Glamour, toujours

Dix ans ont passé depuis la mort de la princesse Lilian. Annoté par sa fille cadette, Esmeralda de Belgique, le livre joliment illustré de Patrick Weber en dresse un portrait sans fard.

Un jour de 1937, Léopold III, déjà veuf d’Astrid, est frappé par son extraordinaire beauté, au golf du Zoute : waouw, une Cord aux courbes magnifiques ! La voiture appartient à une certaine Mary Lilian Baels, qui vient juste de se l’offrir après avoir remporté… 72 fois sa mise, en jouant à deux reprises le zéro au casino. Ainsi débute, sur fond d’auto, la romance de Lil et Léo. C’est la reine Elisabeth, la mère du roi, qui a directement poussé à la roue, en incitant son fils à courtiser cette jeune élégante née à Londres vingt et un ans plus tôt, sixième enfant (sur huit) d’Henri Baels, le gouverneur de Flandre occidentale. Un mariage religieux (à la sauvette) a lieu avant le civil, célébré, lui, le 6 décembre 1941. Aïe, très mauvaise époque ! Comme l’affirme Patrick Weber, écrivain, journaliste et spécialiste des monarchies,  » dès le début, tout est scellé  » : et l’amour et le glamour, et, surtout, l’indépassable malentendu qui liera les Belges à celle qu’ils considèrent comme la  » gouvernante intrigante des enfants royaux  » (Joséphine-Charlotte, Baudouin et Albert), ce qu’elle ne fut pourtant jamais.

Cette quasi-biographie, qui ne vise pas entièrement à réhabiliter Lilian, femme exigeante, peu diplomate et aux goûts très sûrs d’un luxe très grand, insiste sur l’étonnante décennie 1950-1960 du couple où, après l’abdication de Léopold, son fils aîné, le petit Baudouin, nouveau roi, part chaque matin remplir son boulot de souverain et rentre tous les soirs à Laeken, entre papa et belle-maman, véritable star de cinéma qui, sous ses faux airs d’Ava Gardner, fait alors la Une des magazines. 1960 marque la rupture : avec le mariage de Baudouin et Fabiola, la princesse de Réthy perd son statut de Première dame. Dans son exil doré à Argenteuil, elle mordra sur sa chique, comme d’habitude.

Après, on la retrouve morose, comme secrètement affligée d’être condamnée à son monde de futilités. A cheval, à ski, à la chasse, où elle s’habille toujours d’une jupe de peau de cerf, été comme hiver. En voyage aux quatre coins de la planète, la cigarette au bec. Mais la fin est triste. Profondément dépressive après la mort de Léopold, Lilian fera, à 80 ans, une mauvaise rencontre dans les bois : un dix cors bramant, très en colère, l’y laissera pour morte. On ne la verra pas aux noces de Philippe et Mathilde, où elle est pourtant invitée. Trop âgée, pas envie, peur des caméras… Lilian décède le 7 juin 2002 à Waterloo, sans avoir réglé ses comptes, sans avoir véritablement réussi à changer son image – un comble, pour celle qui la soignait tant.

VALÉRIE COLIN

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