.

Sofagate: « Je me suis sentie blessée » (Von der Leyen)

Le « Sofagate » a fait son retour sur le devant de la scène européenne à l’occasion de l’ouverture de la plénière du Parlement européen, lundi. Le président du Conseil européen Charles Michel et la présidente de la Commission européenne Ursula von der Leyen étaient appelés à faire le point sur le sommet européen de fin mars et la visite des deux responsables à Ankara le 6 avril.

Près de trois semaines après l’incident, l’Allemande a enfoncé le clou. « Je suis présidente de la Commission, et c’est ainsi que j’attendais d’être traitée durant la visite en Turquie. Mais cela n’a pas été le cas », a-t-elle lancé, prenant la parole après le Belge face aux eurodéputés. « Je ne trouve rien dans les traités européens qui justifie la manière dont j’ai été traitée. Je dois donc en conclure que cela a eu lieu parce que je suis une femme ». Précédemment, Charles Michel avait une nouvelle fois regretté l’incident et rappelé que les services européens du protocole n’avaient pas eu un accès préalable à la salle. Le protocole en lui-même a fait débat ces dernières semaines, les différents observateurs n’étant pas d’accord sur l’implication concrète à donner à l’ordre de préséance en faveur du président du Conseil.

Les images du moment où Charles Michel et le président turc Recep Tayyip Erdogan s’installent dans deux fauteuils placés côte à côte, tandis qu’Ursula von der Leyen se demande visiblement où elle doit s’asseoir, ont fait le tour de la Toile.

Si Charles Michel n’a pas voulu en faire un signe de discrimination, soulignant à maintes reprises le contenu bien plus large de la rencontre avec le président turc, Ursula von der Leyen a clairement replacé l’affaire sur le plan de l’égalité hommes-femmes. « Je me suis sentie blessée, seule, en tant que femme et en tant qu’Européenne », a expliqué lundi la première femme à présider l’exécutif européen. « Il ne s’agit pas d’arrangements de sièges ou de protocole, cela renvoie au coeur-même de qui nous sommes, aux valeurs que l’UE défend. Cela montre la distance qu’il nous reste à franchir avant que les femmes ne soient traitées en égales, partout et tout le temps ». Elle a ensuite rappelé les défis, nombreux, qu’il reste à relever au sein-même de l’UE dans ce domaine.

Du côté des élus, le groupe SD (sociaux et démocrates) a regretté via la voix de sa présidente Iratxe García que l’incident ne donne pas lieu à un débat dédié. « Nous attendons des actes », a-t-elle affirmé face à Charles Michel. « Nous attendons que le Conseil, une fois pour toutes, débloque la directive ‘women on boards’ qui traine dans ses tiroirs depuis plusieurs années ».

Ce n’est pas la première fois que les parlementaires rappellent l’existence de ce texte: la proposition de directive « relative à un meilleur équilibre hommes-femmes parmi les administrateurs non exécutifs des sociétés cotées en bourse » existe depuis… 2012. Le texte visait à fixer un minimum de 40% de femmes (et d’hommes) dans les conseils d’administration des entreprises, parmi les administrateurs non exécutifs, aussi bien dans le public que dans le privé. Le Parlement a appuyé la proposition en novembre 2013. Certains Etats, dont les Pays-Bas par exemple, s’opposent cependant à des objectifs contraignants au niveau de l’UE. Les présidences successives du Conseil n’ont pas encore trouvé de solution.

Plusieurs représentants ont surtout insisté sur l’importance que l’UE s’exprime d’une seule voix sur la scène internationale. « Où est cette Europe qui veut être forte sur le plan géopolitique? », a ironisé Manfred Weber, président du groupe PPE, le plus important du Parlement. « Soyons honnêtes (…) Erdogan l’a joué ‘malin’. Mais c’est aussi parce que les tâches ne sont pas bien réparties » côté européen, a enfin souligné la Belge Hilde Vautmans (Open Vld, Renew).

Contenu partenaire