Benallal, fuyard en série

Celui qu’on surnomme le roi de l’évasion s’est de nouveau fait la belle. Portrait d’un fugitif qui n’a plus rien à perdre.

Il y a quelques mois, peu après son transfert de la prison d’Andenne vers celle d’Ittre, sa s£ur, Samira Benallal, nous avait prévenu :  » Ce changement de prison est un sale coup pour Nordin. Il ne va pas bien du tout. A Andenne, il suivait des cours en gestion commerciale. Cette fois, il semblait vraiment vouloir se réinsérer. Mais, depuis son transfert à Ittre, ses conditions de détention sont plus strictes. J’ai peur qu’il fasse une bêtise.  » Propos prémonitoires ? Nordin Benallal vient de réussir sa cinquième évasion. La plus spectaculaire.

Dimanche 28 octobre, en fin de journée, des complices ont pris en otage le pilote d’un hélicoptère dans le zoning de Nivelles. Puis l’un d’entre eux a fait atterrir l’engin dans la cour intérieure de la prison d’Ittre, pendant le  » préau « . Déséquilibré par un détenu qui s’y accrochait pour tenter de fuir, le biplace s’est écrasé au sol. Dans la confusion, Benallal s’est emparé d’une arme avant de s’enfuir, par la grande porte, en prenant des gardiens en otage. Une VW Golf, équipée d’un gyrophare bleu simulant un véhicule policier, l’attendait. Lors de sa précédente évasion, à la prison de Nivelles, il avait déjà profité d’un chahut organisé par d’autres détenus pour cisailler la clôture et grimper le long du mur haut de huit mètres, grâce à une corde lancée par des comparses qui l’attendaient à l’extérieur.

Benallal souhaitait-il réellement mettre fin à sa carrière criminelle, comme le prétend sa s£ur ? Son transfert à Ittre, en juin dernier, aurait été décidé après qu’un plan d’évasion eut été déjoué. Ce que l’intéressé a toujours nié. On sait aussi que l’administration pénitentiaire déplace les détenus à risque vers une autre prison pour contrarier leurs éventuels projets d’évasion. Quoi qu’il en soit, Nordin Benallal ne supportait pas le régime strict auquel il était régulièrement soumis. Il est d’ailleurs à l’origine d’un arrêt du Conseil d’Etat qui porte son nom : selon la haute juridiction, les mesures de sécurité particulières en prison doivent respecter le principe de contradiction et être strictement définies dans le temps.

A 28 ans, avec un solide casier judiciaire, Benallal a un triste avenir devant lui. Même si la dernière peine était automatiquement absorbée par la précédente infligée en assises, il ne pouvait espérer sa libération avant quinze, voire vingt ans. L’homme fait partie des détenus les plus lourdement condamnés de Belgique. Et son cas laisse augurer ce que pourraient devenir certaines prisons si le projet des peines incompressibles – voulu par l’orange bleue – se concrétisait. Les condamnés à de très longues peines, surtout lorsqu’ils sont jeunes, ressemblent souvent à des fauves en cage, prêts à tout pour s’échapper.

Benallal a montré ce dont il était capable. Lui qui est tombé à 17 ans dans la spirale de la délinquance, après un renvoi scolaire, a rapidement  » gravi  » les échelons de la criminalité. Il n’a jamais tué. Jusqu’ici. Il a néanmoins éborgné l’une de ses victimes et grièvement blessé l’un des deux policiers qui le poursuivaient le 12 août 2004.

Son parcours rappelle celui de Jacques Mesrine, dont la vie est actuellement portée à l’écran. Comme dans la vie, le film se termine mal. En raison des antécédents de Benallal, qui, ce 30 octobre, était toujours en cavale, les policiers, s’ils se sentent menacés, ne lui laisseront aucune chance. Le roi de l’évasion le sait. Il n’hésitera pas à tirer…

Thierry Denoël

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