Accords et désaccords mutualistes

L’appel à réformer notre  » cher  » système de soins de santé a fait réagir en sens divers les mutualités socialistes et chrétiennes d’une part, et les mutualités libres, d’autre part.

Les critiques exprimées dans ces pages il y a deux semaines par le Pr Erik Schokkaert (KUL et UCL) sur le manque d’efficacité de notre système de soins de santé basé sur la concertation et sur l’insuffisante responsabilisation financière des mutualités ont visiblement atteint leur cible. « Non, la réforme des mutualités n’est pas un tabou, mais il ne faut pas jeter le bébé avec l’eau du bain « , défendent en ch£ur Jean-Pascal Labille et Michel Jadot, respectivement secrétaire général et président de l’Union nationale des mutualités socialistes.  » Le système belge est certes complexe, mais il est efficace. Chaque mois, les instances de l’Inami prennent des décisions qui permettent à l’assurance-maladie de fonctionner, même en l’absence de gouvernement. Un second avantage du modèle de concertation est l’adhésion du terrain : les décisions sont mieux appliquées que si elles étaient imposées d’en haut.  »

La proposition du Pr Schokkaert de donner plus de pouvoir de gestion aux mutualités et d’avancer ainsi, même avec extrême prudence, vers un modèle de concurrence régulée ne trouve que très peu de grâce aux patrons des mutualités socialistes :  » Les Pays-Bas ont donné plus d’autonomie aux organismes assureurs, mais ils sont occupés à faire marche arrière après avoir constaté les dérives des mécanismes de marché.  » Du côté de la Mutualité chrétienne, le secrétaire général Jean Hermesse préfère lui aussi défendre un modèle de responsabilité collective :  » Des exemples aux Etats-Unis ou en Suisse démontrent par ailleurs que l’introduction de principes de concurrence ne débouche pas sur une meilleure gestion des dépenses globales, au contraire. « 

Responsabilité financière

Tout est-il donc parfait dans le système belge ?  » Bien sûr que non, il faut avancer sur des réformes, notamment revoir certains mécanismes de financement à l’acte médical, qui n’incitent pas à la responsabilité financière. Nous osons aussi affirmer qu’il y a trop d’hôpitaux en Wallonie, ce qui entraîne des comportements de surconsommation. Mais nous préconisons des mesures générales plutôt que la possibilité pour chaque mutualité de négocier des conventions en direct avec les prestataires de soins « , résument Jean-Pascal Labille et Michel Jadot. Un constat largement partagé par Jean Hermesse, qui estime que les mutualités assument déjà largement leur part de responsabilité financière, à travers leur rôle actif et  » raisonnable  » dans l’arbitrage des budgets de soins de santé notamment.

Au final, le débat fait clairement apparaître une divergence entre les deux  » grandes  » (près de 70 % des affiliés du pays) et les  » libres  » (quelque 2 millions d’affiliés), qui veulent aller un pas plus loin dans la réforme des structures :  » Nous ne voulons certainement pas d’un système concurrentiel, mais les acteurs ne sont pas assez incités à une meilleure gestion financière du système, si ce n’est par de petits mécanismes collectifs complexes. Nous plaidons pour l’introduction de mesures de performances des soins de santé, inexistantes dans notre pays, et pour que les mutualités puissent assumer une responsabilité financière directe sur des domaines bien précis, comme l’accom- pagnement des maladies chroniques,  » insiste Xavier Brenez, directeur général de l’Union des mutualités libres.

OLIVIER FABES

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