» Des géniteurs grands, blonds, aux yeux bleus « 

La procréation d’enfants de  » pure race aryenne  » dans les Lebensborn est au c£ur même du fanatisme eugéniste des idéologues SS. L’historien allemand Georg Lilienthal, spécialiste du sujet, y voit le résultat d’une stratégie double :  » D’un côté, éliminer les êtres considérés comme « inférieurs », ce qui a conduit à l’extermination des juifs et des Tsiganes ; de l’autre, renforcer une supposée élite raciale en sélectionnant des géniteurs grands, blonds, aux yeux bleus. « 

En 1935, la première maternité de ce type est ouverte à Steinhöring (Bavière). Heinrich Himmler, qui rêve de fonder un Etat SS peuplé de 120 millions de Germains nordiques, place l’institution sous son autorité. La direction est confiée au colonel SS Max Sollman, administrateur en chef, et à l’Oberführer SS et médecin Gregor Ebner, chargé de la sélection. Le but est d’éviter 1 million d’avortements annuels, en permettant à de futures filles-mères d’accoucher en secret. C’est l’un des aspects les plus mystérieux du programme : les naissances ne sont pas déclarées à l’état civil, l’identité du père est cachée.

Les maternités accueillent des femmes enceintes de membres de l’ordre noir SS, éventuellement de cadres de la Wehrmacht et du Parti nazi. Les SS, en particulier, se doivent d’avoir une nombreuse progéniture, y compris hors mariage. Ces enfants sont  » offerts  » à Hitler et confiés à des familles d’adoption. Plus tard, ils constitueront l’élite d’un IIIe Reich censé durer mille ans…

Objets de multiples fantasmes,  » les Lebensborn n’étaient ni des haras humains ni des bordels, poursuit Georg Lilienthal. Ils prétendaient être des établissements modèles, exploitant du matériel génétique « . En 1940, on en compte 10 en Allemagne. D’autres sont créés durant la guerre : 9 en Norvège – sanctuaire supposé de la  » race nordique  » – 3 en Pologne, 2 en Autriche, 1 au Danemark, aux Pays-Bas, en Belgique, au Luxembourg et en France. Environ 9 000 SS-kinder (enfants SS) seraient nés en Norvège, presque autant en Allemagne, quelques centaines ailleurs.

Les responsables du Lebensborn, obsédés par le fait de récupérer le  » sang aryen  » disséminé en Europe, ont aussi kidnappé près de 200 000 enfants en Pologne. Ils furent placés dans des familles, envoyés au front ou contraints au travail forcé. En 1947-1948, Sollman, Ebner et leurs complices ont été jugés à Nuremberg, mais le tribunal allié n’a pas retenu le  » caractère criminel  » du Lebensborn : ils furent libérés à l’issue du procès. n

B. T.

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