Charles Picqué :  » Gare au conflit civil ! « 

Olivier Rogeau
Olivier Rogeau Journaliste au Vif

Pour le ministre-président, Bruxelles, ville multiethnique, est à un tournant de son existence :  » Si le désespoir social et le repli communautaire s’accentuent, un conflit civil est à craindre. « 

C’est la douche froide ! Charles Picqué réalise que le refinancement progressif de Bruxelles prévu dans la réforme de l’Etat – environ 134 millions d’euros dès 2012 – risque d’être  » entièrement mangé  » par les efforts d’assainissements budgétaires et par le jeu des transferts de compétences entre le fédéral et les entités fédérées. Exemple : si le fédéral, résolu à se débarrasser des compétences dites  » usurpées « , renonce à financer la politique des grandes villes, Bruxelles perdra, selon le ministre-président, de 13 à 14 millions d’euros. Pour le patron de la Région bruxelloise, ce sujet est pourtant d’importance nationale :  » De graves problèmes sociaux dans la capitale auraient des conséquences sur l’image internationale de la Belgique. « 

A cet égard, la ville est confrontée, d’après lui, à deux défis majeurs : la sous-qualification des jeunes issus de l’immigration et les dérives du communautarisme.  » Bruxelles aborde un tournant de son existence, nous confie Picqué. Les années qui viennent vont être décisives, mais l’histoire des relations entre communautés s’avance masquée. Un conflit civil pourrait résulter de la désespérance sociale, faute d’emploi, et du repli des identités. D’autant qu’il est plus difficile d’affronter ces deux périls en pleine période de ralentissement économique, voire de récession. « 

Il faut, certes,  » continuer à faire de l’insertion sociale, poursuit Picqué. Mais sans être naïf : il convient aussi de surveiller étroitement les groupes les plus radicaux, savoir comment ils se développent, écouter ce qui s’y dit. Un certain radicalisme islamique, que je dénonce depuis longtemps déjà, s’organise en ville. De même, les émeutes récentes de Matonge, à Ixelles, provoquées par une frange de la diaspora congolaise ne sont pas un fait mineur. Des actes qui relèvent du droit commun se mêlent à des affirmations ethniques. « 

Le modèle britannique de développement séparé a montré ses limites, estime Charles Picqué. Le modèle républicain français d’assimilation aussi.  » A Bruxelles, je dis halte aux nouveaux flux migratoires. Dans le même temps, il faut continuer à appuyer les associations et réseaux de prévention, à financer des contrats de quartiers afin de combattre le sentiment d’abandon, à faire une place aux parlementaires issus de l’immigration. En outre, la réforme de l’Etat nous permettra d’utiliser plus de moyens pour la formation professionnelle des jeunes, trop souvent peu qualifiés et sans emploi. Mais je me demande si toutes ces initiatives suffiront pour éviter le pire ! « 

OLIVIER ROGEAU

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