© BELGA/Benoît Doppagne

RDC: Katumbi tente un retour très compromis pour défier Kabila

Le Vif

L’opposant congolais en exil Moïse Katumbi a livré vendredi un baroud d’honneur pour défier son adversaire le président Joseph Kabila en organisant -ou en mettant en scène- une tentative de retour très compromis en République démocratique du Congo.

Deux jours après le retour triomphal de l’ex-chef de guerre Jean-Pierre Bemba, Katumbi prétendait comme lui revenir au pays pour déposer sa candidature à l’élection présidentielle avant la date-butoir du 8 août.

Autant les autorités avaient facilité le retour de Bemba après son acquittement par la Cour pénale internationale (CPI), autant elles ont été inflexibles avec Katumbi, le seul opposant qui fait vraiment peur à Kabila se félicitent certains de ses partisans. Menacé d’arrestation s’il foule le sol congolais, l’ex-homme fort du Katanga minier est arrivé par la Zambie à quelques dizaines de mètres de son pays natal pour la première fois depuis mai 2016. Entouré d’une foule de partisans survoltés, il s’est présenté à la douane zambienne au poste de Kasumbalesa, d’après un journaliste de RFI sur place.

Du côté congolais, la frontière était fermée, affirme M. Katumbi. « Le gouvernement de la RDC a refusé à Moïse Katumbi même le droit de se faire arrêter », a ironisé un membre de la société civile, Jean-Pierre Muteba. « Mon crime? Vouloir entrer dans mon pays et déposer ma candidature. En tentant de me bloquer, on veut retirer aux Congolais leur droit à de vraies élections. Je me battrai! Merci à l’immense foule ici à Kasumbalesa! », a twitté l’opposant, sans dire s’il allait rester ou faire marche arrière. Côté congolais, les forces de l’ordre ont riposté aux manifestants qui jetaient des pierres en tirant en l’air et un camionneur tanzanien a été légèrement blessé, a indiqué la police congolaise. M. Katumbi avait indiqué à l’AFP un peu plus tôt qu’il avait atterri à Ndola, dans le nord de la Zambie, près de la frontière dans la région de la Copperbelt.

Depuis le début de la semaine, l’ex-gouverneur du Katanga répétait qu’il voulait arriver à Lubumbashi, la capitale de la région minière où il entretient sa popularité à distance en présidant toujours aux destinées du TP Mazembe, une gloire du football africain. Le maire de la ville, nommé par le pouvoir, avait refusé jeudi soir.

Route bloquée

A Lubumbashi, la route qui mène vers la Zambie a été bloquée en début de matinée. Les forces de l’ordre ont dispersé plusieurs dizaines de pro-Katumbi qui voulaient se rendre à l’aéroport en début de matinée à coup de gaz lacrymogène, a indiqué un colonel de police à un journaliste. A Goma, dans l’est du pays, la police a aussi interdit un rassemblement pro-Katumbi, a constaté un correspondant de l’AFP.

Ex-proche du président Kabila passé à l’opposition fin 2015, M. Katumbi a quitté Lubumbashi en mai 2016 pour des raisons médicales, et en plein démêlés judiciaires. Il a été condamné en son absence à trois ans de prison dans une affaire de spoliation immobilière dont il conteste tout fondement. L’appel et les recours contre cette décision de justice sont suspensifs, affirment ses proches. Une juge réfugiée en France a affirmé après son départ en RDC avoir prononcé la condamnation de M. Katumbi sous la pression et les menaces des proches du pouvoir de M. Kabila. L’homme d’affaires est aussi poursuivi pour « atteinte à la sûreté de l’État » dans une affaire de recrutement présumé de mercenaires, que la Cour suprême a renvoyée au 10 octobre.

M. Katumbi est le leader de l’opposition le plus populaire avec Jean-Pierre Bemba et Félix Tshisekedi, selon un récent sondage publié par le Groupe d’Études sur le Congo et un bureau d’études tenu par des proches du porte-parole de M. Katumbi. Il prétendait déposer sa candidature à l’élection présidentielle prévue le 23 décembre supposée organiser la succession du président Kabila.

M. Kabila ne peut pas se représenter d’après la Constitution après avoir accompli deux mandats. A cinq jours de la date-butoir du dépôt des candidatures, il n’a toujours pas désigné de « dauphin ». Ses adversaires l’accusent de chercher des stratagèmes pour rester au pouvoir. En conférence de presse, l’ex-chef de guerre Jean-Pierre Bemba a invité vendredi les autorités à « calmer le jeu », et à favoriser des « élections inclusives » afin d’éviter toute contestation post-électorale.

Vous avez repéré une erreur ou disposez de plus d’infos? Signalez-le ici

Contenu partenaire