Doubler la capacité hôtelière en trois ans

Les hôteliers de la région de Mons-La Louvière s’inquiètent des chiffres d’une étude de développement touristique de la ville.

Dans son plan de développement stratégique du tourisme, l’échevin du Tourisme et de l’Expansion économique Nicolas Martin (PS) avance que  » la ville doit doubler sa capacité hôtelière pour être en mesure, demain, de répondre à l’évolution des besoins. Il ne s’agit pas seulement de faire face aux défis de notre projet de capitale européenne de la culture, mais de soutenir la croissance au-delà de 2015 « , indique-t-il. De fait, depuis 1995, le nombre de nuitées a quasi triplé, grimpant d’un peu plus de 50 000 unités à près de 140 000.  » La création d’infrastructures structurantes comme le futur palais des Congrès impose d’augmenter l’offre d’hébergement, poursuit l’échevin. Selon les normes internationales établies, une ville qui obtient la labellisation Unesco bénéficie d’une croissance de son tourisme de loisir de l’ordre de 30 %. La reconnaissance de notre beffroi, de notre Doudou et des minières de Spiennes dans le patrimoine de l’humanité ouvre donc de belles perspectives. Il faut attendre que les équipements touristiques que nous mettons en place soient opérationnels. Ce sera le cas à l’horizon 2015. « 

Les hôteliers des régions de Mons-La Louvière ne partagent pas cette analyse. Le groupement d’intérêt économique (GIE) qu’ils viennent de constituer pour porter les projets de leurs 14 établissements indépendants ou de chaînes [NDLR : représentant 90 % de l’offre pour un total de près de 500 chambres] font état de menaces pour leur secteur.  » Depuis deux ans déjà, nous travaillons à la mise en £uvre d’outils de gestion collectifs, de partage de données, de plans marketing, de formation et de communication communs, explique la porte-parole du GIE Sylvianne Coclet. Nous sommes prêts à jouer un rôle dynamique dans le cadre de Mons 2015, et surtout à être un acteur solide et fiable pour l’après-2015. Peu informés des stratégies développées par la Ville en vue de l’événement, nous craignons cependant que les retombées en termes d’hébergement et de tourisme ne soient surestimées. « 

Mons n’est pas Lille

En 1992, le projet de capitale européenne avait plongé le secteur hôtelier de Séville dans le marasme. A Albertville aussi, les JO d’hiver n’ont pas confirmé les promesses de développement des études.  » Si bien que 80 % des hôtels ont connu des difficultés « , affirme Didier De Weerdt, membre du GIE et ancien président du club hôtelier de Lille-Tourcoing, où il gère un établissement. Justement, la Ville de Mons est partie du modèle de Lille, capitale européenne de la culture 2004 pour établir son plan de développement,  » mais elle l’a fait sans prendre la mesure de contextes et de réalités très éloignés l’un de l’autre « , selon Didier De Weerdt.  » La population d’abord : 1,2 million d’habitants d’un côté pour une communauté urbaine très densifiée autour du c£ur de Lille et six fois moins à Mons.  » L’accessibilité ensuite.  » De puissants moyens de communication dans la métropole de Pierre Mauroy qui disposait d’une gare TGV/Thalys et d’un aéroport alors que Mons n’accueille que deux Thalys par jour, le matin et en soirée, et souffre d’une absence de navettes organisées avec les aéroports de Charleroi et Zaventem. Enfin, une conjoncture totalement différente. Depuis deux ans, la crise impose une baisse de régime à l’ensemble du secteur. Le taux d’occupation de nos établissements tourne autour de 64 % alors que le seuil de rentabilité s’établit à 60 %. Et il est très largement alimenté par le tourisme d’affaires.  » Pour les membres du réseau hôtelier de Mons-la Louvière, il faut également analyser le prix moyen des prestations vendues : 84 euros par nuit TVAC.  » Dans la mesure où cette dépense représente la partie la plus importante du budget du voyageur, nous sommes très loin de la fourchette de 180 à 250 euros présentée comme la recette potentielle d’un touriste d’affaires. « 

Quatre nouveaux projets

Les hôteliers s’inquiètent de l’importance des montants exprimés dans le plan de développement stratégique, ainsi que des ambitions communales pour l’expansion hôtelière.  » Tabler sur une croissance de séjours de 40 % là où Lille n’a fait que 25 %, c’est manquer de réalisme « , insiste Sylvianne Coclet. Le réseau hôtelier considère que l’on a déjà dépassé le point de déséquilibre avec les projets de nouveaux hôtels.  » A ce stade, des investisseurs portent quatre projets qui vont quasi doubler la capacité de l’intra-muros montois « , confirme Nicolas Martin, en soulignant qu’il s’agit pour certains d’opérateurs locaux.  » Dans le nouveau quartier de la gare Calatrava, la SNCB a prévu de lancer un marché de promotion pour la construction d’un complexe de 200 chambres de confort quatre étoiles à côté du futur centre de Congrès de l’architecte Libeskind. Il est aussi prévu d’aménager un hôtel de charme de 60 chambres rue de la Grande Triperie, un apparthôtel à la place du Parc et un Ibis style d’une centaine de chambres en face de la nouvelle gare.  » Ces chiffres inquiètent le GIE hôtelier. Ses membres rappellent que le secteur occupe près de 120 emplois à Mons et à La Louvière.  » S’obstiner à vouloir doubler l’offre actuelle, c’est les mettre en danger ! « 

DIDIER ALBIN

Le point de déséquilibre a déjà été dépassé avec les projets de nouveaux hôtels

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