Diplomatie marketing

Guy Verstraeten
Guy Verstraeten Journaliste télé

Depuis plus de vingt ans, une ASBL publique est chargée de vendre Namur à l’étranger, en précisant notamment les contours de l’identité locale. Mais elle va devoir assumer son ambition et, en matière d’hôtellerie par exemple, il reste beaucoup à faire.

Tapez Namur sur le plus célèbre moteur de recherche du Web. Vous tomberez, en tête de page, sur un titre explicite :  » Namur, capitale de la Wallonie – Namur Capitale « . Contrairement à Bruxelles, Liège ou Charleroi, l’aventurier du Net qui s’intéresserait à la ville mosane ne frappe pas directement à la porte du site de la ville. Sur Namur. be, il ouvre une véritable fenêtre touristique. Le hasard n’y est évidemment pour rien. Géré par l’ASBL NEW (Namur Europe Wallonie), ce portail d’entrée trilingue symbolise cette volonté locale de s’inscrire dans une dynamique de capitale. Parce que, comme l’admet lui-même Luc Arnould, qui dirige NEW,  » Namur n’a pas grand-chose d’autre à offrir que ce statut de capitale par rapport aux autres grandes villes wallonnes « . Au point, c’est de bonne guerre, de mettre l’accent tant que faire se peut sur cet aspect.

Le nouveau logo de la ville, dévoilé quasi vingt-cinq ans jour pour jour après l’officialisation de son nouveau statut, en joue :  » Namur Capitale – Le c£ur des Wallons.  » Une ambiguïté dans l’intitulé, qui oublie la Wallonie pour ferrer ses Wallons ?  » On s’est effectivement demandé si nous n’allions pas mettre « Namur – c£ur de la Wallonie », mais « c£ur des Wallons » nous a finalement semblé plus personnel. Par ailleurs, au début de l’existence de NEW, créée en 1988, nous jouions sur l’aspect « Namur, ville-province » « , explique Luc Arnould, commissaire international pour la capitale et tête pensante de NEW, une structure financée à 80 % par la Ville (budget total de 350 000 euros), présidée par le bourgmestre Jacques Etienne et composée de 450 membres, notamment des organismes économique, culturels, académiques et des entités locales du (tout) Grand Namur.  » Pendant une dizaine d’années, nous avons cherché à analyser ce que la ville réalisait en matière de relations internationales et ce qui lui manquait « , poursuit cet ancien diplomate, ingénieur de formation.

Une image claire

En gros, NEW a pour objectif d’encourager l’action internationale de la ville et de vendre Namur à l’étranger, Luc Arnould étant son diplomate-marketing manager en chef. Détail amusant : sur le site Namur. be, il est possible d’ouvrir une carte du monde sur laquelle est pointillée… la diaspora namuroise ! Et les lieux du monde où, foi de NEW, on connaît Namur. Mignon… mais surtout représentatif d’un état d’esprit d’ouverture au monde.  » Mettre Namur dans la tête du monde et mettre le monde dans la tête des Namurois « , voilà l’idée… En tissant à tout-va des réseaux dans des structures comme l’AIMF (Association internationale des maires francophones) ou le Réseau Sesame (qui regroupe des capitales régionales dans le monde). Mais également en organisant, par exemple, le dîner des ambassadeurs durant les Fêtes de Wallonie.  » Nous ne sommes pas les seuls à £uvrer pour que Namur soit reconnue plus internationalement, le BEP (NDLR. : Bureau économique de la province) contribue aussi à son rayonnement, comme la Chambre de commerce et d’industrie, la Jeune chambre internationale de Namur, l’université ou même de grandes entreprises présentes sur notre sol, comme Siemens ou Alcatel « , plaide encore Luc Arnould.

Le VRP namurois s’est vu confier une autre mission par ses commanditaires : assurer le secrétariat de la Commission Namur Capitale, composée de la Ville, de la Région (via son ministre-président Rudy Demotte et la présidente du parlement wallon Emilie Hoyos), de la Province (via son gouverneur Denis Mathen) et donc de l’ASBL, chargée de la gestion quotidienne et des propositions. Un travail sur une signalétique mettant en exergue son statut de capitale (sur le bord des routes notamment) fait partie des gros enjeux de cette commission qui, nous dit-on,  » à pour but principal d’assurer à Namur les moyens d’assumer son statut de capitale de la Wallonie. Ce qui revient à dire : pouvoir affirmer son identité en offrant au « monde » une image claire et de qualité « . La commission, via NEW, est également censée donner des impulsions :  » Prenez le site du Grognon : tout le monde admet qu’il vaut mieux qu’un grand parking, qu’il mérite d’être anobli. C’est là qu’une commission comme la nôtre peut jouer un rôle. « 

On manque de chambres

Il ne suffit pas de multiplier les échanges ou les jumelages pour emporter la mise internationale. Encore faut-il, quand on essaie d’appâter le touriste étranger, lui offrir de quoi rentabiliser son voyage. Soyons franc : sauf à considérer, comme le BEP, qu’un  » tourisme du calme et de la relaxation  » pourrait faire décoller le secteur dans la région, Namur en elle-même ne peut être sérieusement considérée comme une destination privilégiée pour un mini-trip de trois jours. Ce qu’elle a à offrir, hors période de festivals, est un peu maigre pour ne pas en avoir rapidement fait le tour.  » Quand nous « vendons » Namur à l’étranger, nous mettons l’accent sur le fait qu’il s’agit d’une capitale régionale européenne, d’une ville où la qualité de vie, liée à une structure et une mentalité de cité bourgeoise provinciale, est importante. Nous tablons également sur notre aspect ville ancienne, dominée par une citadelle, nous parlons de l’université et aussi des deux pôles culturels majeurs que nous avons à offrir : le cinéma, via des festivals comme le FIF ou Media 10-10, et le chant choral, qui est une marque de fabrique. Puis, le tourisme fluvial décolle bien. « 

Si Namur a des ambitions, elle devra de toute façon passer la cinquième pour garder une cohérence par rapport à ses objectifs. Prenons l’offre hôtelière, par exemple. La présidence belge de l’Union européenne vient, malgré elle, d’en faire la criante démonstration : capitale de l’une des trois Régions du pays, Namur n’aurait même pas pu envisager d’accueillir une réunion de plus de 120 personnes. Faute de place, notamment dans les hôtels. On ne compte en effet pas plus de 460 chambres d’hôtels en bord de Sambre. En 2009, on a dénombré 113 300 nuitées d’hôtel dans la ville, ce qui représente, grosso modo, entre trois et quatre fois moins de nuitées qu’à Liège, par exemple (toute proportion gardée par ailleurs).  » L’offre hôtelière est bonne à Namur, mais elle est largement insuffisante par rapport aux ambitions que l’on a pour la ville « , confie encore Luc Arnould, bien conscient que la tâche, à tout le moins, s’annonce ardue.

GUY VERSTRAETEN

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