Cureghem souffle un peu

Les chiffres de la criminalité devraient prouver que les renforts fédéraux, enfin dépêchés dans ce quartier défavorisé d’Anderlecht, contribuent à sécuriser la zone. Laquelle se dirige néanmoins vers plus de police de proximité.

Guy Verstraeten

A chaque fois que Cureghem vivait un gros incident, on venait nous voir. Pour nous faire tourner en rond. J’ai vu tellement de ministres de la Justice et de l’Intérieur se succéder et nous dire « oui, oui » que je ne connais même plus leur nom. Mais là, ça change enfin.  » Si le bourgmestre d’Anderlecht, Gaëtan Van Goidsenhoven, s’autorise une bouffée d’optimisme, c’est parce que le ciel semble s’éclaircir à Cureghem, quartier dés£uvré peuplé par 21 000 âmes. Emeutes, sac-jackings à répétition, racket, cocktail Molotov sur le commissariat de quartier en novembre 2009, etc. Et des gros titres dans la presse, comme si Cureghem symbolisait à lui seul la poussée de violence à Bruxelles…  » Dès que les caméras avaient fini de tourner, on nous oubliait. Puis vinrent les événements de fin 2009 et la question de la sécurité à Bruxelles est arrivée au sommet de la pyramide. A partir de là, les choses ont réellement bougé. Fin janvier 2010, à la suite d’une réunion tenue avec tous les acteurs concernés, le plan Octopus a été lancé et le procureur du roi a parlé de « tolérance 0 », mot qui ne vient pas de nous. Mais à ce moment, de vrais renforts de la police fédérale ont été dépêchés. Et les résultats sont là « , poursuit Gaëtan Van Goidsenhoven, un brin soulagé. Du côté de la zone de police Midi (Anderlecht, Saint-Gilles, Forest = 200 000 habitants), on l’assure d’ailleurs :  » Nous publierons les données prochainement mais on peut s’attendre à une baisse significative des chiffres de la criminalité à Cureghem « , assure la porte-parole. A prendre avec des pincettes et à voir sur pièces, mais l’optimisme y est…

Malgré ce nouvel élan manifeste, le jeune mayeur anderlechtois garde les pieds sur terre : on ne réglera rien à Cureghem tant que la pauvreté et le chômage y seront aussi implantés. Même si, insiste le libéral,  » il est indispensable qu’une certaine normalisation s’installe en matière de sécurité, sans quoi un travail social est difficile : si on implante quelque chose de neuf, on se retrouve face à des déprédations ou des intimidations. On ne peut pas uniquement envoyer des ouvriers pour tout réparer. « 

Vers plus de police de proximité

Pour le moment, une dizaine de policiers fédéraux patrouillent en permanence dans le quartier. Un coup de main bienvenu, même si la volonté des autorités locales et de la zone Midi est de réorienter les moyens sur la police de proximité. Notamment en créant deux divisions pour la commune d’Anderlecht et en implantant, à terme, un commissariat plus important à Cureghem. Cette même optique de proximité est à l’origine d’un projet pilote aux résultats probants : des équipes d’îlotiers circulent depuis quelques mois dans les deux autres communes de la zone, Saint-Gilles et Forest. A Cureghem, on souhaite également emprunter cette voie : la situation devrait se débloquer prochainement, même si la sélection des candidats ne se fait pas sans difficultés :  » Quand on lit dans sa gazette que Cureghem est une zone de non-droit, cela ne donne pas forcément envie d’y travailler. Il faut motiver les gens mais également trouver les bons candidats à ces postes d’îlotiers : être fin psychologue et avoir la fibre sociale est indispensable. Un jeune policier qui débarque à Bruxelles n’est pas l’idéal. Mais je ne cache pas que nous n’avons pas croulé sous les demandes « , lance encore Gaëtan Van Goidsenhoven, qui conclut, et c’est certainement la moindre des choses, sur une note d’espoir :  » Cureghem est moins foutu qu’il y a dix ans, le bout du tunnel est visible, le plus dur est passé.  » Difficile de souhaiter autre chose à ce quartier dont les forces vives ont trop souvent maille à partir avec le désespoir et le manque de perspectives.

GUY VERSTRAETEN

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