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Vers une guerre civile au Kirghizstan ?

Le bilan provisoire des violences interethniques qui font rage dans le sud du Kirghizstan a atteint 97 morts et plus de 1.200 blessés. Au moins 32.000 adultes et des milliers d’enfants se sont réfugiés en Ouzbékistan voisin. Un couvre-feu de 24 heures a été établi.

Dans la nuit de jeudi à vendredi, des violences interethniques opposants des bandes de Kirghiz et d’Ouzbeks ont éclaté dans la région de Och. Elles se sont ensuite étendues à la région voisine de Djalal-Abad, créant de grandes tensions dans tout le sud de ce pays d’Asie centrale. Les relations entre la minorité ouzbèke (15 à 20% de la population du Kirghizstan) et les Kirghiz sont tendues depuis bien des années, notamment en raison de disparités économiques au détriment des Ouzbeks. De puissants groupes mafieux sont également actifs dans cette région.

L’état d’urgence a été prononcé dans ces deux régions touchées par les affrontements. Le ministère de la Défense a annoncé la mobilisation des réservistes et le début de « l’organisation de la mobilisation partielle de la population civile ». Il a, par ailleurs, ordonné à ses forces de « faire feu à volonté » pour endiguer les violences qui ont fait, selon un bilan encore provisoire, au moins 97 morts et plus de 1.200 blessés. Au regard de témoignages recueillis par l’AFP et de nombreux médias russes et kirghiz, le nombre de victimes pourrait être beaucoup plus important.

Conséquence de ces affrontements : les civils fuient le pays. 32.000 réfugiés adultes ont été enregistrés en Ouzbékistan, le pays voisin, la plupart accompagnés d’enfants que les autorités ouzbèkes n’ont pas pu comptabiliser, a déclaré à l’AFP un responsable du ministère ouzbek des Situations d’urgence, Abror Kossimov. L’agence RIA Novosti, citant une source au sein de ce ministère, fait elle état de 75.000 personnes déplacées. « Ils nous tuent tous, nous les Ouzbeks, les uns après les autres! J’ai fui, je ne sais pas ce qui est arrivé à mes enfants et mes petits-enfants », raconte Rani, 52 ans, qui a fui Och pour l’Ouzbékistan.

Signe que la situation se détériorait, un couvre-feu de 24 heures a été décrété à Och, deuxième ville du pays, et dans deux districts avoisinants. Cette mesure était auparavant en vigueur seulement la nuit. L’état d’urgence a aussi été étendu à l’ensemble de la région voisine de Djalal-Abad, bastion du président Kourmanbek Bakiev renversé en avril, où les violences se sont propagées samedi depuis Och.

Ces affrontements sont les pires violences depuis la révolte d’avril (87 morts) qui a chassé le président Bakiev et porté au pouvoir l’actuel gouvernement provisoire. Ils interviennent à deux semaines d’un référendum sur la nouvelle Constitution prévu le 27 juin. Des affrontements avaient déjà ensanglanté la région de Djalal-Abad en mai.

L’ex-président Bakiev, aujourd’hui réfugié à l’étranger, a assuré n’avoir aucun lien avec ces nouvelles violences. La communauté internationale et les ONG ont multiplié les appels au calme. De son côté, l’ambassade des Etats-Unis au Kirghizstan a fait part de « sa vive inquiétude » et appelé les parties « à renoncer à la violence ». La stabilité du Kirghizstan est primordiale pour Washington qui dispose d’une base importante près de Bichkek pour ses troupes en Afghanistan. La Russie, qui dispose également d’une base à Kant, dans le nord, y a dépêché un bataillon de parachutistes arrivé dimanche à bord de trois avions, afin de renforcer la protection des installations et du personnel militaires russes, selon une source russe citée par l’agence Interfax.

LeVif.be avec Belga

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