2015, c’est déjà demain

Michel Delwiche
Michel Delwiche Journaliste

Mons 2015 : le compte à rebours a commencé. Dans un peu plus de quatre ans, la capitale du Hainaut sera aussi la capitale culturelle de l’Europe, une occasion rare de se positionner sur la carte du monde. Mais quatre ans, c’est peu quand de nouvelles infrastructures doivent sortir de terre…

 » C’est très court, admet le bourgmestre Elio Di Rupo, et je ne vous cache pas qu’entre les cauchemars à répétition que me procure la situation politique au fédéral se glissent des cauchemars liés à Mons 2015. Je n’ai pas d’inquiétude sur le plan culturel, les choses avancent grâce à une équipe magnifique. Par contre les infrastructures, les conditions d’accueil, la stratégie de communication… Je vois très clair, et brique par brique nous y arriverons, mais je voudrais pouvoir m’y consacrer plus. En quatre ans, ce sont 300 millions d’euros qui vont être investis à Mons, 12 milliards de francs… On ne peut pas rater ça ! « 

Pour le bourgmestre socialiste, cette échéance 2015 sera le point d’orgue d’un travail de longue haleine, mûrement planifié depuis son entrée en fonction en 2001. D’abord le renouveau de la Grand-Place, carte de visite de la cité au même titre que le beffroi, lui aussi restauré. Mons a concentré les moyens obtenus entre autres de l’Union européenne sur cet objectif. Les façades datant du xvie au xviiie siècle ont été rénovées (et celle datant des années 1970 masquée), la surface a été épurée, le mobilier Horeca uniformisé, une fontaine installée…

 » C’est lui qui a décidé de tout, explique Savine Moucheron, chef de file CDH, c’est comme ça pour tous les dossiers à Mons : c’est lui qui a choisi les couleurs des façades, du beige au rouge ; lui qui a voulu un mobilier et des parasols sobres ; lui qui a voulu la fontaine.  »  » Une fontaine qui a coûté plus de 600 000 euros, qui ne fonctionnait pas correctement, et pour laquelle il a fallu débourser 20 000 euros de plus pour les réparations « , surenchérit Jean-Pierre Viseur, chef de groupe Ecolo, lui aussi dans l’opposition.

Concertation

 » La Grand-Place appartient à tous les Montois et aux visiteurs, pas uniquement aux riverains. C’est vrai, j’ai choisi les couleurs, revendique Elio Di Rupo, mais je l’ai fait après concertation. Pareil pour le mobilier : les restaurateurs ont choisi. Il devra d’ailleurs être renouvelé dans un an et je sais déjà ce qu’il faut. La fontaine, j’en ai fait le dessin, car la Grand-Place, immense, était trop minérale. En plus, il fallait laisser l’espace pour le Doudou. Mais les travaux ont été faits de façon médiocre, et il a fallu dix-huit mois de négociations pour aboutir. « 

Après la Grand-Place, la place de la Gare. Là aussi, les façades, qui ne manquent pas de charme, vont être restaurées. Mais c’est surtout la gare elle-même qui va être complètement changée (voir en page 107). L’actuelle sera démolie et remplacée par une  » gare-passerelle  » conçue, comme à Liège, par l’architecte Santiago Calatrava (dont le projet, insiste le bourgmestre, a été choisi à l’aveugle par un jury indépendant). Une gare-passerelle car elle reliera la ville historique à la ville  » nouvelle  » située de l’autre côté des voies, avec le centre commercial des Grands Prés (90 000 visiteurs par semaine), les 14 salles du complexe cinéma Imagix (ex-ImagiMons), le futur Centre de congrès (et l’hôtel qui devrait le jouxter), le centre de loisirs nautiques du Grand Large (et sa nouvelle piscine, qui sera inaugurée en mars)…

 » Lorsque je suis arrivé en 2001 à l’hôtel de ville, dit Elio Di Rupo, cela faisait dix ans que l’on parlait du projet d’un centre commercial aux Grands Prés, ce qui avait suscité une grande incertitude chez les commerçants du centre-ville. Cette légitime incertitude, nous l’avons levée, et le commerce montois s’en est trouvé mieux. Les investisseurs sont revenus. Pour preuve l’installation dans le piétonnier d’un MediamarktSaturn.  » L’option retenue, c’est le commerce de niche en centre-ville, et les centres commerciaux en périphérie : outre les Grands Prés, deux à Jemappes, un à Maisière, un à Ghlin… Et il reste de la place à Havré.

 » Quand Elio veut quelque chose, il s’en donne les moyens, constate Savine Moucheron (CDH), on ne peut pas dire qu’il ne pense pas à l’intérêt de la ville, mais c’est lui qui pilote tous les gros dossiers, pour lesquels il est allé chercher des subsides importants.  » En faisant jouer ses relations de président du PS ou de ministre d’Etat, en mettant en £uvre ses réseaux dans le monde économique ?  » C’est une caricature de dire que c’est Di Rupo qui est allé chercher les subsides, répond le bourgmestre. Nous avons constitué des équipes, avec les échevins, l’administration. Nous avons monté des dossiers, des dossiers sérieux, qui avaient du sens, et nous sommes allés les défendre pour obtenir des financements. Ce n’est pas pour mes beaux yeux que l’Europe nous a accordé des subsides, que la SNCB va construire une nouvelle gare, que Mons a été désignée Capitale culturelle 2015. Mons 2015, cela a été une bataille pied à pied. La moitié du jury international n’en voulait pas. Mais nous avons été soutenus par des personnalités comme Adamo, Dragone ou Calatrava, qui est venu tout exprès de New York pour rencontrer le jury pendant deux heures. « 

Mons 2015, c’est donc un projet culturel, qui va unifier l’offre des différents musées, des salles (Théâtre royal, Manège, Maison Folie…), et qui va mettre en valeur le pôle touristique montois : le beffroi de Mons est, avec d’autres, reconnu comme patrimoine mondial par l’Unesco, de même que le site néolithique de Spiennes, dont l’infrastructure d’accueil est insuffisante, et le Doudou, son cortège, ainsi que le combat de saint Georges contre le Dragon. Un centre d’interprétation de ce folklore unique sera installé dans l’ancien Mont-de-Piété.

Le titre de capitale culturelle, comme l’avait dit la socialiste française Martine Aubry pour Lille (qui l’a été en 2004),  » inscrit la ville sur la carte du monde, et fait gagner dix ans en image de marque « . Au cours des cinq dernières années, le nombre de touristes qui ont visité Mons est passé de 25 000 à 250 000 (dont la moitié de néerlandophones). L’objectif est de passer à plus de 500 000 après 2015. Mais la culture est aussi un prétexte pour enclencher un développement socio-économique. Mons a choisi comme thème pour 2015  » Where technology meets culture  » (là où la technologie rencontre la culture) : on ne saurait être plus explicite.

MICHEL DELWICHE

 » mons 2015 a été une bataille pied à pied « 

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