Le CEB au piquet ?

Soraya Ghali
Soraya Ghali Journaliste au Vif

94,5 % des écoliers décrochent ce premier diplôme. Malgré ce taux de réussite canon, l’école secondaire, elle, ne parvient pas à lutter contre l’échec scolaire.

Du gâteau, le CEB ? Trop facile, l’épreuve commune pour l’obtention du certificat d’études de base ? En juin dernier, le résultat global était tombé : 94,5 % des élèves décrochent ce premier diplôme (c’est-à-dire qu’ils obtiennent au moins 50 % dans chaque matière). C’est 10,6 % de plus par rapport à 2007, à savoir trois ans après la première édition du  » bac primaire « . Publiés dans les colonnes de La Libre Belgique, les scores par branche s’avèrent remarquables. Jugez plutôt : 0,8 % d’échec en éveil, 1,5 % en français et 4,6 % en mathématiques. Face à ces pourcentages record, certains sont montés au créneau, en dénonçant une mascarade, eu égard à l’échec scolaire en secondaire. Pas si vite.

Le CEB est-il vraiment plus facile ?

Créée en 2007, cette certification remplace les anciens examens cantonaux, diocésains et autres épreuves  » maison « . Son but : fixer les compétences minimales que doivent maîtriser tous les enfants de fin de 6e primaire. Avec cette idée que le CEB renseigne à la fois l’écolier sur son savoir et l’institution, sur sa mission d’enseignement. Reste que, par rapport aux tests cantonaux et diocésains, le taux de réussite moyen est quasi identique : de 1999 à 2007, il tournait autour de 93,3 %.  » Vous ne pouvez pas comparer les deux, ce n’est pas le même thermomètre « , répond un inspecteur. Admettons. Si le taux de réussite du CEB augmente au fil des années, ce serait les conséquences de la réforme. D’abord, il y aurait  » l’effet reflux « . Les enseignants perçoivent mieux ce qu’on attend de leurs élèves et se recentrent sur les fondamentaux.  » Les écoliers sont drillés « , confirme, entre autres, un directeur d’école. Ensuite, la qualité de l’examen augmente elle aussi : les questions sont mieux élaborées, laissant moins de place à l’ambiguïté, à l’imprécision.

Mais 5,5 % au moins des écoliers n’atteignent pas ce niveau minimal…

Que fait-on de ceux qui échouent ? Ils doublent leur 6e ou sont dirigés vers la 1re différenciée. A ce chiffre il faut additionner celui des enfants qui, chaque année, lâchent en fin de 5e primaire (parce qu’ils ont déjà bissé, parce qu’ils ont 12, 13 ans) et entrent sans CEB en 1re différenciée, soit environ 4 %. Ces élèves ne rattrapent presque jamais leur retard. Ainsi, sur une cohorte d’écoliers orientés, en 2004, vers la 1re différenciée, seul 1,6 % avait réintégré le cursus général en 2008. Les autres ? En 4e professionnelle pour 29,6 %, 20,8 % en 3e professionnelle, 8 % en CEFA (centre d’enseignement et de formation en alternance). Et le solde, en contrat d’apprentissage.

Au total, un taux de sortie de l’école primaire s’élevant à 9,5 %, soit au moins 4 469 élèves perdus en cours de route. Selon les rapports des indicateurs de l’enseignement édités par la Communauté française, ce chiffre augmente au fil des années. Auquel (mauvais esprit !), on pourrait ajouter le pourcentage d’élèves qui bissent leur 5e primaire : aux alentours de 4 % également. Ceux-là ont moins de risques de rater l’épreuve l’année suivante.

Le n£ud du problème, c’est le passage entre le primaire et le secondaire

L’école secondaire représente bien le lieu de tous les dangers, une gare de triage qui sépare les  » bons élèves « , promis aux études générales, de ceux dirigés dans des établissements techniques et professionnels mal cotés. Ainsi, malgré un carton au CEB, en fin de 1re secondaire, en 2008, 13,1 % des élèves redoublaient. Plus préoccupant : en fin de 2e secondaire, 9,9 % redoublaient et 16 % étaient orientés vers le technique ou le professionnel. Soit, au terme du premier degré du secondaire, un taux d’échec de 25 %.  » Le CEB n’est pas un pronostic ; en tout cas le décrocher n’est pas une garantie pour le secondaire, et réussir sa rhéto ne signifie pas réussir à l’unif « , répond un inspecteur. De fait, le taux d’échec en première master s’élève, lui, à 40 %. Au final, seule l’école maternelle ferait-elle encore figure d’exception ?

SORAYA GHALI

Vous avez repéré une erreur ou disposez de plus d’infos? Signalez-le ici

Contenu partenaire