Le repaire des pirates

C’est un amiral, en l’occurrence le chef d’état-major interarmées américain, qui le dit :  » Les pirates sont bien armés. Tactiquement, ils sont très bons.  » Il faut le croire, en effet. Depuis le mois de janvier 2008, près d’une centaine de bateaux ont été attaqués au large de la Somalie et dans le golfe d’Aden, pas loin de 40 navires ont été détournés, dont 17 sont toujours aux mains des bandits (ce qui représente, au passage, 250 membres d’équipage). Et ces chiffres sont appelés à évoluerà D’après les autorités kényanes, l’ensemble de cette flibuste moderne, qui allie des embarcations rapides aux moyens sophistiqués de navigation et de communication que l’on trouve partout à bas prix, représenterait d’ores et déjà un butin de 150 millions de dollars. Parmi les  » prises « , qui n’épargnent aucun pays ni pavillon, on compte tous les types de marchandises, des cargaisons de poisson, des hydrocarbures, mais aussi des tanks russes, puisque le paiement d’une rançon est le but recherché. Une mer entière, l’une des plus fréquentées du globe, se retrouve transformée en zone interdite par le fait de groupes particulièrement déterminés. Leur exemple trouve un écho aux Caraïbes et, surtout, dans le golfe de Guinée ; seul le détroit de Malacca, longtemps tenu pour dangereux, a été sécurisé depuis peu par la coopération intense des Etats limitrophes.

Face à l’ampleur de la menace, les routes maritimes sont rallongées pour éviter les arraisonnements ; le Conseil de sécurité de l’ONU a adopté à l’unanimité une résolution d’initiative française (1838) appelant les Etats à déployer  » des navires et des avions militaires  » ; l’Union européenne lancera, début décembre, la première opération navale de son histoire, Atalanta, destinée à convoyer les navires du Programme alimentaire mondial, à protéger les bateaux vulnérables et à prévenir et réprimer les actes de piraterie. Fait notable, la Russie et la Chine sont prêtes, cette fois, à coordonner leurs efforts avec les Occidentaux. Tout est mis en £uvre. Saufà la résolution de l’incroyable anarchie qui déchire la Somalie depuis trois décennies et la maintient, après le terrible fiasco de l’opération humanitaire américano-onusienne de 1993, dans une misère indescriptible, mère de toutes les pirateries. L’échec le plus flagrant du droit d’ingérence s’est mué en défi international.

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