» Papounet « , le prestidigitateur

Pas un instant il ne doute de lui. Grande gueule, sulfureux,  » bourreau des c£urs « , rude et cru, il se permet tout, ose tout, affichant l’assurance insolente de ceux que rien ni personne ne peut ébranler. L’esbroufe et le culot érigés en art.  » L’enrageante vieillesse  » fustigée par Françoise Giroud ? Connaît pas. A 72 ans, il se veut beau et immortel. Pour preuve, les veline, les innombrables sexy girls, piquantes et vulgaires dont il s’entoure. Toujours plus jeunes, toujours plus fraîches, histoire de se rassurer lui-même sur son  » éternelle verdeur « . Sans la politique, il aurait déjà goûté de la prison ferme, tant il traîne d’affaires louches, de détournements, de malversations. Malin comme un singe, il a réussi à se faire protéger par une loi qui interdit toute poursuite judiciaire à son encontre. Intouchable pendant la durée de ses mandats, soit pas moins de quinze années truffées de scandales et de délits, il fait la nique aux contre-pouvoirs qui, hélas, ne fonctionnent plus. Abîmant chaque jour davantage l’image de son pays sur la scène internationale.

Le sommet du G 8 à L’Aquila, si durement touchée par la catastrophe du 6 avril dernier et qui avait vu ses murs s’écrouler avec, pour conséquences, près de 300 morts et des dizaines de milliers de sans-abri, devait donc redorer le blason d’une Italie éclaboussée par les frasques de son président du Conseil. Une ville toujours à la merci d’un éventuel séisme, choisie avec soin pour un sommet à grands risques censé faire oublier, quarante-huit heures durant, les bouffonneries en tout genre de « Sua Emittenza « . L’image interpelle. L’Aquila, douloureusement éprouvée, otage d’un manipulateur surdoué, d’un metteur en scène passé maître dans l’art de la tromperie, qui l’eût cru ? Un nouveau tour de passe-passe de la part d’un homme qui agit toujours dans les marges, d’un prestidigitateur qui se joue de l’ordre et du désordre des émotions et a pulvérisé depuis belle lurette les empêcheurs de tourner en rond.

Qui lui résiste ? Les partis de gauche, ses ennemis politiques ? Trop divisés. Le peuple ? Il ne croit pas à la politique. Ce qu’il attend ? D’abord et avant tout la résolution des problèmes aigus d’un pays confronté, comme bien d’autres, à une crise préoccupante. Septième puissance mondiale, l’Italie reste encore une juxtaposition d’Etats qui peinent à cimenter une véritable unité nationale. Sans parler des réalités socio-économiques difficiles qu’accentue encore une dangereuse scission Nord/Sud. Sans oublier le sentiment diffus d’insécurité, lié, entre autres, à l’arrivée massive de nouveaux immigrés.  » Papounet « , comme le surnomme l’une de ses dernières conquêtes, Noemi Letizia, 18 ans à peine, rassure. Du vent, certes, rien que du vent. Mais, en période incertaine, beaucoup ne demandent qu’à le croire. Et puis, qui d’autre ? Après la bérézina du centre gauche, « il Cavaliere «  prospère sur du vide. Les sondages le prouvent : une majorité d’Italiens se laisse volontiers séduire par le  » berluscoptimisme « , une extase du présent que le président du Conseil maîtrise parfaitement.

Un G 8 moribond sur une terre à la merci d’un nouveau séisme ! Pas moins de 9 000 militaires et policiers mobilisés, une multitude de batteries antiaériennes, des avions de chasse, des missiles sol-air, Berlusconi a vu grand. Tel était son bon plaisir. Ne reste qu’à tourner la page, vite, vite, pour enfin s’occuper, avec un indispensable G 20, des vrais grands désordres du monde.

 » Il Cavaliere  » prospère sur du vide

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