Goetz, l’enfant de l’art

Ce romancier atypique signe le troisième volet des aventures d’une jeune conservatrice de musée. Un milieu qui n’a pas de secrets pour lui.

Il s’habille avec un chic fou – tantôt costumes sur mesure, tantôt casual, souvent chaussé de Weston -, mais rechigne à se déshabiller : Adrien Goetz, né à Caen en 1966, visage poupin et regard rieur, est moins prompt à parler de lui qu’à montrer sur son iPhone les photos des dernières £uvres qui l’ont enthousiasmé, découvertes au hasard de ses pérégrinations.  » J’aime bien visiter des expositions inattendues, des petits musées de province méconnus « , reconnaît cet esprit curieux, maître de conférences en histoire de l’art à la Sorbonne, qui signe chaque jeudi une chronique dans le quotidien français Figaro, tant pour faire partager ses coups de c£ur que pour dénoncer des scandales liés au monde de l’art. Assurément, notre homme y est aussi à l’aise qu’un poisson dans l’eau, et consent in fine à confier que cette passion lui vient de ses parents, profs tous les deux, grands lettrés. Résultat, le jeune Adrien suivra une prépa littéraire à Louis-le-Grand, deviendra normalien avant de bifurquer vers l’art avec une thèse de doctorat portant sur la période romantique.

Si cet agrégé d’histoire signe des ouvrages  » avec des notes en bas de page « , collaborant notamment à l’édition en Pléiade des Ecrits sur l’art d’André Malraux, il adore aussi conjuguer l’art et la fiction. Et se révèle pétillant, caustique, divertissant, érudit sans être barbant. Grand admirateur d’Ingres, il lui consacre son deuxième roman, La Dormeuse de Naples, prix des Deux-Magots et prix Roger-Nimier en 2004, qui le révèle au grand public.

Après Intrigue à l’anglaise, sur les traces de la tapisserie de Bayeux, puis Intrigue à Versailles, qui se déroule au sein même du château, voici Intrigue à Venise, le troisième volet des aventures de Pénélope Breuil, assistée par son excentrique fiancé, le journaliste Wandrille – prénom inspiré par une aventure d’Arsène Lupin, La Comtesse de Cagliostro.

Pénélope, conservatrice délurée, à peine trentenaire, est invitée à un colloque savant dans la Sérénissime lorsque survient le meurtre d’un homme de lettres français. Très vite, une menace pèse sur tous ces  » écrivains français de Venise « , de Philippe Sollers à Jean d’Ormesson, en passant par Charles Dantzig – le propre éditeur d’Adrien Goetz chez Grasset ! Et ce dernier de s’amuser comme un petit fou à nous entraîner sur la piste d’un mystérieux tableau de Rembrandt, dans une énigme liée au fameux  » bal du siècle  » de Carlos de Beistegui, en son palais de la lagune en 1951.

 » J’ai toujours un regard un peu « patrimoine » « 

Non content de ressasser avec malice tous les clichés sur Venise, d’épingler aussi certains de ses chantres, Adrien Goetz nous en apprend de belles, encore une fois, sur l’histoire de l’art.  » J’ai toujours un regard un peu « patrimoine », car la conservation des £uvres du passé me semble primordiale, admet celui qui fut le directeur adjoint de l’Ecole nationale du patrimoine. J’ai vu défiler plusieurs générations – méritantes – de conservateurs.  » Un métier qui ne le tente pas pour autant, bien qu’il soit membre actif de l’ONG Patrimoine sans frontières.  » Je me situe davantage du côté de l’enseignement, j’aime faire découvrir « , explique-t-il, ravi d’affronter des amphis bondés de 250 étudiants.  » Une fois toutes leurs copies corrigées, la rêverie vient, j’écris la nuit. J’ai en tête encore quatre idées d’aventures pour Pénélope.  » A la bonne heureà artistique.

Intrigue à Venise, par Adrien Goetz. Grasset, 313 p.

DELPHINE PERAS

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