Le papy-bourgmestre fait de la résistance

Joseph Houssa, âgé de 82 ans, est bourgmestre de Spa depuis trente ans. Une gestion en bon père de famille qui éloigne les mauvaises surprises, rassure les habitants, mais exaspère l’opposition.

Le col de chemise impeccablement boutonné et cravaté, Joseph Houssa reçoit dans un bureau habillé avec la même minutie : pas d’écran d’ordinateur, pas de fardes, d’archives, de Post-it désespérés sur la table de travail –  » J’essaie de traiter mes dossiers tout de suite  » -, à peine un téléphone, un stylo, deux ou trois photos, rien qui puisse durablement distraire l’attention. Agé bientôt de 82 ans, à la tête de la commune depuis trente ans, le bourgmestre MR de Spa est un Guinness Book à lui tout seul.  » J’ai le relevé des bourgmestres de Spa depuis 1612, je bats le record de durée, complète-t-il. Et je dois être, dans le pays, le doyen des bourgmestres en exercice.  » Et ça devrait durer puisqu’en octobre il se présentera –  » une dernière fois « , insiste-t-il – sur les listes. Tant pis pour ceux qui, autant sur les bancs de son parti que sur ceux de l’opposition, attendent depuis trente ans de s’essayer eux aussi à l’exercice du pouvoir.

Le Vif/L’Express : Quel est le secret de votre longévité ?

Joseph Houssa : Une passion pour ma ville et pour la politique. Mais j’ai la chance aussi de pouvoir compter sur une excellente équipe. Je respecte l’opposition et vous savez, nous habitons une petite ville, les habitants savent que je suis disponible : je suis à leur disposition chaque matin de 10 à 12 heures et quand ils se présentent en dehors de ces plages horaires, je m’arrange toujours pour les recevoir. Je ne fais jamais de tort à personne et quand vous restez trente ans en place, ça veut sans doute dire que vous maîtrisez les dossiers…

Vous allez, si les urnes vous sont favorables, être bourgmestre jusqu’en 2018. Quels sont les chantiers prioritaires pour les jeunes ?

La crèche va faire l’objet de gros travaux, elle va être agrandie pour recevoir tous les services de la petite enfance. Ce devrait être terminé fin de cette année. Nous allons aussi construire une nouvelle école communale. En matière sportive aussi, de sérieux investissements sont programmés : nous avons doublé la capacité de la salle omnisport et nous allons aménager un terrain en plein air. Des travaux importants sont programmés aussi au tennis et nous avons aménagé un centre pour les jeunes qui est remarquable, il va également servir de maison de l’emploi.

Et en matière d’urbanisme ?

Un tout gros dossier, important pour les Spadois, c’est la réhabilitation des anciens thermes en hôtel quatre étoiles de plus de 80 chambres. Le projet a été attribué, nous attendons le certificat de patrimoine. Le Waux-Hall, qui est l’ancienne maison de jeu et est un des plus beaux exemples d’architecture néoclassique de l’ancienne principauté de Liège, doit être totalement rénové au cours de la prochaine législature. C’est un bâtiment d’une très grande beauté, dont la réfection exige des moyens importants pour une ville comme la nôtre : 6 millions d’euros.

Vous êtes à la tête de la ville depuis pas mal de temps. Quel bilan pouvez-vous tirer ?

Un des grands enjeux était la fin du thermalisme social. Nous avons pu initier et mener à bien une nouvelle politique en faisant construire de nouveaux thermes axés sur le bien-être et la santé. Un autre problème était l’abandon de nombreux bâtiments historiques des XXe, XIXe et même XVIIIe siècles. Nous sommes en train de les remettre d’aplomb.

L’opposition se plaint d’un Espace partagé qui n’avance pas, au grand dam de la population…

Il faudrait, pour que les choses puissent avancer autrement, le soutien de la Région wallonne mais, comme vous le savez, celle-ci a eu d’autres chats à fouetter. Je pense notamment à la réfection des autoroutes, qui coûte beaucoup d’argent. La Région nous répond systématiquement qu’il n’y a pas de moyens disponibles pour notre Espace partagé, mais on ne va pas les attendre et la place du Monument va, notamment, être réaménagée.

Spa a la réputation d’être une ville riche. Les choses ne sont-elles pas en train de changer ?

Oui, ici comme ailleurs. Il y a beaucoup de bâtiments anciens qui ont été transformés en kots et pas mal de jeunes, parfois sans travail, viennent habiter en ville. Le chômage [NDLR : 17,8 %] a augmenté, il y a des gens qui ont de faibles revenus. C’est pour cette raison, par exemple, que nous avons créé une agence immobilière sociale qui fonctionne très bien et qui gère déjà une vingtaine de logements. Mais nous ne connaissons pas les problèmes des grandes villes, on peut encore se promener à Spa en toute sécurité, quelle que soit l’heure du jour ou de la nuit.

Quelles sont les pistes pour lutter contre ce chômage et cette paupérisation d’une partie de la population ?

Vous savez, Spa est une petite ville, au territoire peu étendu et avec une seule grosse entreprise qui est Spa Monopole. Il n’y a pratiquement pas d’espace disponible pour accueillir de nouvelles entreprises. Alors, il faut miser sur nos atouts : le thermalisme, qui a fait la réputation de la ville et en a d’ailleurs fait un nom commun, le tourisme, la culture aussi avec les Francofolies, le Tribute Festival qui a lieu au mois de juillet et qui marche formidablement bien, les activités du centre culturel, etc. Par chance, nous pouvons aussi compter sur un environnement naturel de toute beauté : un parc naturel va être créé sur les crêtes, entre Spa et Stoumont.

JOËL MATRICHE

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