Derrière nous, le cauchemar ?

Coup d’oeil dans le rétro 2001, année qui aura cumulé tous les handicaps. De la crise à la reprise, enfin ?

Le début du nouveau millénaire n’aura pas été de toute tranquillité. Economiquement, l’année 2001 reste marquée par une crise qui, pour la première fois, aura touché simultanément les trois grands blocs économiques mondiaux. Les Etats-Unis et le Japon se trouvent officiellement en récession. L’Europe évite pour l’instant le pire mais sa locomotive traditionnelle, l’Allemagne, est néanmoins malade.

La globalisation et l’interdépendance croissante des acteurs de l’économie mondiale jouent bien évidemment un rôle dans l’élargissement de la crise américaine à toute la planète. Aux Etats-Unis, le secteur industriel a été victime de la fin de l’engouement pour les nouvelles technologies et traverse une période de récession prolongée. A des stocks immenses sont venus s’ajouter les problèmes d’endettement de beaucoup d’entreprises du secteur, moins à même de financer leurs activités par l’intermèdiaire des marchés boursiers. La disparition des entreprises moins compétitives et l’augmentation en flèche du nombre de licenciements ont fini par contaminer l’ensemble de l’économie US, plongeant le moteur de l’économie mondiale en récession.

Ceux qui croyaient que l’Europe serait immunisée contre la crise américaine en sont pour leurs frais. L’Allemagne, première économie européenne, a été directement affectée par le ralentissement économique mondial. Fortement dépendant de son secteur industriel et de ses exportations, le pays est en première ligne. A sa décharge, la réforme fiscale censée augmenter le pouvoir d’achat des Allemands a été contrecarrée.

Au Japon, la crise est désormais endémique. En manque de réformes sérieuses et d’assainissement du monde financier, le pays traverse sa troisième récession en dix ans. Il n’était donc pas en mesure de supporter le ralentissement mondial.

Pas étonnant dans un tel contexte que les évolutions boursières 2001 soient uniformément dans le rouge (voir tableau). A noter cependant que, bien que la situation économique soit sensiblement plus préoccupante aux Etats-Unis qu’en Europe, les Bourses du Vieux Continent se sont pour la plupart moins bien comportées que Wall Street. Le manque de confiance vis-à-vis de la poltique monétaire menée par la Banque centrale européenne n’est vraisemblablement pas étranger à cet état de choses. Si l’intervention de la Fed américaine s’est avérée tardive, elle n’en a pas moins été musclée. Jamais la Réserve fédérale américaine n’avait modifié ses taux à onze reprises en un an !

Pour faire face au ralentissement, la Banque centrale européenne (BCE) a, comme son homologue américaine, procédé à des baisses de taux. Cependant entre l’obligation de contenir l’inflation et la volonté de soutenir l’économie européenne, la marge de manoeuvre de la BCE a été limitée. Les quatre baisses consenties pour un total de 1,5% ne pèsent pas très lourd face à une baisse de 4,75 % outre-Atlantique (de 6,5 % à 1,75 %).

La loi des profit warnings

Face au recul conjoncturel aggravé par les conséquences des attentats du 11 septembre, l’année boursière a été rythmée par les révisions à la baisse des résultats des entreprises à une cadence de métronome. Ainsi, le français Gemplus (-70,1% sur l’année) a émis pas moins de quatre mises en garde (profit warnings) en 2001 en raison d’un recul des ventes au secteur de la téléphonie mobile qui a mis sous pression chiffre d’affaires et marges bénéficiaires.

Comme souvent en période de crise, l’arme des restructurations et des licenciements a été dégainée pour tenter, parfois dans une atmosphère de panique, de mettre fin à l’hémorragie des résultats. Ces suppressions d’emplois ont touché en premier lieu les secteurs liés aux technologies. Le secteur des équipementiers télécoms a été particulièrement affecté par la baisse des commandes émanant d’opérateurs télécoms. Au final, Alcatel (-68,3%) se sépare d’environ 30% de ses effectifs tandis que Marconi (-94,2%) est aux portes de la faillite. En comparaison, à l’image de Telefonica (- 11,2%) ou même de British Telecom (-36,9%), les opérateurs télécoms limitent leur recul alors que leur endettement est souvent gigantesque, résultat de surinvestissements à des prix trop élevés (y compris le redoutable fardeau financier que constitue la téléphonie mobile de troisième génération UMTS dont la rentabilité future reste à démontrer).

Sans grande surprise, la baisse des marchés d’actions et le recul économique ont mis à mal la rentabilité du secteur bancaire. Les banques les plus touchées sont celles qui avaient développé ces dernières années, parfois à un prix élevé, d’importantes activités de banque d’investissement (conseils en fusion) et de marché (trading) à l’image d’ABN Amro (-25,3%) ou de Deutsche Bank (-10,7%). BNP Paribas progresse de 7,5% grâce à son activité banque de réseau et aux économies de coûts issues de la fusion.

Le secteur des assurances et réassurance, dans son ensemble, a subi une forte correction : déjà pénalisée par la chute des Bourses et la perte de crédits aux entreprises en faillite (l’américain Enron en est le plus récent exemple), le  » coup de grâce  » lui a été porté par la facture, encore incertaine, des attentats américains ainsi qu’en témoignent Axa (- 39%) et Münchener Re. (-19,7%). Corollaire à ces baisses de résultats dans le secteur financier : le marché n’a pas cessé de bruisser de rumeurs sur d’éventuels rapprochements, sans résultats importants pour le moment.

De son côté, le secteur pétrolier a connu une année 2001 en deux phases. Alors que les 6 premiers mois ont été de bonne facture grâce à un prix du baril stable, les 6 derniers ont été marqués par le recul des prix du pétrole, conséquence d’un relâchement de la discipline de l’OPEP et de la baisse de l’activité économique. Au final, les bénéfices des derniers mois sont sous pression. ENI a progressé de 3,5% sur l’année. Outre une exposition au marché du gaz (moins sensible à la conjoncture et prix moins fluctuants), l’italien était moins valorisé que ses concurrents.

Dans cette tempête, les secteurs plus défensifs ont tiré leur épingle du jeu. Les valeurs pharmaceutiques ont bénéficié du repli des investisseurs sur des valeurs aux résultats plus stables pour autant qu’elles présentaient un profil attractif. Cependant, l’expiration de brevets et le niveau de valorisation de la plupart des actions ont pesé sur la tendance. La faiblesse du portefeuille de produits en développement du suisse Roche (-18,2%) a précipité le cours à la baisse. De plus, la direction entretient le flou sur ses ambitions dans la consolidation future du secteur.

Les mêmes causes entraînant les mêmes effets, les secteurs de la distribution (Delhaize : +15,4%) et de l’alimentation, également aux profits plus stables, ont résisté à la tourmente. Au cas par cas, des exceptions surgissent. Ainsi, dans l’alimentaire, le plus gros recul est à porter à l’actif de Numico (- 51,2%), au profil plus risqué que ses concurrents, qui souffre de la chute des marges sur certaines activités aux Etats-Unis et d’une perte de crédibilité du management.

Stock picking et sélectivité

Depuis quelques semaines, les Bourses reprennent de la hauteur par rapport au creux de la vague de la fin septembre. Elles sont portées par l’espoir que nous avons atteint le point le plus bas de la conjoncture et par l’anticipation des effets des baisses des taux d’intérêt de part et d’autre de l’Atlantique. Cependant, nous prônons la prudence (sans excès). Si une reprise au second semestre 2002 est réaliste, son ampleur pourrait en décevoir plus d’un. Les autorités monétaires ont en effet déjà abattu l’essentiel de leurs cartes, et leur potentiel d’intervention est désormais limité. La sélectivité dans le choix des actions reste donc plus que jamais le mot d’ordre.

Ainsi, ce n’est pas parce que la Bourse de Milan et les actions technologiques ont le plus baissé l’année dernière qu’il faut se jeter sur les technos italiennes. Il y a là un raccourci qui pourrait provoquer de larges déconvenues. Il s’agit d’identifier les entreprises qui ont pris des options stratégiques prometteuses et mettre le potentiel de croissance de ces perles rares en balance avec le niveau de risque accepté par chaque investisseur et le cours de Bourse.

Budget Hebdo

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