Bjarni Benediktsson © AFP/Angela Weiss

Les Islandais vont retourner aux urnes après la chute du gouvernement

Le Vif

Le Premier ministre islandais a annoncé vendredi la convocation prochaine de législatives anticipées, les deuxièmes en moins d’un an, après le retrait d’un parti de la coalition de centre-droit qui a fait chuter le gouvernement.

Les élections devraient se tenir avant la fin de l’année, vraisemblablement en novembre, un peu plus d’un an après le dernier scrutin provoqué par le scandale des Panama Papers, a précisé Bjarni Benediktsson au cours d’une conférence de presse à Reykjavik.

« C’est une déception considérable, mais il semble que nous en soyons là où nous en étions à l’issue des législatives de 2016 (…) et je ne vois pas d’autre alternative que d’appeler les électeurs aux urnes », a-t-il déclaré.

Avenir radieux, une formation centriste pro-européenne qui ne siège pas au gouvernement mais lui apporte ses voix au parlement, a annoncé tôt vendredi le retrait du soutien de ses quatre députés, faisant de facto tomber le cabinet Benediktsson et déclenchant une énième crise politique sur la petite île de l’Atlantique nord.

Avec ses 32 sièges sur les 63 que compte l’Althingi, le Parlement monocaméral islandais, la coalition de centre droit, formée il y a neuf mois au prix de laborieuses négociations, avait tout juste la majorité absolue.

Cette fragile coalition, la plus éphémère de l’histoire de l’Islande, reposait sur le Parti de l’indépendance (conservateur, 21 sièges) dirigé par le Premier ministre, Avenir radieux (quatre sièges) et Renaissance ou Parti de la réforme (centre droit, sept).

Virulente polémique

Avenir radieux, dont l’ensemble de la classe politique a emboîté le pas, accuse le dirigeant conservateur d’avoir couvert son père dans un sordide imbroglio judiciaire qui a choqué les Islandais.

Au coeur du scandale, une disposition légale mais très controversée du code pénal islandais permettant aux détenus ayant purgé leur peine de demander que toute mention à leur casier judiciaire soit escamotée moyennant la caution écrite de trois personnes jugées de bonne moralité.

En vertu de cette loi, un pédophile condamné en 2004 à cinq ans et demi de réclusion pour avoir violé sa fille adoptive de façon quasi quotidienne pendant 12 ans a obtenu une lettre de recommandation du père du Premier ministre, Benedikt Sveinsson, un octogénaire de ses amis selon la presse locale, considéré comme l’un des entrepreneurs les plus riches d’Islande.

Outre que la pratique est désormais rejetée par une majorité des Islandais, il est reproché à M. Benediktsson d’en avoir été informé dès juillet mais d’avoir maintenu ses partenaires de la coalition dans l’ignorance jusqu’à ce qu’une commission parlementaire lui torde le bras.

Le gouvernement a depuis indiqué avoir engagé une révision du code pénal. La procédure incriminée – qui ne change rien au verdict de culpabilité – est au coeur d’une virulente polémique publique qui a culminé ces dernières semaines avec le cas similaire d’un ancien procureur condamné lui aussi pour pédophilie.

De plus en plus d’Islandais y voient une négation des souffrances des victimes.

Le Premier ministre a lui-même jugé vendredi ces dispositions, destinées à rétablir les détenus dans leurs droits civiques à la sortie de prison, « incompatibles avec la sensibilité de l’opinion publique » et assuré qu’il avait été « choqué » d’apprendre la démarche de son père.

« Je n’aurais pas pu écrire une telle lettre », a-t-il assuré, tout en se défendant d’avoir mis l’affaire « sous le boisseau » et en fustigeant dans le retrait d’Avenir radieux « la faiblesse de ceux qui désertent ».

La popularité de Bjarni Benediktsson était déjà largement ternie après que son nom fut apparu dans les Panama Papers en 2016 et qu’il eut retardé la publication d’un rapport sur l’évasion fiscale en pleine campagne pour les législatives.

Son Parti de l’indépendance, qui domine la vie politique islandaise depuis les années 1930, bénéfice en revanche d’une cote enviable dans les sondages et pourrait cette fois encore arriver en tête des législatives.

Vous avez repéré une erreur ou disposez de plus d’infos? Signalez-le ici

Contenu partenaire