Viktor Orban et la droite européenne: retour sur une décennie de conflits

Le Vif

Le Premier ministre hongrois Viktor Orban bataillait depuis des années pour maintenir sa formation au sein du groupe du Parti populaire européen (PPE, droite) au Parlement européen. Jusqu’à ce mercredi, où « l’enfant terrible » hongrois de la droite européenne a finalement préféré claquer lui-même la porte.

La lune de miel

Le Fidesz, parti fondé en 1988, est membre du PPE depuis près d’un quart de siècle: il a rejoint la grande famille majoritaire de la droite européenne bien avant l’entrée de la Hongrie dans l’Union européenne (UE) en 2004.

Devenu Premier ministre en 1998 (jusqu’en 2002), M. Orban est aussi élu vice-président du PPE en 2002, un poste auquel il a été réélu à deux reprises (2006 et 2009) et où « il a fait preuve d’un profond engagement envers le parti et l’unité de la famille de centre-droit », écrit le PPE sur son site internet.

Premiers couacs

A son retour au pouvoir en 2010, Viktor Orban prend un tournant jugé autoritaire par Bruxelles et met en oeuvre de nombreuses réformes mettant en danger l’Etat de droit, selon la Commission européenne.

Dès 2011, le président du PPE Joseph Daul estime qu’accorder le droit de vote aux minorités hongroises à l’étranger, comme le prévoit M. Orban, ne serait « pas acceptable ».

Viktor Orban et la droite européenne: retour sur une décennie de conflits

Mais les eurodéputés PPE serrent les rangs face aux attaques de l’opposition. Les socialistes comme les Verts commencent à dénoncer leur « complaisance ».

Éloignement

L’année 2015 marque un tournant, Viktor Orban remettant en cause l’héritage de la construction européenne, en demandant par exemple le retour du débat sur l’abolition de la peine de mort ou en refusant l’accueil de réfugiés.

Le débat sur une exclusion de « l’enfant terrible » – comme le nommera Joseph Daul -, désormais applaudi par l’extrême droite, s’installe au sein de la droite sans jamais aboutir, notamment en raison du refus de la CDU allemande de s’associer à une telle démarche.

Viktor Orban (premier plan) et Jean-Claude Juncker
Viktor Orban (premier plan) et Jean-Claude Juncker © Reuters

En 2018, le Parlement européen dénonce la menace « systémique » visant les valeurs de l’UE en Hongrie et active une rare procédure, l’article 7, pouvant conduire à des sanctions sans précédent contre Budapest. 115 eurodéputés PPE votent pour la résolution, 28 s’abstiennent et 57 votent contre.

Divorce

Un an plus tard, la droite européenne sanctionne a minima Viktor Orban en suspendant sine die à une écrasante majorité (190 pour, 3 contre) le Fidesz, qui est privé de ses droits de vote. L’année dernière, 13 partis membres du PPE réclament son exclusion.

A l’automne 2020, le veto hongrois au plan de relance européen lié au coronavirus – depuis levé – a encore accru la tension.

Dans ce contexte, l’eurodéputé du Fidesz, Tamas Deutsch, met le feu aux poudres en comparant l’attitude du président du groupe parlementaire, l’Allemand Manfred Weber, à celle de la Gestapo, ce qui lui vaut des sactions en décembre.

Dans la foulée, le groupe parlementaire du PPE fait adopter mercredi une réforme des statuts qui permet la suspension, voire l’exclusion de délégations entières, et non plus seulement de parlementaires individuellement.

Viktor Orban et la droite européenne: retour sur une décennie de conflits

Viktor Orban prend acte et annonce le départ de ses 12 eurodéputés, dénonçant une « démarche hostile ».

Le PPE doit désormais se réunir pour décider de l’exclusion du Fidesz lui-même, réclamée par son président, le Polonais Donald Tusk, et par 13 partis membres, autour d’un noyau dur constitué par les pays du Benelux et des pays scandinaves.

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