Gays, gays, marions-les !

A l’approche de l’investiture de Barack Obama, la controverse sur le mariage homosexuel prend de l’ampleur aux Etats-Unis.

La question du mariage homosexuel s’invite dans l’agenda, déjà bien rempli, de Barack Obama. Le 20 décembre, les Américains, toutes préférences sexuelles confondues, étaient invités à envoyer une carte postale au futur président pour exiger que tous les citoyens puissent convoler. Cette poussée de colère a été provoquée par la Proposition 8, le référendum qui, le 4 novembre, a banni de Californie le mariage de couples gays – un droit acquis de haute lutte, en mai, devant la Cour suprême du même Etat.

Depuis, les actions de protestation, initiées par la communauté gay, se sont multipliées. Ainsi, le 10 décembre, des dizaines de milliers d’hommes et de femmes à travers le pays ont déserté leur bureau ou fermé leur commerce pour un Day Without a gay (Jour sans gay).  » Cette initiative a joué un rôle pédagogique, souligne Richard Rothschild, entrepreneur de New York. Si l’homophobie naît de la peur et de l’ignorance, alors il est bon que les gens découvrent, à l’occasion, que le prétendu ennemi est leur voisin de bureau. « 

Parti de Californie, le débat a donc pris une ampleur nationale dans un pays où la situation varie selon les Etats. A ce jour, 30 d’entre eux interdisent formellement le mariage homosexuel. Seuls le Massachusetts et le Connecticut l’autorisent, tout aussi formellement, depuis quelques années. Les autres ne se sont pas prononcés.

En mai, la Cour suprême de Californie avait statué que  » l’orientation sexuelle d’un individu ne constitue pas une base légitime pour dénier ou surseoir à ses droits légaux « . Un argument antidiscriminatoire, tacitement admis, aujourd’hui, par une majorité d’Américains, et qui pourrait bientôt convaincre d’autres Etats, comme le New Jersey, de sauter le pas à leur tour.

Pour Obama, pas question de risquer le réveil de l’ultradroite

Pour contrer à la fois cette évolution des mentalités et la décision de la Cour suprême de leur Etat, les promoteurs californiens de l’interdiction du mariage gay ont joué sur la peur lors du référendum. Ils ont prétendu que la  » sensibilisation à l’homosexualité  » et l’apologie des unions de même sexe allaient faire leur entrée dans les programmes scolaires. Ce mensonge a émoussé la tolérance légendaire des Californiens et contribué à l’adoption de la fameuse Proposition 8 à une majorité de 52 %.

Barack Obama ne pourra donc pas éviter ce débat de société. Pendant sa campagne, il avait déclaré qu’à ses yeux le mariage ne pouvait lier qu’un homme et une femme. Pour autant, il s’était gardé de remettre en cause les droits civiques des homosexuels. En clair, aux juges de trancher… Pas question, pour lui, de rééditer l’erreur de Bill Clinton qui, dès son arrivée à la Maison-Blanche, en 1993, avait réveillé l’ultradroite en exigeant l’intégration officielle des homosexuels dans l’armée.

Obama sait aussi que le mouvement gay a changé depuis cette époque. Plus pragmatique, soutenu au Congrès par des élus ouvertement homosexuels, comme l’influent représentant du Massachusetts, Barney Franks, il mise avant tout sur la prise en compte des couples homosexuels dans les nouvelles législations sur l’emploi ou l’assurance médicale. Signe que les temps changent, le défilé inaugural du président, le 20 janvier, inclura, pour la première fois, une fanfare de  » gays, lesbiennes et transsexuels « .

Philippe Coste

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