Ted Cruz © REUTERS

Ted Cruz: un personnage inquiétant et brillant devenu le dernier rempart républicain contre Donald Trump

Rudi Rotthier
Rudi Rotthier Journaliste Knack.be

Ted Cruz l’a dit lui-même : si vous cherchez quelqu’un avec qui passer une bonne soirée, il n’est pas votre homme. Après avoir longtemps exaspéré son parti, il devient le dernier rempart contre Donald Trump. Non parce qu’il obtient plus de voix, mais parce qu’il est plus futé.

La vie de Ted Cruz ressemble peu à celle de Trump – hormis qu’ils ont tous deux été fort influencés par un père dominant. Trump souhaitait réussir mieux que son père dans l’immobilier, alors que ce dernier avait pourtant du succès. Tous les jours, le père de Cruz répétait à son fils à quel point il était exceptionnel. Dès ses quatre ans, son père lui a martelé: « Tu es plus talentueux que n’importe qui. Dieu t’a prédestiné à de grandes choses ».

D’après un collaborateur de Cruz, cité dans « The Wilderness » de McKay Coppins (un livre sur le parti républicain), « toute la vie de Ted s’explique par cette petite phrase de son père ».

Pour Ted Cruz, personne ne l’aime parce qu’il est exceptionnel: les autres sont jaloux. À cet égard, il comprend pourquoi il est éconduit partout : les autres ont des raisons d’être jaloux. Depuis l’enfance, il est le meilleur.

Le père de Ted Cruz, Rafael, est né à Cuba. Révolutionnaire aux côtés de Fidel Castro, il a été torturé pendant trois jours dans les prisons du dictateur Batista. Ensuite, il a obtenu un visa d’étudiant et il est parti pour les États-Unis avec 100 dollars. « Grâce à Dieu », a déclaré Ted Cruz à ce sujet, « quand mon père a émigré au Texas, il n’y avait pas de progressiste bien intentionné pour l’entourer de son bras et lui dire : laisse-moi t’occuper de toi, laisse-moi te donner une indemnité. Laisse-moi te rendre dépendent de l’état. Arrête de faire la plonge. Ne te fatigue pas à travailler ».

Excuses pour Fidel

Quand Rafael retourne à Cuba, peu après la passation de pouvoirs, il réalise que Fidel est pire que Batista en matière de disparitions, de torture et d’oppression. Il revient rapidement aux États-Unis, et d’après son fils Ted, il s’excuse personnellement auprès de tous ceux qu’il a tenté de convaincre de la révolution cubaine. À treize ans, Ted suit un cours sur la Constitution et sur des penseurs de droite comme Hayek.

Quelques années plus tard, il entame une brillante carrière académique à Princeton et à Harvard, il fait partie d’un club de débat, obtient le titre de meilleur débatteur du pays. Grâce aux recommandations de ses professeurs, de gauche et de droite, il devient finalement clerc à la Haute Cour de Justice, le tremplin idéal pour la poursuite de sa carrière en justice et en politique.

Après son emploi à la Cour suprême, Cruz devient très actif au sein du parti républicain. Fin 2000, il intègre l’équipe juridique qui permet à George W. Bush, via le tribunal, de devenir président aux dépens d’Al Gore. En passant, il rencontre sa future femme Heidi, fille de missionnaires et future directrice adjointe de la banque Goldman Sachs.

Après l’élection de Bush, Cruz devient avocat suprême au Texas où il plaide à la Cour suprême et défend notamment le droit de laisser un monument avec les dix commandements sur le territoire de l’état. Il plaide également contre les limitations du port d’armes, contre l’ingérence de l’état fédéral dans les droits constitutionnels et contre la réduction de peine à l’égard de quelqu’un à qui le tribunal avait infligé une peine beaucoup trop lourde.

Après sa carrière d’avocat suprême, Cruz, le chouchou du Tea Party, tente sa chance au sénat. Il remporte le siège et devient le sénateur le plus conservateur du pays. Il vit son moment de gloire en 2013. Il s’adresse au Sénat pendant 21 heures, pour tenter de faire cesser le financement d’Obamacare.

Son discours marathon en fait le héros de la droite, mais l’épisode ne fait pas de bien à son parti. Les républicains baissent dans les sondages et on reproche à Cruz de placer sa propre ambition avant les intérêts du parti. Selon les quotidiens, il devient l’homme le plus haï de son parti.

Pourtant, il se présente à la l’élection présidentielle. Symbole de pureté, il est l’homme anti-Washington à Washington. Il ressemble davantage à un prédicateur qu’à un politique. « Un président qui ne commence pas chaque journée sur les genoux n’est pas apte à devenir commandant en chef de ce pays », déclare-t-il à un groupement chrétien.

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Il se dit contre le mariage gay, la migration illégale, l’accueil de réfugiés venus du Moyen-Orient, Obamacare, l’intervention de l’état, l’avortement et les subsides pour « planned parenthood », les mesures destinées à lutter contre le réchauffement climatique et le service d’impôts. Malgré tous les débats, on ne sait pas très bien ce qu’il défend. Il estime, répète-t-il, que les républicains gagneront s’ils font preuve de conservatisme.

Il a montré qu’il n’avait pas beaucoup de scrupules. Il a mené la campagne la plus efficace, mais aussi la plus sale de tous les candidats républicains. Dans l’Iowa, il a envoyé des papiers à l’apparence officielle pour inciter les gens à voter pour lui. Il déclare aux électeurs que Ben Carson ne sera probablement plus candidat, et qu’il vaut mieux voter Cruz.

Antipathique et radical

Si on a déjà élu des présidents antipathiques, pensez à Richard Nixon, l’association antipathique- radical de droite n’est pas le chemin le plus court vers une majorité – Cruz est à ce point de droite et évangéliste qu’il décourage beaucoup de républicains.

Et pourtant, Cruz se maintient. S’il a perdu en Caroline du Sud et en Alabama, il limite les dégâts. Dans le Wisconsin, par exemple, il remporte pratiquement la moitié des voix républicaines. Il obtient l’adhésion du parti.

Beaucoup se demandent si le parti fait le bon choix, si Cruz n’est pas beaucoup plus dangereux et repoussant que Trump. L’adhésion du parti est d’ailleurs une bénédiction mitigée pour Cruz, qui a toujours mené campagne comme outsider. À présent, Trump est devenu le plus grand outsider. Depuis, Cruz s’en prend à Washington et se présente comme quelqu’un qui peut rassembler.

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