Les patrons appellent à l’urgence

Les urnes ont parlé. Reste à créer des coalitions régionales. Les patrons craignent le retour du communautaire.

« Du côté flamand, on voit revenir la N-VA et ses revendications communautaires au premier plan. Le pays n’a pas besoin de cela en ce moment, lance d’emblée Rudi Thomaes, administrateur délégué de la Fédération des entreprises de Belgique (FEB). Si on ramène le communautaire au-devant de la scène, c’est foutu. On doit avoir pleinement conscience que les défis socio-économiques sont immenses et incontournables. Et ils s’appliquent au nord et au sud du pays. On ne peut plus effectuer des budgets sur la base des méthodologies traditionnelles qui misent sur une croissance de 2-3 %. Cela n’a plus aucun sens. Le gouvernement flamand sait qu’il n’y a plus d’argent au fédéral. Il veut trouver des solutions à son niveau et avoir devant lui des business plan prometteurs. « 

La situation politique wallonne est moins claire qu’en Flandre. Une chose apparaît toutefois certaine : comme le dit l’administrateur délégué de l’Union wallonne des entreprises (UWE), Vincent Reuter :  » Il ne faut pas lanterner.  » Ces dix dernières années, la Wallonie a eu droit à son Contrat d’avenir puis au plan Marshall. Leurs effets devaient être visibles d’ici à la fin de l’année. L’ambition affichée : ramener la Wallonie à la moyenne européenne en matière de taux d’emploi et de PIB (produit intérieur brut). Or  » on en est loin. « 

La crainte des patrons wallons réside surtout dans les tensions internes au sein des partis qui risquent de compliquer encore le travail de futurs négociateurs.  » Il y a de bonnes choses dans chaque programme mais il faut protéger les acquis, plutôt que de s’enfermer au nom d’idéologies.  » Ainsi quand on parle de développement durable, Vincent Reuter constate que la plupart des industries n’ont pas attendu des plans pour investir dans ce domaine.  » Il ne faudrait pas à présent que l’on touche à l’épine dorsale de l’économie wallonne alors qu’il y a peut-être des domaines dans lesquels le gouvernement peut intervenir. Je pense notamment à tout ce qui concerne la mobilité. Les TEC ou la SNCB doivent offrir un service qui permette de mettre en pratique les beaux projets. Il est important aussi de mener une politique agressive pour améliorer la qualité de nos voies d’eau trop souvent mal adaptées au transport maritime. « 

Luc De Bruyckere, nouveau président du Voka (fédération patronale et chambres de commerce flamandes), mais aussi administrateur de l’UWE en tant que patron de Ter Beke (Les Nutons), va dans le même sens, avec des nuances.  » L’électorat wallon aime le confort. Il aime ce qu’il connaît, en particulier le PS qui aurait pu être mis en péril.  » Or le PS, ce sont les acquis sociaux, la protection, l’emploi public…  » Du côté flamand, on vote pour une plus grande indépendance, sans chercher l’aventure. Malgré le score des nationalistes de la N-VA, une majorité des Flamands ne veut pas la scission du pays. « 

Le Voka a récemment réuni employeurs et syndicats autour du projet  » Vlaanderen in actie « .  » Les élections permettent de mettre ce plan en place. Economiquement, la Flandre veut se montrer ouverte, prenant des initiatives, généreuse, et beaucoup de Flamands déplorent que les Wallons la voient d’une autre manière. Nous voulons poursuivre le chemin de la solidarité mais aussi responsabiliser. Il faut £uvrer sur l’efficacité et non le communautaire, il faut un réengineering de la Flandre, en collaboration avec la Wallonie, notamment pour améliorer le fonctionnement du service public.  » Pour Luc De Bruyckere, le sud du pays aurait tout intérêt à participer à cette réorganisation et compte instaurer des conseils d’administration communs annuellement entre responsables de l’UWE et du Voka.  » Nous voulons créer, au sein du patronat, des opportunités pour mieux se comprendre. C’est ainsi qu’on pourra renforcer la confiance mutuelle et trouver les meilleures solutions.  » Un avis que partage Jean-Pierre Delwart, président d’Eurogentec et futur président de l’UWE :  » Il faut renforcer les solidarités interrégionales « , conclut-il.

Didier Grogna

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