Gavalda et son coup de fleur

La romancière signe la préface du Jardin enchanté de Maria Hofker, un livre culte pour les amoureux des plantes. Explications.

Le Vif/L’Express : Grâce à votre persévérance, Le Jardin enchanté de Maria Hofker, de Marie-France Boyer, paru en 1988 et épuisé, est réédité. D’où vient cette passion ?

> Anna Gavalda : Ce livre mêle l’amour de la nature, des fleurs et des plantes à des aquarelles et à des réflexions intimes. C’est une entreprise singulière qui va au-delà du simple goût des beaux jardins. La cinquantaine venue, Maria Hofker (1902-1999), artiste néerlandaise, loue une parcelle de jardin ouvrier de 17 mètres sur 16 dans la banlieue d’Amsterdam. Son intention est non pas de les posséder, mais de s’y exprimer. Chaque jour, elle vient cultiver sa parcelle et, petit à petit, elle modèle un jardin extraordinaire. Dans le même temps, elle s’oblige à écrire quelques vers. Ce sont de tels actes qui peuvent sauver le monde. La beauté offerte par l’artiste fait supporter la grisaille du quotidien, elle aide à tenir, à supporter le poids des années. Maria Hofker est pour moi un modèle. Et le livre est le témoignage de cette expérience unique.

Qui était Maria Hofker ?

> Elle était une peintre et une poétesse très connue aux Pays-Bas, une femme distinguée issue de l’aristocratie. Elle a passé une partie de sa vie en Indonésie et elle en a rapporté un grand amour de la culture asiatique, en particulier des haïkus, ces petits poèmes japonais. Maria Hofker était une femme très douée. Elle peignait, elle écrivait, elle jardinait ; elle était aussi une grande relieuse. Elle a réalisé une trentaine de carnets qui contiennent ses aquarelles et ses écrits. Ils sont conservés au Rijksmuseum, à Amsterdam, et au musée Teylers, à Haarlem.

Comment avez-vous découvert cet ouvrage ?

> J’ai repéré le Jardin enchanté de Maria Hofker, il y a cinq ou six ans, à la bibliothèque de Melun, où je vis. J’avais lu d’autres livres formidables de l’auteure Marie-France Boyer. J’ai eu un coup de c£ur pour celui-ci. Je l’empruntais régulièrement, même si c’était un peu fastidieux. J’aurais pu ne jamais le rendre, mais voler un livre dans une bibliothèque, ça, non ! Jusqu’au jour où les bibliothécaires ont décidé de le retirer du fonds sous prétexte qu’il n’était pas assez consulté. J’étais dans tous mes états. J’ai cherché à l’acquérir sur Internet. Un correspondant en demandait 500 euros, sans discussion possible. J’ai fini par adresser un courrier à l’éditrice, en la priant de republier ce livre magnifique. C’est chose faite, j’en suis ravie.

Vous aimez les jardins des autres. Avez-vous la main verte ?

> J’aime les jardins depuis toujours. Je ne m’occupe pas très bien du mien, je le laisse en friche. A vrai dire, je suis très partagée entre l’envie d’avoir un beau jardin, une belle pelouse, et le souci de laisser tranquilles toutes les petites bêtes qui y vivent. Désherber un jardin, le tondre, c’est détruire un écosystème. J’aime l’idée du  » jardin en mouvement  » chère à Gilles Clément, celle d’un jardin qui évolue naturellement. J’aime aussi la mentalité des jardiniers, qui n’aiment rien tant que s’échanger des boutures et des graines plutôt que d’aller dans les pépinières. Ces gens-là ont une jolie philosophie de vie. D’ailleurs, je souhaite qu’après ma mort on disperse mes cendres dans le potager du jardin du château de Miromesnil, à Tourville-sur-Arques, dans le pays de Caux. Là où est né Maupassant.

Le Jardin enchanté de Maria Hofker, par Marie-France Boyer, photos de Marijke Heuff. Ed. du Chêne, 127 p.

Propos recueillis par Delphine Peras

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