© AFP

Ukraine: opération militaire à Slaviansk, la Russie menacée de sanctions « sévères »

Le Vif

Barack Obama et Angela Merkel ont menacé vendredi la Russie de sanctions « sévères » en cas d’aggravation de la crise en Ukraine, où l’armée lutte -pour l’instant sans succès- pour le contrôle de Slaviansk, et où la situation se détériore à Odessa.

Le président américain a mis en garde Moscou contre de nouvelles sanctions « sectorielles », si l’élection présidentielle prévue en Ukraine le 25 mai devait être perturbée. »Nous sommes prêts et avons préparé une telle étape » (dite phase 3), a renchéri la chancelière allemande, en visite à Washington. Les pays du G7 avaient déjà annoncé le week-end dernier un renforcement de leurs sanctions à l’égard de la Russie, qu’ils accusent de déstabiliser activement l’Est de l’Ukraine.

L’Ukraine, en proie depuis des semaines à une insurrection armée pro-russe qui s’étend dans l’Est du pays, a lancé vendredi une opération militaire dans les villes de Slaviansk et Kramatorsk, perdant deux militaires et deux hélicoptères et s’attirant les foudres de la Russie.

Lancée aux petites heures de la matinée, l’opération s’est par la suite figée en un face-à-face sous tension, selon des journalistes sur place. Son succès paraissait incertain tard vendredi. »Les criminels ont essuyé de lourdes pertes: beaucoup de morts et de blessés, de nombreux prisonniers. Malheureusement, nous avons des informations sur deux morts et sept blessés parmi nos soldats », a déclaré le président ukrainien par intérim, Olexandre Tourtchinov dans une adresse télévisée à la nation.

Les rebelles ont pour leur part fait état d’un bilan de cinq morts.

Selon une porte-parole, les insurgés « ont perdu quatre à cinq postes de contrôle aux limites de la ville ». La Russie, que Kiev et l’Occident accusent de téléguider le mouvement pro-russe, a réagi avec virulence à l’annonce de l’opération militaire, qu’elle a qualifiée de « raid de représailles » et de « coup de grâce à l’accord de Genève » péniblement conclu à la mi-avril entre Moscou, Kiev et les Occidentaux.

« Les autorités doivent revenir à la raison et mettre fin au meurtre de leurs propres citoyens. Sinon, le pays pourra connaître un bien triste destin », s’est indigné le Premier ministre russe, Dmitri Medvedev pour qui « la responsabilité de la guerre contre son propre peuple revient à ceux qui prennent des décisions à Kiev ».

Pour le président ukrainien, Moscou est en proie à « l’hystérie » et a recours « aux menaces et à l’intimidation ». La Russie a répété son message vendredi devant le Conseil de sécurité de l’ONU, exigeant que Kiev « mette fin à ses opérations punitives » dans l’est de l’Ukraine, les Occidentaux rejetant pour leur part sur Moscou la responsabilité du regain de tension.Slaviansk fait partie de la douzaine de villes de l’Est ukrainien actuellement sous le contrôle des séparatistes pro-russes, mais la situation y est particulièrement sensible en raison de la présence dans la ville d’une équipe d’observateurs de l’Organisation pour la sécurité et la coopération en Europe (OSCE), retenus sur place par les rebelles depuis une semaine.

« Cette attaque à Slaviansk va retarder la libération des membres de l’OSCE », a estimé Denis Pouchiline, leader des séparatistes à Donetsk, la capitale régionale.

Les négociations pour obtenir la libération des 11 hommes (sept étrangers et quatre Ukrainiens) se trouvent dans « une phase très sensible », a averti vendredi à Berne le ministre allemand des Affaires étrangères, Frank-Walter Steinmeier.

Le Kremlin, pressé par les Occidentaux ces derniers jours d’intervenir en leur faveur, a annoncé vendredi avoir dépêché il y a plusieurs jours déjà un émissaire, Vladimir Loukine, pour participer aux négociations sur leur sort.

A Slaviansk même, la population, qui s’est réveillée au son du canon et du tocsin, a entrepris de se préparer, érigeant des barricades de fortune dans les rues. Des membres des groupes d' »autodéfense » en tenue de camouflage se sont déployés près de la mairie autour de deux blindés légers pris le mois dernier aux forces ukrainiennes.

Le maire autoproclamé de Slaviansk, Viatcheslav Ponomarev, a demandé dans un message vidéo aux « femmes, enfants et retraités de ne pas sortir de chez eux » et à « tous les hommes armés d’aider » les insurgés.

Trois équipes de journalistes occidentaux (les chaînes de télévision CBS et Sky News et le site Buzzfeed) ont de leur côté indiqué avoir été retenus pendant plusieurs heures vendredi à Slaviansk par des rebelles aux nerfs à fleur de peau, qui en ont malmené certains avant de les relâcher.

Les rebelles pro-russes, hostiles au pouvoir mis en place à Kiev après le renversement du président Viktor Ianoukovitch, avaient nettement étendu leur emprise ces derniers jours, sans rencontrer beaucoup de résistance de la part des forces de l’ordre ukrainiennes. Ils contrôlent désormais des sites stratégiques (mairie, siège de la police et des services de sécurité) dans plus d’une douzaine de villes.

Les troubles ont aussi pris vendredi une ampleur inédite jusqu’ici dans la ville portuaire d’Odessa, où une manifestation en faveur de l’unité de l’Ukraine a été violemment attaquée par des militants pro-russes, se soldant par quatre morts et une dizaine de blessés.

Vous avez repéré une erreur ou disposez de plus d’infos? Signalez-le ici

Contenu partenaire