Un chercheur d'or pénètre dans la mine de Zuunlud. Depuis sa fermeture en 1990, le propriétaire en autorise l'accès à quelques ninjas, contre rémunération. © SAMMY BILLON/ZEPPELIN

L’or des ninjas

Démunis face à une situation économique catastrophique, de nombreux Mongols en sont réduits à s’improviser orpailleurs. Une pratique harassante et souvent dangereuse.

Les Mongols ont beau être assis sur un tas d’or, ils n’en ont pas moins subi de plein fouet le passage à l’économie de marché en quittant l’orbite de Moscou. Dans la foulée de la fin du capitalisme, les privatisations bâclées et la corruption ont dévasté le secteur industriel. Le chômage a poussé de nombreux citadins à s’exiler à la campagne pour se lancer dans l’élevage, sans expérience aucune. En une décennie, le cheptel est ainsi passé de vingt-six millions de têtes à trente-trois millions, mettant à mal la résilience écologique des meilleurs pâturages.

Résultat : en 1999, 2000 et 2001, lorsqu’une série d’étés secs suivis d’hivers plus rigoureux qu’à l’habitude a provoqué la mort de quelque onze millions de bêtes, les néo-agriculteurs, démunis, ont une fois de plus dû retrousser leurs manches pour survivre. Parmi ceux-ci, certains se sont alors mis à chercher de l’or, malgré leur réticence culturelle à  » blesser  » la terre. Aujourd’hui, dans le district de Mandal, ils sont plusieurs dizaines de milliers à piocher au quotidien. Une ruée vers l’or qui relève moins de l’utopie que du pragmatisme.

Ceux que l’on surnomme les ninjas creusent souvent en famille, simplement équipés de pelles et de bassines. Car si les mines industrielles exploitent déjà plus de 78 000 hectares dans des zones alluviales aux quatre coins du pays, leurs méthodes d’extraction et de lavage, souvent médiocres, ne permettent pas de récolter plus de 60 % du précieux métal contenu dans le sol. Autant d’opportunités pour les ninjas, qui en récupèrent les miettes. D’autres orpailleurs, moins nombreux, préfèrent s’attaquer aux roches dures, loin des rivières et des grandes compagnies minières. Une filière autonome que la police ne voit toutefois pas d’un bon oeil, contraignant les ninjas à agir dans la clandestinité, dans des conditions toujours plus dangereuses.

Ankhaa fait une offrande de lait aux bouddhas, dont les mineurs les plus croyants invoquent la protection lors de leurs quêtes périlleuses.
Ankhaa fait une offrande de lait aux bouddhas, dont les mineurs les plus croyants invoquent la protection lors de leurs quêtes périlleuses.© SAMMY BILLON/ZEPPELIN
Les orpailleurs creusent souvent en famille et vivent en communauté.
Les orpailleurs creusent souvent en famille et vivent en communauté.© SAMMY BILLON/ZEPPELIN
Badaa et Tuugii inspectent leur
Badaa et Tuugii inspectent leur  » récolte  » du jour.© SAMMY BILLON/ZEPPELIN
Il y a trois ans, après avoir perdu son emploi à Oulan-Bator, Ankhaa a dû trouver un nouveau moyen de subsistance. Il est devenu ninja.
Il y a trois ans, après avoir perdu son emploi à Oulan-Bator, Ankhaa a dû trouver un nouveau moyen de subsistance. Il est devenu ninja.© SAMMY BILLON/ZEPPELIN
Ces orpailleurs cherchent des restes d'or dans une ancienne réserve d'eau ayant servi au lavage du minerai.
Ces orpailleurs cherchent des restes d’or dans une ancienne réserve d’eau ayant servi au lavage du minerai.© SAMMY BILLON/ZEPPELIN
Aucun boisage ne stabilise les galeries, dont les éboulements sont fréquents.
Aucun boisage ne stabilise les galeries, dont les éboulements sont fréquents.© SAMMY BILLON/ZEPPELIN
La mine de Naran est située sur le versant d'une montagne. Tous redoutent d'y descendre, car les accidents y sont nombreux.
La mine de Naran est située sur le versant d’une montagne. Tous redoutent d’y descendre, car les accidents y sont nombreux.© SAMMY BILLON/ZEPPELIN
Tuugii et son gendre, Ankhaa, questionnent un chaman :
Tuugii et son gendre, Ankhaa, questionnent un chaman :  » Faut-il retourner dans la mine de Naran malgré les descentes fréquentes de la police, ou se tourner vers des terres plus dangereuses ? « © SAMMY BILLON/ZEPPELIN

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