Christa Debeck, super-favorite de Dewael

Une instruction est ouverte à Bruxelles pour faire la lumière sur les manipulations qui ont entouré le parachutage d’une collaboratrice du ministre de l’Intérieur à l’Inspection générale de la police.

A cause de son profumo di donna, l’affaire Koekelberg a éclipsé le rapport du comité P. Le service de contrôle de la police y décrit le parachutage d’une collaboratrice du ministre de l’Intérieur, Patrick Dewael (Open VLD), à l’Inspection générale de la police fédérale et de la police locale (IGP). Pourtant, cette dernière affaire est très révélatrice des pratiques clientélistes qui avaient cours au cabinet Dewael et à l’IGP, tous deux travaillant main dans la main. Et Christa Debeck n’est pas la seule à avoir reçu un traitement de faveur. Deux autres membres du cabinet Dewael, Fred V. et Greet S., auraient également bénéficié de promotions surprenantes, voire irrégulières. Mais, pour Christa Debeck, les deux plus hauts fonctionnaires de l’IGP, Luc Closset et Guido Van Wymersch, ont pris de tels risques qu’ils se retrouvent, avec elle, au centre d’une instruction judiciaire dirigée contre X, ouverte à la demande du parquet de Bruxelles, sur la base de soupçons de faux et usage de faux.

Historique. De sa place d’observatrice privilégiée à la  » cellule stratégique  » de l’Intérieur, Christa Debeck, 43 ans, apprend qu’un poste de  » conseiller-auditeur  » – ouvert aux civils (cadre logistique de niveau A) – se libère à l’IGP. Elle se présente aux examens en novembre 2006, mais c’est l’échec. La commission de sélection, présidée alors par le n° 2 de l’Inspection générale, Guido Van Wymersch, la déclare  » inapte « . Le 30 novembre 2006, l’inspecteur général Luc Closset se fait fort de rassurer Patrick Dewael : sa collaboratrice n’a pas été retenue pour le  » team audit « , mais bien en qualité de  » chercheur-conseiller « . En réalité, ce poste n’existe pas encore. Il sera créé… le 7 février 2007. En interne, dans un courrier adressé le 6 mars 2007 à la direction de la gestion policière, Luc Closset écrit pourtant que Mme Debeck a été engagée comme  » conseiller-auditeur « . La  » vérité  » se situe entre ces deux affirmations : Christa Debeck a bel et bien été nommée  » conseiller-auditeur « , malgré l’avis négatif de la sélection, devenu positif suite à une intervention  » technique  » de Guido Van Wymersch. Elle a été immédiatement réaffectée à l’IGP comme  » chercheur-conseiller « , après que le poste de  » conseiller-auditeur  » est passé à la trappe.

Augmentations de salaire considérables

La suite est tout aussi fantaisiste. Le ministre de l’Intérieur demande, en effet, à la pseudo-lauréate de demeurer à son cabinet. C’est là qu’elle effectue son  » stage  » en vue d’accéder à son nouveau job. Lorsqu’elle intègre réellement les rangs de l’IGP, le 21 décembre, son boss, Luc Closset, omet de lui faire prêter serment. L’oubli est réparé le 11 avril, avec effet rétroactif au 1er décembre 2006.

Si l’affaire en était restée là, le grand public n’aurait jamais su qui était Christa Debeck ni que la pratique des  » fantômes de cabinet  » subsistait au sein d’un cabinet flamand. Mais la dame a visiblement de l’appétit. Elle insiste tant et si bien que Patrick Dewael décide, dans un arrêté ministériel (daté du 25 avril 2007), des augmentations de salaire considérables (de 16,24 % à 49,93 %) aux sept membres du cadre logistique de niveau A de l’IGP, dont elle fait désormais partie. Les syndicats, mais aussi le service juridique normalement intéressé, sont tenus à l’écart de l’élaboration de ce dispositif. D’où la grogne et les dénonciations. Questionné le 30 mai dernier par le député Josy Arens (CDH), le ministre de l’Intérieur en assumait encore la responsabilité et tentait de noyer le poisson. Les révélations du comité P ont fait perdre la crédibilité du ministre, mais pas son portefeuille. l

Marie-Cécile Royen

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