La Sonaca en avant-coureur

Après la lourde restructuration annoncée à la Sonaca, le secteur de la métallurgie et des entreprises technologiques doit-il s’attendre à de nouveaux coups durs ? Oui, dit-on dans les rangs syndicaux autant que patronaux. Hélas…

Le Vif/L’Express : Vous attendiez-vous à l’importante restructuration annoncée à la Sonaca ?

> Nico Cué, secrétaire général des Métallurgistes Wallonie-Bruxelles (FGTB) : La Sonaca connaissait des difficultés depuis plusieurs années mais on ne s’attendait pas à une restructuration aussi lourde. La crise a accéléré le processus. Ce qui nous inquiète, c’est que l’entreprise risque de perdre, en licenciant son personnel, une partie de son savoir-faire et de son expérience. Or le carnet de commandes se remplit bien pour 2011 et 2012. Il ne faudrait pas tailler trop dans les effectifs, de manière à pouvoir encore rebondir à ce moment-là.

Craignez-vous d’autres restructurations dans le secteur ?

> Oui. Depuis un an, les entreprises ont perdu entre 15 et 30 % de leur chiffre d’affaires. L’emploi risque de fondre dans la même proportion si les affaires ne reprennent pas. Le sort des sous-traitants est particulièrement préoccupant.

Quelles solutions préconisez-vous pour amortir les effets de la crise ?

> Il faut maintenir le chômage économique pour les ouvriers et les employés en attendant la reprise économique ; améliorer l’accès au crédit, surtout pour les petites entreprises ; et poursuivre la réalisation du plan Marshall vert afin que nos sociétés se spécialisent dans des produits d’avenir.

Certaines entreprises profitent-elles de la crise pour restructurer à bon compte ?

> Oui. Cela se voit à des kilomètres : ces sociétés ne ressentent guère la crise mais licencient quand même. On risque d’y voir éclater de gros conflits sociaux parce qu’il n’y a pas de raisons objectives de restructurer dans leur cas.

Quel est le moral des troupes ?

> Les salariés sont inquiets pour l’avenir. Ils redoutent aussi de trinquer encore lors de la confection du budget fédéral alors qu’ils ont déjà fait de gros efforts de productivité depuis des années. Que l’on demande aux banques de rembourser le montant de leur sauvetage !

Le Vif/L’Express : Vous attendez-vous à ce que d’autres restructurations interviennent après celle de la Sonaca ?

> Frank Vandermarliere, directeur du département économique chez Agoria, la fédération des entreprises technologiques : Oui. Nous pensons que la reprise réelle de l’activité économique ne se produira pas avant 2011 ou 2012 et que l’emploi diminuera d’ici là. Pour l’instant, le choc de la crise est partiellement absorbé par le chômage économique mais cette formule ne peut pas durer éternellement.

Quelles sont les entreprises qui vous semblent traverser le mieux la crise ?

> Certaines s’en sortent mieux que d’autres : ce sont les plus compétitives, dotées d’une bonne santé financière, capables de s’adapter et disposant soit des centres de décision en Belgique, soit de suffisamment d’autonomie pour réagir de la manière la plus adéquate. Cela dit, il devient difficile, dans notre secteur, de trouver des sociétés en croissance. Mais les faillites et fermetures d’entreprises sont encore peu nombreuses.

Quel sera, à votre avis, l’impact de la crise en termes d’emplois ?

> Depuis le début de la crise, notre secteur a perdu environ 15 000 postes, soit 5,2 % du total. On s’attend à d’autres pertes d’emplois au quatrième trimestre.

Qu’attendez-vous du gouvernement fédéral, dans ce contexte ?

> Qu’il n’augmente pas la fiscalité sur le travail, ni sur l’activité économique des entreprises ; qu’il réalise les économies dont il a besoin en réformant la fonction publique ; et qu’il ait l’intelligence de ne pas réduire les aides à la recherche et au développement.

Et des organisations syndicales ?

> Qu’elles gardent leur sang-froid. Dans une telle situation, on a davantage besoin de pragmatisme que d’idéologie.

ENTRETIEN : LAURENCE VAN RUYMBEKE

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