Le secteur public : valeur refuge dans la crise

A côté d’un salaire plus ou moins compétitif selon les cas, la fonction publique offre une sécurité d’emploi attirante par les temps qui courent. Et d’autres arguments moins connus.

La sécurité de l’emploi trône en tête des critères qui déterminent l’attractivité d’un employeur aux yeux du grand public, devant l’ambiance de travail, la santé financière de l’entreprise et la rémunération. Le constat ressort d’une enquête menée auprès de 10 000 Belges âgés de 18 à 65 ans par Randstad, au cours du troisième trimestre 2008. Avec la crise et les charrettes de licenciements qui y sont liées, il y a fort à parier que l’attrait de la sécurité ait encore engrangé des points depuis lors.  » L’aspect sécurité d’emploi gagne systématiquement en importance durant les années de conjoncture difficile « , confirme-t-on à la société de travail intérimaire.

Or  » sécurité d’emploi  » rime avec  » secteur public « . La fonction publique représente-t-elle pour autant une  » valeur refuge  » dans la tempête ? Il semble que pour certaines de ses sélections pour les emplois statutaires (emplois avec nomination à titre définitif), le Selor constate une hausse de 20 % du nombre de candidatures. Le bureau de sélection de l’administration a aussi enregistré cinq fois plus de candidatures spontanées pour un emploi contractuel sur les quatre derniers mois de 2008, par comparaison à la même période en 2007.

Relève à assurer

Faut-il pour autant jouer la carte de la sécurité de l’emploi pour attirer le candidat ? Corinne Benharrosh, directrice du recrutement et de la sélection au Selor, nuance.  » La personne en quête de sécurité d’emploi à tout prix et qui ne postule dans la fonction publique que pour celle-ci n’est pas intéressante pour nous, dit-elle. Si cette recherche de sécurité est couplée avec un réel engagement en faveur du service public, une orientation résultats, un sens du client interne et externe, des aptitudes à travailler en équipe et des compétences utiles, alors, en effet, la crise peut représenter une opportunité pour nous attirer de nouveaux talents. « 

La crise met de nombreux profils – dont certains de qualité – sur le marché et le Selor entend saisir la balle au bond pour répondre aux défis qui sont les siens : d’ici à 2020, 40 % des effectifs du fédéral partiront à la retraite et il faut assurer la relève. Aucune communication spécifique n’a toutefois été envisagée pour s’attirer les  » licenciés du privé « .  » Il aurait été aisé de dire : le secteur financier vous jette, venez voir dans le public ! reconnaît Corinne Benharrosh. Mais nous préférons agir de manière ciblée. De nombreux profils financiers vont probablement arriver sur le marché et nous avons activé nos réseaux au sein des institutions pour lesquelles nous recrutons – services publics fédéraux, parastataux sociaux, établissements scientifiques, etc. – afin de détecter d’éventuels besoins et les confronter aux compétences qui vont être disponibles. « 

Engagement durable

Pour séduire les talents, la sécurité d’emploi n’est pas le seul argument que peut faire valoir l’administration. En début de carrière, les salaires y sont compétitifs. Quelqu’un qui démarre avec un diplôme de master y reçoit un salaire net de 1 600 euros par mois. Après six années, sa rémunération s’élèvera à environ 1 900 euros net. En matière d’avantages complémentaires par contre, le package se révèle souvent moins avantageux, même si l’assurance hospitalisation et la gratuité du trajet domicile-bureau ne sont pas à délaisser. A l’inverse, le volet  » retraite  » offre des perspectives plus qu’intéressantes. Il est ainsi admis qu’un fonctionnaire perçoit, en moyenne, plus du double de la pension d’un salarié du privé.

A côté du salaire, l’aspect équilibre entre vies privée et professionnelle, les possibilités en matière de flexibilité – désormais, le fonctionnaire peut, dans certains cas, télétravailler, voire déterminer son horaire – et la réglementation des congés récemment simplifiée viennent renforcer l’offre de l’employeur. Et, en réponse à la notion controversée de statut, Corinne Benharrosh évoque plutôt un engagement durable.  » Lorsque la fonction publique engage quelqu’un, ce n’est pas pour qu’il passe toute sa vie sur la même chaise à réaliser le même job. L’administration fédérale est une organisation énorme, composée de nombreux services et de métiers très différents. La sécurité de l’emploi est ainsi couplée à la possibilité d’évoluer, de développer ses compétences, de vivre une mobilité professionnelle, de s’orienter vers des activités auxquelles on n’aurait pas forcément pensé. Les opportunités existent et elles sont nombreuses, d’où l’idée d’engagement durable. « 

Une certitude, selon elle : la crise n’a pas sonné la fin de la guerre des talents.  » Les talents restent des talents et les talents demeurent rares. En dépit de la crise qui a marqué ses premiers effets au quatrième trimestre 2008, le nombre des candidatures reçues par le Selor a décru de 71 000 en 2007 à 56 000 l’année passée.  » La crise pourrait d’ailleurs inciter les gens à la prudence, à rester en place plutôt que de tenter l’aventure dans une autre entreprise sans savoir si celle-ci ne sera pas amenée à restructurer dans un avenir proche.  » A ce niveau, la fonction publique jouit d’un avantage certain, tout en offrant des défis intéressants en termes de gestion du changement par exemple. Et, pour l’heure, la crise n’a eu aucun impact sur le nombre de recrutements à réaliser, contrairement au privé où le gel des embauches est la norme… « 

Christophe Lo Giudice

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