Ceci n’est pas (encore) un cactus

On ne les savait pas si humbles. On ne les imaginait pas courbant si aisément l’échine, se faisant tout petits devant des  » bleus  » battant la mesure. Et Didier Reynders, Elio Di Rupo de suivre la cadence en respectant avec zèle le tempo imposé par Jean-Michel Javaux. Du jamais-vu en Communauté française ! C’est que passer sous les fourches caudines des Ecolos pouvait conduire tout droit au pouvoir. Une perspective irrésistible. La fin de la récréation sifflée par les verts, ne restait plus que le PS en piste, le MR ayant été expulsé sans autre explication ni commentaire. De bien jolies manières ! Mais la base avait parlé. A une majorité écrasante, le Conseil de fédération du parti écolo avait fait son choix, ce serait sans les libéraux, une pilule bien amère pour Reynders.

Place donc à l’olivier ! Javaux, Durant, Milquet, Di Rupo face à face. Prêts à tricoter ensemble un programme dicté par les vainqueurs du scrutin du 7 juin : bonne gouvernance, développement durable, solidarités, on connaît la chanson. Oui, mais… Déjà des voix discordantes se font entendre comme celles, cette semaine, d’auditeurs de la RTBF. Choqués ou en colère, ils n’ont guère ménagé le vice-président des verts, invité de Matin Première. Au c£ur de la polémique, l’alliance  » contre nature  » avec le PS, les  » affaires  » qui font tache et qui avaient justifié leur vote en faveur d’Ecolo. Normal. Si Javaux avoue une base électorale de 8 % d’irréductibles, les nombreux électeurs venus soutenir son parti aux dernières régionales ne sont-ils pas, aussi, des déçus du MR et du PS ? Un  » plus « , un bonus même. Mais qui flotte et peine à se fixer. Au premier faux pas, les voilà qui s’envolent pour se poser ailleurs. Comment les capter durablement quand on ne peut gouverner seul et que l’on doit nécessairement faire alliance avec l’ennemi d’hier, devenu l’ami d’aujourd’hui ? En s’engageant avec le PS ou le MR, Ecolo ne peut que  » trahir  » des milliers de sympathisants. Une douche froide après l’euphorie du 7 juin. L’inévitable prix à payer pour accéder au pouvoir.

Ce premier mécontentement allait avoir un effet immédiat sur le tandem Javaux-Durant. Le jour même, n’esquissait-il pas une subtile position de repli ? En cas de non-engagement du PS sur plusieurs de ses diktats, l’olivier pouvait virer cactus, prévenait-il. Les épines avant même le temps des fleurs… Les menaces précédant le premier compromis. Dur, dur dehors, doux dedans ? Pas sûr. Car rarement dans une négociation politique un parti aura autant pesé et soupesé les mots, les virgules, les adjectifs, les tournures de phrase. Peur des dérapages non contrôlés, peur de déplaire aussi. On a ainsi appris que les rencontres de l’après-7 juin entre partis  » avaient permis d’ouvrir la porte pour une discussion avec le PS « . Pas question de négociation donc, nuance ! Qu’en termes délicats ces choses-là sont dites ! On sait aussi que les points de convergence, les traits d’union, bref, les frêles passerelles avancées par les futurs partenaires n’ont été couchées, à ce jour, sur aucun document. Rien que du verbal ! Diable ! Si la confiance règne, elle repose sur des micro-signes bien discrets. Gare aux tours de passe-passe dont Di Rupo est le champion ! Et puis tresser des liens ténus avec astuce ne suffit pas. Les militants écolos veillent. Dans ce parti, ce sont eux qui détiennent in fine le pouvoir et pas les stars qui caracolent au sommet.

Aujourd’hui, Ecolo, CDH et PS ne sont pas (encore) séparés par un courant d’air froid. Mais les verts résisteront-ils au vent coulis chargé de perquisitions et autres faits divers dont certains élus du parti à la rose sont les  » héros  » ? Au dédain des vieux briscards socialistes qui, comme Daerden, n’ont pas dit leur dernier mot ? Et si – déjà ? – Javaux lorgnait, on n’est jamais trop prudent, une issue de secours ? Le  » grand vainqueur  » des élections n’agite-t-il pas bien souvent la possibilité d’un retour en ligne droite dans l’opposition ? Trois petits tours de piste et puis s’en vont ? Histoire de passer SON tour. Le temps pour le PS de nettoyer les écuries d’Augias, par exemple. Et si ceci n’était pas (encore) une vraie-fausse fiction ?

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