommera toujours pas de juge d’instruction financier dans la Cité du Doudou, mais qu’il y aura un pool de quelques juges spécialisés à Charleroi. Bien sûr, les deux villes ne sont pas très éloignées. Toutefois, dans la pratique, un juge carolo aura tout de même moins d’accointance avec le terrain montois. Et puis, au niveau symbolique… Pas de juge financier à Mons, cela donnerait l’impression que la capitale culturelle wallonne est blanche comme neige dans ce domaine-là, contrairement au Pays noir.

 » Affirmer que les juges financiers seront concentrés à Charleroi est tout à fait prématuré, même si c’est une possibilité, réagit Christian Henry qui vient de se succéder à lui-même au poste de procureur. D’après les contacts que j’ai eus avec la future présidente de l’arrondissement, Monique Levecque (NDLR : conseiller près la cour d’appel de Mons), rien n’est encore décidé. Cela doit encore faire l’objet d’une négociation.  » On tient le même discours prudent au parquet général.

Au niveau des substituts financiers à Mons, la situation n’est pas davantage idéale. On observe une rotation importante : ils étaient quatre et ne sont plus que trois. Deux sont partis pour siéger dans un tribunal. Ils ont été remplacés, l’année dernière, et le plus ancien des trois actuels chercherait à être promu ailleurs. Bref, les magistrats expérimentés ne restent pas en place. Par ailleurs, il semblerait qu’on presse un peu le juge Blondiaux de boucler ses instructions pour fin juin, la réorganisation de l’arrondissement devant être lancée en septembre au plus tard. S’il n’y parvient pas, gardera-t-il la main sur ses dossiers les plus délicats ? L’avenir des enquêtes financières est décidément incertain au sein de l’arrondissement hennuyer.

Thierry Denoël

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