L’Université de Mons, cette vieille idée

L’Université de Mons ouvrira ses portes à la prochaine rentrée académique. Née de la fusion entre l’Université de Mons-Hainaut et la Faculté polytechnique, elle comptera près de 5 000 étudiants.

La fusion des universités de Mons, c’était un peu l’Arlésienne à la sauce hennuyère. On en parlait beaucoup, depuis longtemps, mais on ne la voyait jamais venir.  » Le sujet était à l’ordre du jour depuis plus de quarante ans, raconte Calogero Conti, recteur de la Faculté polytechnique de Mons. La cinquième tentative aura été la bonne. « 

Tout vient à point à qui sait attendre… même si le recteur est encore un peu inquiet. Après de nombreuses discussions, le texte du décret a finalement été signé en seconde lecture par le gouvernement (PS-CDH) de la Communauté française, le 2 octobre dernier. Avant son inscription dans le marbre du Moniteur, le projet devra encore franchir le cap du Conseil d’Etat, qui a trente jours pour rendre son avis, puis celui du vote devant les parlementaires de la Communauté française. On comprend mieux l’inquiétude du recteur lorsque l’on sait que, à plusieurs reprises dans le passé, l’affaire semblait quasiment bouclée quand le destin en a décidé autrement. En 1977, la Chambre des représentants était dissoute le jour où elle devait décider de la création de l’Université du Hainaut, projet de regroupement de la Faculté polytechnique de Mons, de l’Université de Mons-Hainaut et de la Fucam… Autant dire que les turbulences communautaires qui secouent régulièrement le pays donnent quelques sueurs froides au recteur.

Cette fois, c’est le fameux décret de Bologne qui a servi de catalyseur à ce regroupement en voie de finalisation. En prévoyant, d’une part, d’harmoniser les cursus au niveau européen pour faciliter la mobilité des étudiants et, d’autre part, d’armer les universités pour résister à la concurrence internationale, le décret a réorganisé l’offre de formation universitaire en Communauté française. C’est ainsi que sont apparus les pôles académiques de Louvain (catholique, autour de l’UCL), de Wallonie-Bruxelles (laïque, autour de l’ULB) et de Liège (autour de l’ULg).

La fusion des universités sera-t-elle la solution miracle qui permettra à nos universités de résister à la concurrence internationale ?  » Pas seulement, précise Calogero Conti. Certes, le décret accentue l’esprit de compétition entre universités, notamment dans la recherche de pointe. Dans ce contexte, la fusion nous permettra de concentrer les ressources et d’atteindre une masse critique. Mais, outre la formation, l’université a également une mission de proximité : elle doit contribuer au développement économique et à la vie culturelle de la région. « 

C’est une bonne chose. La situation universitaire dans la province la plus peuplée de Wallonie n’est pas très reluisante. En matière d’accès des jeunes aux études universitaires, le Hainaut accuse un retard important. Chaque année en moyenne, seuls 17 Hennuyers sur 10 000 rejoignent l’université. Les jeunes du Brabant wallon sont 41 dans le cas, sur 10 000 toujours. Le Hainaut a été durement touché par la crise économique et, bien que l’accès à l’université se soit démocratisé, le facteur socioculturel pèse toujours lourd dans la réussite des étudiants.  » Présenter, dans le Hainaut, une offre universitaire plus large et la plus complète possible est une clé pour surmonter ce défi « , plaide Calogero Conti.

La nouvelle université de Mons regroupera donc six facultés : sciences appliquées, sciences, médecine-pharmacie, langues (via l’école internationale des interprètes, déjà intégrée dans le nouvel ensemble), gestion, et psychopédagogie. A terme, l’école d’architecture pourrait intégrer le nouvel ensemble et former une septième faculté.

Une fusion sur base géographique

Pour les étudiants, cela se traduira par une meilleure transversalité dans les cursus, c’est-à-dire que les formations d’ingénieurs civils intégreront, par exemple, des modules d’entrepreneuriat qui pourront aussi être suivis par des étudiants de la faculté de gestion. Parallèlement, deux nouveaux masters en sciences biomédicales et en politique économique et sociale vont voir le jour. La Fucam, bien qu’absente du projet de fusion, profitera également de cette nouvelle offre de formation en ouvrant des filières en information et communication, gestion des biens culturels et gestion des ressources humaines.

Une ouverture de l’offre d’enseignement que Mathias El Berhoumi, président de la Fédération des étudiants francophones (FEF), accueille avec satisfaction, même s’il la perçoit comme le cadeau bonus qui fait passer la pilule de la fusion, notamment auprès de la Fucam.  » La question de la fusion nous a toujours semblée secondaire par rapport à l’augmentation de l’offre d’enseignement « , déclare-t-il. Habituellement critique sur la logique des réseaux qui régit les académies, il reconnaît toutefois que cette fusion-ci est particulière.

 » C’est le seul projet qui se réalise sur une base géographique. On va rassembler deux institutions qui sont dans la même ville, sans doublon de formation. D’un côté, les sciences humaines et, de l’autre, les sciences appliquées.  » Pas de franche hostilité donc, mais pas de grand enthousiasme non plus. Le projet a pourtant été voté à l’unanimité des conseils d’administration des deux établissements, dans lesquels les étudiants sont représentés à hauteur de 20 %.

Reste que certaines questions sont encore sans réponse. Si la fusion des universités vise à accroître le nombre d’étudiants hennuyers, l’Université de Mons disposera-t-elle de moyens supplémentaires pour garantir l’accueil des nouveaux venus ? L’offre de logements pour les étudiants sera-t-elle suffisante ? Ces interrogations se feront plus pressantes au fur et à mesure des changements qui doivent encore intervenir dans le paysage universitaire montois. En 2010, en effet, la Fucam, qui a finalement choisi le pôle académique de Louvain, devrait renforcer ses liens avec les partenaires de cette académie. A Mons, comme ailleurs en Communauté française, les fusions universitaires risquent de réserver encore quelques surprises…

Ol. H.

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