L’art est sérieux. L’enfant aussi

Guy Gilsoul Journaliste

La nouvelle exposition imaginée par Laurent Busine et le service éducatif du Mac’s s’adresse aux enfants. Enjeux et stratégies.

Depuis sa création voici dix ans déjà, multipliant les initiatives, le Mac’s fait du jeune public un public à part entière. De son côté, son directeur, Laurent Busine, songeait depuis quelques années déjà à orchestrer, pour les enfants, un parcours très particulier à travers l’art contemporain. Encore ne fallait-il tomber ni dans la démonstration ludique et superficielle, ni dans l’énonciation fastidieuse. Et puisque l’art ne relève pas seulement du savoir mais reflète et chevauche l’expérience de la vie, Le Grand Atelier tente de réveiller chez le jeune spectateur son propre vécu et, pourquoi pas ?, l’ouvrir à d’autres possibles. Tout se joue, avec la complicité des animateurs, sur un va-et-vient de questions et de réponses partant de l’observation, du souvenir et de l’échange. L’art côtoie le réel, les £uvres anciennes voisinent les images du passé, le document accompagne la fiction. Si on retrouve, en nombre, des £uvres appartenant au Mac’s, d’autres proviennent par exemple du musée d’Histoire naturelle de Mons. Ainsi, l’ensemble d’animaux empaillés, les uns très communs (la poule, le coq, le canard), les autres plus intrigants (la musaraigne, la taupe ou cette tête de crocodile, qu’à l’époque des croisades on prenait pour un dragon).

Entre les £uvres d’art se faufilent des squelettes, une collection d’£ufs ou encore des nids d’oiseaux. Dans ce cas, ils sont mis en rapport avec un ensemble de dessins de  » maisons  » signées Magritte. Pourquoi ce dernier a-t-il placé l’une d’elles au haut d’un arbre ? Pourquoi dans un autre dessin l’a-t-il mise sous une cloche de verre ? Que signifie une maison pour un enfant ? Comment apparaît-elle dans ses jeux, ses rêves, voire ses cauchemars ? Des proximités ainsi créées entre les £uvres et les  » objets  » surgissent des paroles enfouies ou nouvelles. Du coup, l’artiste perd de son inaccessibilité. Il ressemble aux enfants. Comme eux, il a parfois peur. Il appréhende le temps qui passe ou se souvient de celui où il était  » petit « . Comme dans un petit film réalisé par un instituteur de la région qui donne à un enfant l’occasion de parler (avec quelle sensibilité) de son grand-père. Plus loin, une peinture de Fautrier (1923) offre l’image d’une vieille dame à laquelle répond une photographie bistre d’une petite fille photographiée à la fin du XIXe siècle par Julia Cameron. D’où venons-nous, où allons-nous ? La question ne hante pas que les adultes. Dans une autre partie de l’exposition, la présence de petits tableaux de dévotion réveillent, sous l’apparence de la Vierge et du petit Jésus, l’importance que revêt l’amour entre la mère et son enfant.

Puisque l’exposition s’adresse aux enfants, certains accès exigeront des adultes qu’ils se fassent tout petits afin, qu’à leur tour ils se souviennent du temps où ils étaient enfants. Parfois, l’art nous rappelle à l’ordre.

Le Grand Atelier. Traité de l’admirable diversité de la vie et du monde à l’usage des enfants. Mac’s. Site du Grand Hornu, 82, rue Sainte Louise, Hornu. Jusqu’au 3 juin. Tous les jours, sauf le lundi, de 10 à 18 heures. www.mac-s.be

GUY GILSOUL

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