Thierry Fiorilli © FRÉDÉRIC RAEVENS

Mi-poule mi-autruche

Extraits de notre dossier  » Bruxelles, capitale de l’Europe malgré elle ?  » (page 106) :

 » Quelqu’un a-t-il jamais vu une affiche Bienvenue dans la capitale de l’Europe à l’aéroport de Bruxelles ?  »

 » Ce n’est pas du désamour, il n’y a jamais eu d’amour : c’est du désintérêt. On dirait que Bruxelles subit son sort, et en rouspétant en plus ! Tout le monde s’en fiche !  »

 » Il y a une génétique bruxelloise : l’Europe emmerde les Bruxellois, et ils ne savent même plus pourquoi. C’est la mémoire de la ville.  »

 » En réalité, il n’y a pas d’identité bruxelloise. A Anvers, les Anversois sont fiers ! Le fait que les gens ne sont pas fiers d’être la capitale de l’Europe tient à ce problème d’identité. La question est : qui sommes-nous, que sommes-nous, à part des enfants gâtés ?  »

Extraits de notre dossier  » Wallonie : stop aux nouvelles maisons d’ici à 2050  » (page 46) :

 » Evidemment, certains voudront toujours rester seuls au bout de leur chemin. Celui qui veut garder une maison quatre façades pourra toujours le faire, mais ça aura un coût.  »

 » Toujours plus nombreux, les habitants devront vivre, circuler et travailler sur les surfaces déjà bâties.  »

 » En clair, plus aucun nouvel hectare de terre ne pourra être consacré à du logement, des voiries ou à de l’activité économique en 2050.  »

 » Comme pour les déchets, il faut s’orienter vers le recyclage des sols, de nos lieux de vie actuels.  »

Autrement dit : la crise catalane démontre, une nouvelle fois, que nombre d’Européens considèrent bel et bien Bruxelles comme la capitale de l’Europe, les études évaluent entre 7 et 12 milliards d’euros l’impact de la présence internationale sur le PIB bruxellois, Bruxelles est la deuxième ville de congrès du monde, mais les Bruxellois, citoyens comme autorités, s’en tamponnent plus ou moins allègrement. Ou s’en plaignent. Dans le même temps, il est hasardeux voire impossible d’y concevoir une mobilité digne de ce nom et adaptée aux besoins des habitants, des touristes et des navetteurs, d’y ériger un stade (inter)national, de créer de l’emploi pour le plus grand nombre, de garantir des infrastructures non défaillantes et d’éviter que virent à l’émeute des manifestations de protestation, de revendications, de réjouissances ou de solidarité après un drame. Bref : à Bruxelles, plus on est courtisé, plus on est redevable, plus on se rend invivable.

u0022 C’est vraiment un drôle de pays. Soit à courir sans tête, soit à l’enfouir dans le sable u0022

De son côté, le sud du pays réalise qu’il devrait accueillir 200 000 ménages de plus en 2035 et 300 000 en 2050. Ses gouvernants mettent alors en place une stratégie de regroupement, de densification de l’habitat, d’entassement de la population, en prenant exemple sur un projet flamand équivalent, en invoquant des enjeux environnementaux et en admettant que seuls ceux qui auront de gros moyens auront alors la chance de vivre loin des centres urbains sans être privés pour autant des équipements indispensables à toute résidence qui se respecte. Bref : en Wallonie, plus il y a de défis à relever, plus on assume le risque de creuser davantage encore le fossé des inégalités.

On aura beau argumenter, nuancer, évoquer les réalités financières publiques et l’évolution des besoins collectifs, nos deux dossiers, que les hasards du calendrier et les aléas de l’actualité ont fait cohabiter dans le même numéro, laissent au mieux perplexe, au pire désolé : ce pays, si petit et si diversifié à la fois, est quand même un drôle de pays. Toujours mi-poule mi-autruche. Soit à courir sans tête, soit à l’enfouir dans le sable

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