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Pouvoir d’achat, retraites, climat, Ukraine… : les urgences du second quinquennat d’Emmanuel Macron

Olivier Rogeau
Olivier Rogeau Journaliste au Vif

Réélu mais confronté à une France fracturée, Emmanuel Macron est attendu sur les fronts économique, social, climatique… Face aux critiques, parviendra-t-il à se réinventer avec une « nouvelle méthode », dont les contours sont encore flous?

Comment gouverner autrement? Réélu avec 58,54% des voix face à une extrême droite toujours plus puissante, Emmanuel Macron entame un nouveau mandat de cinq ans sans blanc-seing, alors que l’attendent des défis majeurs, sur fond d’inflation et de guerre aux portes de l’Europe. Son premier quinquennat a été troublé de bout en bout par des crises inédites: hexagonale, avec la fronde des gilets jaunes, et mondiale, avec le Covid. Elles ont laissé des traces, tandis que l’invasion russe de l’Ukraine ouvre une ère d’incertitudes géopolitiques et économiques. Son second mandat pourrait être, lui aussi, mis à rude épreuve. « Les années à venir, à coup sûr, ne seront pas tranquilles », prévient-il.

Passée l’épreuve des législatives de juin, un « troisième tour » qui fixera l’équilibre politique du pays, le président risque d’être confronté à un « quatrième tour », social celui-là. Macron devra entendre les colères et frustrations de la société française pour ne pas se retrouver confronté à une vague dégagiste amplifiée. Face aux critiques, il a promis de se réinventer, avec une « nouvelle méthode » qui associerait davantage. Après un premier quinquennat « jupitérien », il adopterait une pratique du pouvoir moins verticale. « Cette ère nouvelle ne sera pas la continuité du quinquennat qui s’achève, mais l’invention collective d’une méthode refondée », a-t-il promis le soir de sa victoire. Le réformateur fougueux aura-t-il plus de considération pour les corps intermédiaires? Le Parlement sera-t-il moins amorphe? Quelle forme prendra la « large concertation » promise en vue des réformes annoncées sur l’école et le secteur des soins de santé? Les contours de la méthode sont encore flous. En revanche, les chantiers prioritaires du second quinquennat sont esquissés.

Pouvoir d’achat

Préoccupation principale des ménages, qui encaissent de nouvelles flambées des prix, et thème central de la campagne présidentielle, le pouvoir d’achat sera l’un des dossiers prioritaires du début de second quinquennat. Emmanuel Macron promet de réindexer dès cet été les retraites sur l’inflation. Une nouvelle « prime Macron », défiscalisée et sans charges pour les entreprises, sera versée aux salariés gagnant moins de trois fois le Smic. Il est aussi prévu un « chèque alimentaire » pour les plus modestes, dont profiteraient près de huit millions de personnes.

Retraites

Dossier explosif du second quinquennat, la réforme des retraites, qui vise à faire des économies et à sécuriser le montant des pensions, sera précédée d’une concertation avec les partenaires sociaux. Souci: les syndicats s’opposent à un relèvement de l’âge légal de départ, qui passerait de 62 à 65 ans d’ici à 2031. Pour tenter d’apaiser la fronde, Macron assure que le curseur pourrait, à terme, être fixé à 64 ans.

Démocratie

Les taux d’abstention élevés enregistrés lors des deux tours de la présidentielle et la défiance des Français à l’égard du pouvoir traduisent une fragilisation de la démocratie, évolution également observée dans d’autres pays européens. Emmanuel Macron prône un retour au septennat et suggère la tenue d’élections législatives de mi-mandat, une « respiration démocratique » à la manière des midterms américaines. Comme Marine Le Pen, le chef de l’Etat se dit favorable à l’introduction de la proportionnelle pour les législatives, un moyen de « recréer de la concorde », estime-t-il. C’est « une piste de réflexion, pas une promesse ». Dès lors, le doute subsiste. En 2017, il s’était engagé à intégrer une dose de proportionnelle dès la première année de son mandat, projet non concrétisé.

Climat

Attaqué à gauche pour son manque de volontarisme en matière environnementale, Emmanuel Macron promet un virage vert, un « nouveau modèle productif plus écologique ». Il veut aller « deux fois plus vite que lors du précédent quinquennat » dans la réduction des émissions de gaz à effet de serre, qui doivent diminuer de 40% d’ici à 2030 par rapport à 1990 pour respecter les engagements pris dans le cadre des accords de Paris. Il prévoit une réduction de la consommation énergétique grâce à l’isolation de 700 000 logements par an et un mix électrique basé sur le développement du nucléaire et du renouvelable. Son nouveau Premier ministre sera chargé de la « planification écologique », un concept cher à l’Insoumis Jean-Luc Mélenchon.

Ukraine

Mise entre parenthèses pendant la campagne, l’action diplomatique du président français redécolle. Il compte multiplier les initiatives pour marquer un soutien effectif à l’Ukraine et pourrait se rendre prochainement à Kiev – le président Volodymyr Zelensky l’a invité. Macron envisagerait une tournée européenne pour maintenir l’unité des Vingt-Sept face à Moscou.

Europe

Macron dispose de cinq années supplémentaires pour faire avancer l’Union. Sa victoire face à l’extrême droite populiste et europhobe a été saluée par de nombreux dirigeants européens soulagés. Le Financial Times voit en lui le « politicien le plus puissant d’Europe ». Réussira-t-il pour autant à faire accepter son idée de lancer un nouvel emprunt commun pour absorber les effets des conséquences économiques de la rupture avec la Russie? Il remettra aussi sur le tapis le renforcement de l' »autonomie stratégique » de l’Europe. La France assure encore, jusqu’au 30 juin prochain, la présidence tournante du Conseil de l’Union. L’occasion pour Paris de donner un coup d’accélérateur à ses priorités.

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