Mélanie Geelkens
Une sacrée paire de bourrelets
Seuls ses seins devraient bouger, mais son ventre et ses cuisses s’y mettent aussi. Remuant même davantage que les deux principaux intéressés. Celeste Barber s’en tamponne, ses 6,6 millions d’abonnés ont déjà tout vu de sa flasque anatomie.
Les tétons dissimulés par une pizza, une papaye, un haut de bikini trop petit. Les bourrelets sanglés dans une guirlande de Noël, des résilles trouées, une oppressante gaine couleur chair. L’air ridicule et, pourtant, ce n’est pas elle qui est raillée. Mais ces Kim Kardashian, Miley Cyrus, Rihanna et toutes ces belles qui frétillent solennellement de la poitrine pour bien montrer qu’aucune autre partie de leur corps ne frémit.
Elle a commencé ses parodies en voyant la vidéo d’une starlette qui s’extirpait gracieusement d’une piscine. » Voilà comment, moi, je sors de l’eau ! » envoya-t-elle à sa soeur pour rigoler, quelque part vers 2015. Puis, elle a posté un montage sur Instagram, et ainsi est-elle devenue vedette elle-même, bien plus qu’en jouant quatre ans dans une série télévisée australienne. C’était juste pour se moquer, hein, pas pour promouvoir » ces trucs de body positive. Non. Jamais. Nah. Oh, mon dieu. J’aurais aimé être si profonde « , reconnaît-elle dans Vogue. Militante, malgré elle. Ni parfaite, ni refaite, et pourtant exhibée. Hymne à la graisse, ode aux vergetures, gloire aux capitons. Appel aux normales à s’assumer : la beauté instagrammée, photoshopée, est peut-être admirée, mais ne reflète qu’une infime partie de la réalité. A son corps défendant, Celeste Barber soulève aussi le dilemme féminin de la chair. La cacher. La montrer. Boutonner jusqu’au cou, parce que nul n’écoute sérieusement celles qui exposent leur marchandise. Déballer jusqu’au cul, puisque tous veulent consommer ces morceaux d’elles.
Rabaisser. Enjoliver. Répugner les rasoirs, renier les soutifs, conspuer le mascara, refuser les brushings. Rembourrer les seins, peinturlurer les lèvres, raccourcir la jupe, plastifier les ongles. Imiter l’homme. Exagérer la femme.
Qu’elle doit être confortable, la vie en veston- cravate. Exister publiquement, au féminin, revient toujours à questionner la sexualisation de son apparence. La nier, l’assumer ou en jouer. Version féminisme prosexe, un mouvement dont accouchèrent les Etats-Unis dans les années 1980, qui prône la réappropriation du corps, son utilisation comme un outil au service de sa propriétaire. S’en servir, soi-même, pour ne pas laisser d’autres l’exploiter. Quitte à écarter volontairement les jambes. Autour d’une barre, comme la rappeuse américaine Cardi B, devenue strip- teaseuse à 19 ans. Dans des lits d’inconnus, comme l’auteure française et ex-jurée du prix Goncourt Virginie Despentes, ancienne prostituée revendiquée. C’est (aussi) ça que réclamaient certaines signataires de la tribune des 100, cette fameuse carte blanche publiée en plein #MeToo, résumée à Catherine Deneuve et à la liberté masculine d’importuner. Entre celles qui ont cédé aux Harvey Weinstein et celles qui leur ont résisté, admettre également celles qui ont sciemment couché. Pour le succès. Sans regret.
Celeste Barber, comme finalement celles qu’elle ridiculise, a choisi d’écarter les jambes sur un écran de smartphone. D’arborer ses seins, fussent-ils dissimulés par des papayes ou des pizzas. D’accentuer sa graisse, en la comprimant dans des gaines et des résilles. Elle vient de poser en couverture du Vogue australien, de publier un livre, de lancer une tournée de one-woman-show, d’animer une émission télé. Et de récolter, en cinq jours, plus de vingt-six millions d’euros auprès d’un million de donateurs pour soutenir les pompiers australiens qui tentent de maîtriser les funestes feux de forêt. Ce qui ne serait jamais arrivé sans ses bourrelets.
1.0Une sacrée paire de bourrelets !
Cette semaine, ma chronique dans @levif.be parle du corps des femmes. Et ce dilemme qu’on connaît toutes : qu’en faire ? L’assumer, le montrer, en jouer ? Ou le cacher, pour mieux être prise au sérieux ?
Réflexions autour de l’excellente @celestebarber et de son corps imparfait, qui lui permet pourtant de devenir célèbre.
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Girl power
Elle avait déjà posé son violoncelle dans le film The Revenant et composé la musique de la série télé Chernobyl. C’est aussi elle, Hildur Ingveldardóttir Guðnadóttir, qui a signé celle du Joker et qui vient de recevoir un Golden Globe pour la cause. La compositrice, violoncelliste et chanteuse islandaise est la première femme à obtenir cette récompense en solo. En septembre dernier, elle avait reçu un Emmy et elle est également nommée aux Oscars, qui seront décernés en février prochain. Vers le triplé ?
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ans seront nécessaires avant d’atteindre la parité économique dans le monde. » Aucun d’entre nous ne (la) verra au cours de sa vie, et il en sera probablement de même pour nos enfants. » Voilà, comme ça, c’est clair, selon une étude du Forum économique mondial. Publiée en décembre dernier, elle analyse les conditions sanitaires, éducatives, professionnelles et politiques des femmes dans 153 pays. Et pointe les trois fléaux féminins à combattre pour obtenir un accès égal aux opportunités économiques : l’automatisation des professions (qui touche principalement des métiers occupés par des femmes), l’accès à des postes à la croissance salariale élevée et le manque de structures de soins, qui oblige mères et filles à davantage de travail bénévole que pères et fils. » Soutenir la parité entre les sexes est essentiel pour garantir des sociétés fortes, cohésives et résilientes « , conclut l’étude. Pour ceux qui se demandaient encore à quoi ça servirait.
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