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RDC : Didier Reynders, monsieur bons offices

Au risque d’être accusé de « légitimer » le président réélu Joseph Kabila, Didier Reynders a voulu être le premier responsable européen à se rendre au Congo depuis les élections. Le chef de la diplomatie belge a tenté d’encourager le dialogue entre la majorité et l’opposition.

« Didier Reynders, médiateur ou facilitateur de la crise congolaise ? » titre un journal kinois. « Il n’était pas attendu, mais il est venu », assure un autre quotidien de la capitale. Le ton du voyage est donné. Pour les médias congolais, la visite en République démocratique du Congo (RDC) du chef de la diplomatie belge, cette semaine, n’aura pas été qu’un déplacement post-élections à valeur symbolique. Didier Reynders a eu beau marteler, pendant trois jours, qu’il était « là pour écouter », pour se faire une idée de la façon dont ses interlocuteurs congolais « voient l’avenir du pays », les commentateurs locaux, eux, lui ont attribué un rôle d’influence dans l’actuelle redistribution des cartes au sein du pouvoir. « Etes-vous venu pour légitimer le pouvoir et appuyer, comme certaines rumeurs le prétendent, une candidature à la Primature de Léon Kengo wa Dongo, l’actuel président du Sénat », a ainsi lancé une journaliste télé congolaise ?

« Ici comme ailleurs dans le monde, je n’ai aucune volonté de légitimer le pouvoir en place, encore moins de choisir ou de donner des indications sur le choix d’un Premier ministre, a répondu le ministre belge. Voilà une tâche qui s’avère déjà suffisamment compliquée chez nous, en Belgique ! J’espère toutefois que le futur Premier ministre sera une personnalité crédible sur le plan national et international. » Reynders assure que son premier souci, en se rendant en RDC, était d’y faire passer un message d’encouragement au dialogue entre forces politiques, afin que les institutions congolaises puissent fonctionner dans les semaines et les mois qui viennent. « J’ai moi-même aidé à décrisper la situation, mais le signe d’ouverture doit désormais venir du pouvoir », lui a répondu Timothée Kombo Nkisi, doyen des députés nouvellement élus, devenu président du bureau provisoire de la nouvelle Assemblée. Ironie du sort Kombo Nkisi est un membre de la direction politique de l’UDPS, le parti de l’opposant Etienne Tshisekedi. Exclu du parti par les tshisekedistes radicaux dès sa désignation, le vieux professeur assure toutefois qu’il participe encore à des réunions de l’UDPS.

Un autre opposant modéré, Kengo wa Dondo, avec lequel Reynders s’est longuement entretenu, appelle, lui, à tourner la page des élections, à « ne pas regarder indéfiniment dans le rétroviseur », car, fraude massive ou pas, « la cause est entendue. » Il faut, ajoute l’ancien baron mobutiste, « essayer de créer une nouvelle majorité qui satisfasse les deux parties, majorité et opposition. La paix sociale est à ce prix. » Mais il admet que le pouvoir ne l’a pas sollicité jusqu’ici.

Un pouvoir pratiquement muet. Absent de la scène politique depuis sa prestation de serment, Joseph Kabila offre un boulevard (du 30-Juin) à tous ceux qui, à Kinshasa, propagent rumeurs, commentaires et hypothèses sur son compte. Pour les uns, le président réélu se tait, car il est dépité par le résultat des élections à Kinshasa et dans plusieurs provinces du pays où son bilan n’a pas convaincu. Pour d’autres, il assisterait, impuissant et fâché, à une guerre des clans qui ferait rage dans sa propre majorité depuis la disparition de son « Mazarin », Augustin Katumba Mwanke. Plusieurs noms sont cités pour la succession d’Adolphe Muzito à la Primature : des membres du gouvernement sortant et des hommes de l’entourage immédiat du président, mais aussi des opposants. Autant de rivaux politiques ambitieux qui ne se feraient pas de cadeaux.

O.R.

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