Au nom des gueules noires

Issue de la bourgeoisie montoise, la famille de Fuisseaux a défendu les mineurs et la classe ouvrière avec véhémence. Jusqu’à devenir l’ennemie du patronat.

« Alfred, Léon et les autres membres de la famille nourrissaient un véritable idéal et défendaient les plus démunis, résume Jean de Fuisseaux, arrière-petit-fils d’Alfred. Ils ont joué un rôle important dans l’histoire de Mons, pour les mineurs et la classe ouvrière de la région et du pays. « 

La famille de Fuisseaux – cette orthographe semble historiquement la plus correcte, même s’il en existe trois pour le même patronyme – s’installe à Mons au xviie siècle. Au siècle suivant, Jacques-Joseph est maître-orfèvre et Ernest travaille comme orfèvre au Mont-de-piété.

Le fils d’Ernest, Nicolas de Fuisseaux, est avocat. Issu d’une famille bourgeoise, il s’intéresse au sort de la classe ouvrière, confrontée au chômage industriel. Elu au Conseil provincial de 1838 à 1852, il lutte contre la paupérisation de sa région et défend l’industrie minière lorsqu’il siège ensuite au Sénat dans les rangs libéraux. A partir de 1854, Nicolas se consacre à son entreprise de porcelaine, située à Baudour. Après sa mort, en 1857, l’un de ses enfants, Fernand, reprend la société.

Deux autres fils de Nicolas empruntent la voie tracée par leur père. Alfred et Léon, avocats, marquent le socialisme de leur empreinte. Le frère cadet, Alfred, grand orateur, défend gratuitement les mineurs et la classe ouvrière. Il obtient, pour des familles de mineurs décédés, une indemnisation à la suite d’un accident de travail, une première dans l’histoire belge.  » La véhémence d’Alfred dérangeait le patronat « , raconte Colette de Fuisseaux, son arrière-petite-fille. En 1875, il est condamné pour subornation de témoin, ce qu’il réfute, et s’exile en France.

Alfred revient à Mons et participe, avec Léon, à la fondation du Parti ouvrier belge (POB), l’ancêtre du PS, en 1885. L’année suivante, il publie Le Catéchisme du peuple, un ouvrage en faveur du suffrage universel, diffusé à plus de 200 000 exemplaires. Dans la même trempe, Léon écrit Les Hontes du suffrage censitaire, en 1887.

Exclu du POB en 1887, Alfred lance un parti dissident : le Parti socialiste républicain (PSR). Avec son frère, il organise des manifestations au chant de La Marseillaise. Alfred est à nouveau inculpé, cette fois dans le cadre du procès dit du  » grand complot « , en 1889, pour avoir porté atteinte à la sûreté de l’Etat. Il sera finalement acquitté. Les deux frères sont ensuite élus députés socialistes. Tous deux mourront ruinés.

L. Du.

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